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LIBRARY OF MARINE BIOLOGICAL LABORATORY
WOODS HOLE, MASS.
LOANED BY AMERICAN MUSEUM OF NATURAL HISTORY
ANNALES
SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE
BELGIQUE.
ANNALES
DE LA
CITE ALACOLTIOE
DE
BELGIQUE
TOME VIII
Année 1873
BRUXELLES
IMPRIMERIE ET LITHOGRAPHIE DE Ve NYS, 57, RUE POTAGÈRE, 57
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L HENRE ANTOINE JOSEPH LAMBOTTE.
HENRI LAMBOTTE
NOTICE BIOGRAPHIQUE
PAR
H. DENIS.
— SÉANCE DU 41 JANVIER 1874. —
Le 6 avril 1863 eut lieu la première séance régulière de la Société Malacologique de Belgique, fondée le 1* janvier de la même année, il y a onze ans. Celui qui la présidait était entouré de la sympathie de tous; c'était un homme simple, bon et d’une droiture extrême ; chacun avait pu mesurer l’étendue de ses connaissances et apprécier la finesse et la profondeur de son esprit d'observation; mais derrière le savant modeste, qui, dédaigneux de tout pédantisme, s’attachait surtout à rendre la science familière et populaire, on n’avait pas toujours re- connu le naturaliste philosophe, capable de s’élever aux plus hautes généralités du savoir humain.
Dans le discours d'ouverture qu'il prononça alors, Henri Lambotte, après avoir décrit l'attrait que la nature inspire à la Jeunesse, avide d’en pénétrer tous les secrets, laissa échapper ces paroles : « Il est bien peu d'hommes, au déclin de leurs Jours, et quand le repos leur sourit, qui n’éprouvent une sorte de tristesse et presque de découragement, en songeant qu'ils
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quitteront la terre sans avoir pu satisfaire à ces aspirations de leur enfance. » Toute l’histoire d'Henri Lambotte était dans ces paroles, car elles n’exprimaient pas seulement un senti- ment vague et général, elles révélaient au contraire d’une façon discrète, toute l’amertume d’une âme ardente dont les circonstances avaient violemment comprimé l'essor, qui, après avoir conçu de grandes choses, s'était vu enlever la force né- cessaire pour les réaliser, et qui, sentant enfin s'approcher le terme de la vie, osait à peine regarder en arrière, tant elle portait douloureusement le deuil de ses espérances perdues. La vie intellectuelle d'Henri Lambotte se divise en effet en deux phases bien distinctes : la première qui s'arrête en 1850, est marquée par une activité extraordinaire ; on voit le jeune savant entreprendre et poursuivre des investigations labo- rieuses dans le domaine entier des sciences naturelles, soit seul, soit sous la direction ou avec le concours bienveillant de deux maîtres qui lui furent toujours chers, Cauchy et Fohmann; il accumule les matériaux d’une œuvre dont il a déjà nette- ment conçu et arrêté le plan, et dans des publications qui se succèdent rapidement, 1l livre au public les résultats partiels de ses recherches; la seconde période de sa vie contraste sin- gulièrement avec la première; la lassitude et le découragement se sont évidemment emparés de cet esprit si enthousiaste na- guêre ; le monument scientifique que ses travaux antérieurs annonçaient ne s’achêve pas; ses publications deviennent de plus en plus rares et semblent de moins en moins se rattacher à un plan d'ensemble ; il meurt enfin laissant une œuvre frag- mentaire et disséminée, imposant à ses amis le soin de re- chercher au milieu de travaux épars les idées générales aux- quelles il les rattachait, et leur imposant le devoir plus pénible encore de disputer sa mémoire à l'oubli. Dans cette dernière phase de sa vie, avait-il reconnu en lui une irremédiable im- puissance, ou des circonstances funestes avaient-elles glacé son ardeur ? C’est cette seconde explication qui est la vraie ; sa carrière scientifique avait été brisée, et chose plus triste en-
NOTICE BIOGRAPHIQUE. ji]
core, il avait dù lentement user ses forces dans des luttes poi- gnantes contre les besoins matériels. Les efforts tardifs que l’on fit pour le rendre tout entier à lui-même, à la science, à la philosophie, furent à peu prés infructueux; la foi dans l’avenir, qui seule enfante les grandes choses, ne lui revint plus; cette âme délicate et sensible avait été trop profondément blessée, on peut dire qu'Henri Lambotte est mort désespéré. = Essayons donc de rassembler ce qui reste de l’œuvre scien- tifique de ce savant modeste et malheureux à qui, plus que per- sonne, nous devons une complète justice.
Né en 1816, Henri Lambotte fit ses études humanitaires au collége de Namur, il vint ensuite suivre les cours de l’Univer- sité de Liége; le savant Fohmann, qui professait alors, s’attacha bien vite le laborieux étudiant dont il avait reconnu les hautes aptitudes. C’est ainsi que la carrière scientifique de Henri Lam- botte commença à 18 ans. « En 1835, dit-il lui-même dans une note manuscrite, j'ai commencé à travailler avec le pro- fesseur Fohmann à la confection d’un grand nombre de pièces anatomiques et j'ai continué à être le collaborateur de ce sa- vant anatomiste jusqu’à sa mort; toutes ces pièces ont con- couru à former la belle collection qu'il a laissée à l’Université de Liége. Vers cette époque, le prosecteur d’anatomie tomba malade, et je me chargeai gratuitement de ses fonctions pen- dant près de deux ans. Après la mort du professeur Fohmann, le gouvernement sépara la collection d'anatomie humaine de celle d'anatomie comparée dont je fus nommé conservateur. C'est vers cette époque que j'obtins le grade de docteur en sciences naturelles. » C'était en 1837 et Henri Lambotte avait 21 ans; pendant la durée de ses fonctions de conservateur il devait préparer plus de 300 pièces anatomiques pour lUniver- sité.
C’est aussi à cette époque que remontent ses premières pu- blications scientifiques.
En 1836 il avait envoyé à l’Académie une Vote sur une roche feldspathique découverte à Grand-Manil près de Gem-
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bloux (Bull. de PAcad. I, p. 391.) Henri Lambotte y considé- rait différentes roches feldspathiques découvertes dans une carrière de Grand-Manil comme formant un dyke dans le ter- rain appelé alors ardoisier. On jugera en consultant l’abrégé de M. d’'Omalius (p. 509 de la 7° édition) et le prodrôme de M. Dewalque (p. 290) de l'exactitude de l’interprétation de Henri Lambotte.
C’estle 8 mai 1837 que l’Académie couronna un mémoire de lui en réponse à cette question : Défermainer les modifications que subissent les appareils sanquins et respiratoires dans les métamorphoses des Batraciens anoures (Nouv. Mém. couronnés XII.)
Henri Lambotte y établit que les têtards respirent par toutes les surfaces qui sont en contact avec le fluide ambiant : les branchies, la peau, le péritoine, les sacs pulmonaires.
Il signalait pour la première fois l'existence d’une commu- nication entre la cavité branchiale et la cavité abdominale, et par suite l'existence d’une respiration abdominale ou périto- néale. C'était là un fait nouveau dans la science ainsi que le reconnurent les savants chargés de faire un rapport sur ce mé- moire (1). Ce rapport rédigé par Fohmann a paru dans le Bul- letin de l’Académie (vol. IV, p. 180-196.) La seule découverte de la respiration abdominale, disait Fohmann, méritait les suf- frages de l’Académie. La respiration cutanée des têtards était également un fait nouveau. Ce mode de respiration est ana- logue à celui des végétaux et des animaux les plus inférieurs. La surface du corps des têtards est criblée de petites fossettes qui pénètrent entre les mailles du réseau vasculaire, et Lam- botte pense que le liquide ambiant s’introduit dans ces cryptes et doit favoriser l’action de l'oxygène sur le sang qui y est ex- posé dans des capillaires très-tenus. Ce qui est plus original encore dans cette partie du travail de Lambotte, et atteste la
(1) Voyez en outre le Rapport de M. Van Beneden dans le Cente- naire de l’Académie,
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puissance d’induction du jeune savant, c’est le rapprochement qu'il établit entre la respiration cutanée des têtards et la respi- ration placentaire des mammifères à un certain degré de leur développement. L'influence de la lumière sur le développe- ment des organes respiratoires lui fournit également des con- sidérations intéressantes ; c’est ainsi qu'il croit que le Protée vivant dans les lacs souterrains de la Carniole et qui n’acquiert Jamais de respiration pulmonaire doit son origine à un batra- cien dont les œufs se seraient développés dans ces eaux et qui aurait subi un arrêt de développement devenu héréditaire. L’explication de l’atrophie du système branchial qui termine ce mémoire n’a pas été admise par Fohmann.
Cette même année il publia une notice sur une araignée d'Italie, le Theridion malmignatte (Bull. IV, p. 488.)
En 1839 il envoya à l’Académie une nouvelle note sur les globules du sang (Bull. VI, n° 8). Dans cette note il essaya d'établir à l’aide d'expériences ingénieuses que les globules du sang ne renferment point de noyau central, que l’anneau d'ombre qui s’y montre n’est qu'une illusion d’optique produite presque toujours par les objets environnants. Il établit en outre la solubilité complète de ces petites masses homogènes, non plus en les dissolvant directement dans l’eau, mais en expirant l’haleine sur une lame de verre où il étendait quel- ques gouttes de sang.
C'est aussi à cette époque qu'il publia sur le système nerveux des articulés une note dont nous parlerons plus loin. LÀ
L'étude de l’organisation intime des animaux qu'il menait de front avec ses études minéralogiques et géologiques, devait l’amener nécessairement à approfondir la chimie. Et cet esprit passionné et tenace devait aussi naturellement se donner tout entier pour un temps à cette branche du savoir humain. Aussi nous voyons en 1840, Lambotte publier une Vouvelle théorie de Chimie organique destinée à servir d'introduction à des re- cherches anatomiques et physiologiques sur les animaux. No-
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tons ce fait, il atteste à lui seul le caractère synthétique de l'esprit de Lambotte, comme l’enchaînement philosophique de ses études. Ce livre, sur lequel nous allons nous arrêter un moment, fut conçu, comme bien d’autres, pour ramener définitivement à la théorie dualistique, la chimie organique tout entière. L'auteur y étudie plus spécialement les sucres, l’urée, l'acide hydrocyanique, les matières albuminoïdes et cherche à les ramener à une composition binaire, en admet- tant l'existence de radicaux qu'il croit susceptibles d’être ob- tenus à l’état isolé.
C’est ainsi que dans le sucre il admet l'existence d’un radi- cal, le carbure trihydrique, et ramenant le sucre à une formule binaire, il en fait un carbonate à base de carbure trihydrique; dans l’acide hydrocyanique, il admet l’existence d’un acide nitrocarbonique qui se combine avec l’ammoniaque. Les matières albuminoïdes, albumine, fibrine, caséine et gélatine, sont des corps essentiellement binaires et dont les parties principales communes à la série, sont d’une part le carbure trihydrique dont j'ai parlé tout à l'heure, et de l’autre, l'acide nitrocarbo- nique ; les matières albuminoïdes différeraient par leurs par- ties complémentaires ou accessoires.
Ce travail est évidemment basé sur un ensemble d’hypo- thèses. Aussi cette tentative de systématisation, qui révèle une grande puissance intellectuelle d’ailleurs, était condamnée par les circonstances au milieu desquelles elle apparaissait. Pu- bliée en 1840, la Vouvelle théorie chimique était précisément contemporaine de l’écroulement de la théorie dualistique à l'établissement de laquelle Berzelius avait consumé son génie. Par d'importants travaux publiés dès 1836 et 1837, Laurent avait fondé la théorie de Ia substitution, porté un coup mortel au dualisme, et Berzelius lui-même luttait en vain contre une révolution scientifique au milieu de laquelle le rêve de sa vie devait s’abimer.
Cependant plus d’un passage de ce livre atteste qu'Henri Lambotte, à qui les travaux de Laurent, Dumas et Gehrart
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étaient restés probablement inconnus, entrevoyait la théorie des substitutions. J’ajouterai encore un fait devenu intéressant aujourd'hui. Il admet que les matières albuminoïdes qui for- ment la base des organismes, ont par leur plasticité, un carac- tère physique intermédiaire entre l’état solide et l’état liquide, et que cet état est dû au carbone. Or, c’est précisément ce que, en recherchant les origines de la vie, soutient aujourd’hui le savant biologiste Haeckel, le plus illustre représentant du dar- winisme en Allemagne (Dumont : Haeckel et la théorie de l'Évolution, p. 75-76.)
Ce mémoire sur la chimie, comme je l’ai dit plus haut, de: vait servir d'introduction à un ouvrage dont 1l annonça S pu- blication sous ce titre : Recherches anatomiques et physiologiques sur les animaux : 1"° partie, anatomie et physiologie générale. Cet ouvrage n’a jamais été publié, mais on en retrouve quel- ques fragments dans ses manuscrits.
En 1840 il publia une Vote sur l'organisation des membranes séreuses (Bull. de l’Acad., vol. VII.) Ces recherches lui furent inspirées par ses études sur les Batraciens anoures. Il arrive à cette conclusion que les membranes séreuses ne sont formées que d’un lacis inextricable de vaisseaux capillaires qui sont directement en communication avec les artères, les veines et les lymphatiques. On consultera avec fruit ce travail et les planches qui l’accompagnent.
Nous le voyons l’année suivante faire à l’Académie des sciences de Paris une communication sur un-système de cana- licules dans les plantes (Journal de l’Institut, année 1841.) Ses observations portaient sur la Vymphea lutea.
C’est aussi en 1841 qu’il fut chargé provisoirement à l’Uni- versité de Liége du cours d'anatomie comparée. Mais il n’allait pas tarder à quitter l’Université. En 1842, en effet, il revint à Namur pour y remplacer son maître Cauchy dans ses cours de minéralogie, géologie et métallurgie ; il essaya de continuer en même temps à enseigner les sciences biologiques dans des cours publics. Néanmoins il faut reconnaître que l’ordre ordi-
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naire de ses études était complètement changé, et que le monde inorganique allait devenir le domaine principal du professeur qui s'était surtout préoccupé jusque-là des êtres organisés. Ce fut à mon avis un mal, car Henri Lambotte, par ses tendances naturelles, était et devait être avant tout un anatomiste. Quoi- qu’il en soit, il se consacra avec ardeur à ses études nouvelles ; dès 1842 il publia un 7aité de Minéralogie pratique qui est resté son ouvrage le plus répandu. Il était spécialement des- tiné à conduire à une détermination rapide et sûre des miné- raux, en se fondant sur l'influence de la chaleur et de quelques réactifs. |
Les caractères des minéraux qui figurent dans ce livre avaient été directement déterminés par Lambotte, fidèle en cela à ses méthodes expérimentales rigoureuses. La classifica- tion qu'il en donnait était déduite de leurs propriétés les plus générales. Ce livré tout en conservant sa destination pratique n’est donc pas sans valeur au point de vue de la classification d’après la méthode naturelle.
Ses fonctions nouvelles le ramenaient à la géologie en même temps qu'à la minéralogie. Aussi le voyons-nous, en 1843, envoyer une note à l’Académie sur des roches d'origine ignée intercalées dans le calcaire de transition de la Belgique (Bull, vol. X, 2° partie, p. 489 et suiv.). Dans cette note il signale la présence d’une roche feldspathique altérée, la vakife ou plus exactement d’après lui, là spilite (de Brongniart) intercalée dans les bancs du calcaire de Givet. Il établit que cette roche a dû être injectée à l’état de fusion ignée, et qu’elle a modifié sensiblement les roches calcareuses qui l’enveloppent. Les opi- nions émises par Henri Lambotte sur les injections plutonien- nes sont conformes à celles que M. d'Omalius d’'Halloy à déve- loppées dans son savant abrégé (p. 469 de la T° édition) ainsi qu'il a bien voulu d’ailleurs le répéter à M. Mourlon qui l’a interrogé à ce sujet. On devra consulter également sur ce point le chapitre XV du Prodrôme de M. Dewalque. Mais nous n'avons pas trouvé dans ces ouvrages d'appréciation spéciale
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de la découverte d'Henri Lambotte. M. Dewalque a néanmoins pris soin de la mentionner dans son important rapport sur les sciences minérales présenté à l’Académie (Centenaire de l'Aca- démie) (1).
Cette étude partielle des roches plutoniennes se rattachait à un travail plus considérable sur les terrains primaires de la Belgique, dont il a annoncé la publication sous ce titre : Ætudes sur les terrains primordiaux de la Belgique. Observations faites de 1832 à 1842. Ce travail n’a point paru, mais on en retrouve une partie dans ses manuscrits. Il s’y occupe surtout du ter- rain houiller des environs de Namur.
Henri Lambotte préparait donc des travaux d'anatomie et de géologie considérables lorsque la suppression de l’école des mines de Namur vint le surprendre en 1851. Ce fut là le coup dont il ne se releva jamais. La suppression de cette école devait l'éloigner du professorat pour de longues années, car le gou- vernement qui lui retirait son emploi, ne l’appela plus à d’au- tres fonctions. La retraite du professeur fut-elle due, comme Henri Lambotte le croyait, à un acte d’intolérance politique ? Après avoir lu sa correspondance, on devra l’admettre avec moi. Cette mesure arbitraire lui causa un mal irréparable. « Privé de cette chaire à laquelle il avait consacré tous ses soins, toute sa vie, comme l’a @it sur sa tombe M. Ernest Rous- seau, ne trouvant plus que dans des leçons particulières trop rares, dans des recherches scientifiques que le défaut de res- sources ne lui permettait guère de poursuivre, l’occasion d’uti- liser les nombreuses connaissances qu’il avait acquises, et les brillantes facultés dont il était doué, il fut, pendant de longues années, condamné à une inaction qui dut souvent lui être bien cruelle, lui pour qui le travail avait toujours été une impé- rieuse nécessité! Ce travail si ardemment désiré, si longtemps espéré en vain, il l’obtint enfin, et il apprit avec bonheur en
(1) M. Dewalque est porté à croire néanmoins, d’après ce qu’il nous
a communiqué verbalement, que Henri Lambotte a confondu sou- vent le calschiste avec la vakite.
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1863, que le Conseil d'administration de l'Université libre l’avait nommé professeur des cours de zoologie, d'anatomie comparée, de minéralogie et de géologie. » :
L'Université de Bruxelles, nous pouvons le dire aujourd’hui, l'avait recueilli trop tard, non pour ceux qui, comme nous, reçurent son enseignement et apprirent à l'aimer et à l’esti- mer, mais pour sa propre gloire.
Les misères morales et matérielles avaient rendu désormais impossible l'achèvement de son œuvre. Aussi ne le voyons- nous, pendant cette dernière période, livrer au public que de rares travaux. En 1856, il avait publié une étude toute spé- ciale sur d'influence des fabriques de produits chimiques. Long- temps après, en 1870, il publia dans les Annales de la Société des sciences médicales et naturelles de Bruxelles, des considé- rations sur le corps thyroïde qui doivent encore nous arrêter, parce qu’elles se rattachent à l’ensemble de ses idées. L'objet de cette étude est l'interprétation morphologique de cet organe dont la fonction physiologique, s’il en a une, est restée incon- nue. En examinant la série des vertébrés, il constate que le corps thyroïde n’apparaît que chez les Batraciens anoures, et qu'à partir de ce sous-ordre, ce corps singulier se retrouve d’une manière constante chez tous les vertébrés supérieurs, jusque et y compris l’homme. Comme on sait, les batraciens anoures ont une respiration branchiale à l’état de tétards; à l’état adulte, ils deviennent pulmonés ; ajoutons que les bran- chies des têtards sont renfermées dans une cavité. Or, Henri Lambotte ayant observé, d’une part, que les têtards ne présen- tent pas de corps thyroïde, et d’autre part, qu’une fois parvenus à la respiration pulmonaire ils présentent ce corps, exactement dans la position de leurs branchies primitives, il est arrivé à penser avec une haute apparence de raison, que la glande thyroïde n’est autre chose que le résidu, l’épave des branchies temporaires. En rapprochant ce fait du développement embryo- logique des vertébrés supérieurs dont les fœtus présentent des organes temporaires assimilables aux branchies, il conclut défi-
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nitivement que le corps thyroïde n’en est que la forme atavi- que. Il préparait sur la rate, le thymus et les capsules susrhé- nales des études comparatives analogues, dont on regrette de ne pas retrouver des traces dans ses manuscrits. Ce fut là sa dernière publication. Deux années avant sa mort nous l’avons vu corriger les épreuves d’une classification des animaux d’après la méthode dichotomique de Lamarck, mais cet ouvrage ne vit jamais le jour, sans doute par suite du manque de ressources de l’auteur. Il en fut de même pour les leçons publiques qu’il donna à l’Université sur la Géologie dans ses applications à l'agriculture et que plusieurs d’entre ses élèves ont recueillies. Quand la mort vint l’emporter cette année (17 octobre 1873), il avait sans doute déjà depuis longtemps enseveli dans son âme ulcérée tous les rêves de gloire de sa jeunesse ; mais il lui restait toujours l’amour profond de cette nature dont la large et sereine hospitalité pour les faibles et les déshérités est comme un reproche amer à l’ingratitude et à l'indifférence des hommes. Ceux qui se firent sur sa tombe les interprètes de ses collègues, de ses amis et de ses élèves, dirent éloquemment ce quine peut retrouver sa place ici. M. Ernest Rousseau rappela le professeur savant et dévoué ; M. Féron, président de la Libre Pensée, l’homme intègre et inébranlable dans ses conr- victions, et M. Depacpe, le maitre bien aimé, ouvrant de vastes horizons à la jeunesse qui l’entourait.
. I] nous importe maintenant de rechercher quelle fut la con- tribution d'Henri Lambotte à la malacologie proprement dite. Il est certain d’abord que vers 1837 il fit sur les Céphalopodes des observations qu'il se proposait de publier, mais on ne retrouve pas de traces de ce travail spécial dans ses notes ma- nuscrites. Pendant les dix premières années de son séjour à Namur, au contraire, il recueilli, avec l’aide de son frère, une collection de fossiles qui est restée. Cette collection comprend les fossiles primaires des environs de Namur. D’après les ren- seignements que me fournit M. Mourlon, quelques-uns des gîtes explorés par Henri Lambotte ont complétement disparu
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aujourd’hui. L’acquisition de cette collection par l'État serait donc un véritable service rendu à la science.
Mais ce qui doit rendre surtout son souvenir cher à notre Société, c’est la part qu'il prit à sa création. C’est autour de lui que l’on vit se grouper, à la fin de 1862, MM. Colbeau, De Malzine, Fologne, Roffiaen, Seghers et Weyers qui, joi- gnant leurs efforts à ceux de Henri Lambotte, donnèrent des fondements solides à la Société Malacologique de Belgique. L’étendue de son savoir et la haute position qu'il avait dans l’enseignement l’appelaient à présider ses travaux. Il devait y occuper par la suite une place spéciale en nous rappelant tou- jours les rapports étroits qui unissent létude des mollusques fossiles et vivants à l’ensemble des sciences naturelles, en fai- sant planer, pour ainsi dire, l’idée synthétique et philosophique sur les recherches analytiques qui sont propres à toute société.
C’est dans cet esprit que furent conçus les travaux qu'il destinait à la Société malacologique. Le plus important de tous devait avoir pour titre : Le système nerveux des Mollusques comparé à celui des Articulés et des Vertébrés. I] annonça dès 1866 ; en 1867 il en présenta un résumé très-succinct à la Société (volume Il, p. 11); on n’en retrouve que la première partie dans ses manuscrits.
On vient de voir par le titre même de cet important mé- moire, qu'il étudiait à la fois les articulés et les mollusques dans leurs rapports avec les vertébrés. C’est ce qui nous oblige à placer ici même le résumé de la note qu'il cCommuniqua en 1839 à l’Académie, sur le rapprochement qui existe entre la disposition du système cérébral des animaux vertébrés et celle du ganglion susæsophagique des articulés (Bull., 1839, VI, 1'° partie, p. 81). L'étude de l’organisation des vertébrés, disait- il, a fait connaître comment les divers ganglions qui composent cet organe sont disposés les uns par rapport aux autres, et a déterminé la vraie signification des masses médullaires qui, dans les vertébrés inférieurs, semblaient au premier abord si différentes de celles de l’homme. Si sous le même point de
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vue, ajoutait-il, on compare le système cérébral des articulés à celui des vertébrés, on reconnaît que ce système est construit sur le même plan, et que les différents ganglions qui compo- sent le cerveau des articulés sont hés entre eux dans le même ordre que ceux qui par leur réunion constituent le cerveau des vertébrés. Ilretrouve en effet dans les ganglions susæsophagiens des articulés, les analogues des corps quadrijumaux, des nerfs optiques, du cervelet, du pneumo-gastrique et même de la queue de cheval de la moëlle épinière.
Ces idées obtinrent peu de crédit à l’Académie, et le rapport récent &e M. P.-J. Van Beneden sur les travaux de zoologie en Belgique (centième anniversaire de fondation, vol. IT, p. 32) contient une condamnation formelle de la note d'Henri Lam- botte : « il est clair aujourd’hui, dit M. Van Beneden, que la comparaison anatomique d'animaux appartenant à des types si différents ne peut conduire à aucun résultat de quelque valeur.»
La critique de M. Van Beneden s’adresserait sans doute avec non moins d'énergie aux recherches sur les mollusques. Lorsqu'on parcourt les travaux des naturalistes qui depuis Cu- vier ont étudié le système nerveux des mollusques, on constate d’une part qu’ils s’accordent de plus en plus à repousser l’idée d’un éype commun à cet embranchement et à celui des verté- brés, mais on constate aussi, ce qui me paraît bien remarqua- ble, que leurs observations tendent à multiplier les analogies des deux systèmes nerveux. Meyraud, dans son travail sur les Céphalopodes dont Ampère et Étienne Geoffroy de St-Hilaire ont rendu compte (Journal de l'Institut, 1833, p. 180) a distin- gué le premier, d’après ces grands critiques, deux systèmes nerveux chez ces animaux, un système cérébro-spinal et un système ganglionnaire, distinction jusque là regardée comme appartenant exclusivement aux vertébrés. On sait que Mey- raud, considérait les Céphalopodes comme des vertébrés re- pliés sur eux-mêmes. Souleyet, dans ses Observations anatomi- ques, physiologiques et zoologiques sur les mollusques Ptéropodes (Comptes rendus de l’Académie des sciences, 1843) admet que
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le système nerveux des mollusques correspond en fait, dans sa distribution, aux parties similaires qui le constituent dans les animaux supérieurs; mais il ajoute que la seule différence est dans le degré de développement et la disposition des parties qui est en rapport avec le rang que les mollusques occupent dans la série, et le plan que la nature a suivi dans leur type zoologique. Il soutient encore que le système nerveux des mollusques est toujours double et conséquemment symétrique, présentant cette analogie avec celui des articulés. Huxley a qualifié d’admira- bles les observations de Souleyet. M. Van Beneden, dans son beau Mémoire sur l’Argonaute (Nouv. mém. de l’Académie, XI, 1839), a signalé la disposition des nerfs stomacho-gastri- que et branchial de ce mollusque qui remplacent le grand sympathique et le pneumo-gastrique des vertébrés. Il dit encore en décrivant la position susæsophagienne du cerveau de lAr- gonaute : « On pourra sans grands efforts trouver de l’analogie avec les parties constitutives du cerveau des animaux supé- rieurs, puisque dans les uns comme dans les autres nous voyons les trois parties essentielles de cet organe : hémisphères, tuber- cules quadrijumaux et cervelet. Si l’on ne craignait de dimi- nuer l'importance des faits, on pourrait pousser l’analogie bien plus loin. »
Plus tard Huxley, dans son grand travail intitulé : On mor- phology of the Cephalous Mollusca (Philosophical Transactions, 1853), établit une vaste série de rapports entre le système nerveux des vertébrés et celui de ces mollusques ; il retrouve les analogues du corps strié, du nerf trijumau, du nerf auditif de la $° paire, du nerf facial de la 7°, du pneumogastrique et des nerfs rachidiens même dans les nerfs pédieux, ainsi que du grand sympathique. Le dernier et le plus vaste travail entre- pris sur le système nerveux des Céphalopodes est de M. Jules Chéron (Système nerveux des Céphalopodes, Ann. des sciences naturelles, 1866, 5° série, vol. V) ; il conclut en ces termes : « La structure du cerveau des Céphalopodes, question négligée jusqu'ici, nous a donné une fois de plus, par les résultats aux-
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quels nous sommes arrivés, la preuve incontestable du rang élevé qu’occupent ces animaux envisagés au point de vue de leur organisation. Mais malgré ces résultats, des vertébrés aux céphalopodes, nous voyons bien évidemment la nature pas- ser dun plan à un autre. Si c’est une erreur d'envisager ainsi cette question, il n’en est pas moins vrai qu’il existe, entre les uns et les autres, une lacune tellement grande que l’imagina- tion seule est habile à la combler. (Voir encore Milne Ed- wards, Rapport sur les progrès des sciences zoologiques en France, Paris, 1867, pages 197 et suiv.).
Si donc, malgré ces analogies, c’est une erreur de recher- cher pour ces embranchements wn {ype unique et absolu, n’est- ce pas également une erreur d'admettre des /ypes spéciaux absolument distincts? Comment se rendre compte alors des analogies de l’organisation ? Ces analogies de plus en plus pro- fondément étudiées ne doivent-elles pas mettre sur la trace d’une commune descendance, et révéler au moins au fond des types définitifs des embranchements et des classes, un type général plus ou moins effacé ? Les mollusques alors sans doute cesseraient bien évidemment d’être complétement assimilés dans leur composition organique aux vertébrés, ils cesseraient sans doute aussi d’appartenir à une série purement linéaire dont le dernier terme serait l’homme ; ils se détacheraient sim- plement de l’arbre généalogique de l’animalité en un point infé- rieur aux vertébrés, dont l'observation exacte des analogies fixerait la place réelle, pour former un rameau divergent, gar- dant ainsi une somme d'éléments communs, témoins d’un type primaire, tout en se rattachant plus étroitement à un type défi- nitif, plus complexe, en quelque sorte secondaire. C’est dans cette voie que la classification est du moins entrée avec Darwin et surtout Haeckel (ouvrage cité, p. 118) suivant la trace et complétant les travaux de Lamarck, Goethe et Geoffroy de St-Hilaire, etc. Pour moi c’est à ces idées que je m’arrête.
Quoi que l’on pense de ces idées, toujours est-il qu'Henri Lambotte s’en rapproche plus qu'on ne le croirait à première
Xvi SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
vue; son type unitaire des vertèbrés, des articulés, des mol- lusques,n’a pas un caractère étroit, circonscrit; il entreprend d'y faire rentrer même les différences profondes que l’on re- marque dans les trois embranchements, en soutenant qu’elles proviennent du développement plus ow moins considérable ou de l'atroplue de certains éléments chez les uns ou chez les autres. Il est regrettable que ce mémoire soit resté inachevé ; tout ce qui nous en reste, ce sont des considérations générales sur le système nerveux des vertébrés, qui devaient servir d’introduc- tion à son examen comparatif du système nerveux des mol- lusques.
On aura remarqué sans doute que la tentative d’unification typique qu'Henri Lambotte faisait en 1867 était précisément la même que celle que l’illustre Étienne Geoffroy de St-Hi- laire avait faite lui-même en 1820 et en 1830, lorsqu'il soutint l'unité de composition des vertébrés, des articulés et des mol- lusques, contre un adversaire redoutable, Georges Cuvier. Ceci nous amène naturellement à quelques considérations gé- nérales et rapides sur les idées d'Henri Lambotte en philoso- phie naturelle, et sur sa tradition scientifique.
Mais avant d'aborder ce point, il nous faut compléter ce qui est relatif à sa participation aux travaux de la Société malaco- logique ; je suis heureux de céder ici la parole à notre savant secrétaire, aussi soigneux de rendre justice aux autres que de s’effacer lui-même : « Si Henri Lambotte, m’écrit-il, a publié peu de notes dans nos Annales, chacun de nous sait néan- moins qu'il a suggéré à ses collègues l’idée de plusieurs tra- vaux, et leur a ouvert de nouveaux horizons. Il se plaisait à nous communiquer ses idées premières, à signaler les points à éclaircir, il indiquait la voie à suivre pour y parvenir, cher- chant toutes les occasions de répandre le goût des sciences. Et il faisait tout cela d’une façon si simple que les questions les plus élevées paraïissaient se résoudre tout naturellement ; nous pouvons, jusqu’à un certain point, nous dire aussi ses élèves, car nous ne revenions jamais d’une excursion faite avec lui,
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ou d’une de nos séances à laquelle il avait assisté, sans en rapporter des idées et des connaissances nouvelles. Il était né professeur, et je crois que l’on peut dire qu'il a fondé une école dans notre pays. ».
Si l’on me demande maintenant à quel ensemble d'idées, ou même plutôt à quelle idée générale se rattachent tous les tra- vaux d'Henri Lambotte, quelle est celle qui le guida dans ses investigations, celle dont il voulait poursuivre la démonstration complète, je répondrai sans crainte de me tromper ; cette idée empruntée à la philosophie des sciences biologiques, n’est autre que le principe de l’unité de composition des êtres organisés, et sous un autre aspect leur /oi d'évolution se dégageant de la variabilité même des espèces. Derrière Henri Lambotte se trouvaient sans cesse deux maîtres qui l’inspiraient, bien qu'il ne les nomme presque jamais dans ses écrits, Étienne Geoffroy de St-Hilaire et Lamarck; celui-là surtout lui révélant l’unité du règne animal dans l’organisation intime et d’une manière abstraite, celui-ci la lui montrant agissante et vivante dans l'espace et le temps; mais il n’a dû venir à Lamarck qu’en partant de Geoffroy de St-Hilaire.
Le principe de l'unité de composition, tel que l’a formulé Geoffroy de St-Hilaire, s’appuyait sur deux ordres de faits gé- néraux : d’une part, l’analogie des caractères transitoires des animaux supérieurs avec les caractères permanents des ani- maux inférieurs; d’autre part : la fixité des connexions des organes entre eux, fixité que Geoffroy de St-Hilaire avait essayé d'établir dans les trois embranchements supérieurs de Cuvier. Ce dernier principe avait un double corollaire : l’un, la loi de survivance, si l’on peut ainsi dire, des organes ayant perdu leur fonction, ou du maintien des organes rudimentaires groupés d’après leurs affinités électives ; l’autre, la loi du ba- lancement des organes ou de la compensation, d’après laquelle le développement extraordinaire d’un organe se fait aux dépens d’un autre.
On sait que Geoffroy de St-Hilaire ne conçut complètement
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sa théorie de l'unité de composition qu'après ses vastes re- cherches sur l’embryogénie; c’est aussi en étudiant cette science nouvelle, à la lumière des vérités fécondes découvertes par Geoffroy de St-Hilaire, que Henri Lambotte s’attacha avec passion à l’idée de l’unité de composition. Il a dans l’introduc- tion d’un travail qu'il préparait sous ce titre : De la Genèse du règne animal, origine, généalogie et progression des diverses familles d'animaux, raconté lui-même l’évolution de sa pen- sée : « Avant d'étudier les sciences physiologiques, j'avais fait des études assez complètes de chimie et surtout de minéralogie et de géologie. Je reconnus bientôt les lacunes considérables qui resteraient dans mon éducation géologique si je n'étais initié aux connaissances anatomiques et zoologiques, parce que en effet les notions que je possédais sur les corps organisés fossiles n'étaient que bien incomplètes. Or, la succession des êtres organisés dans les formations géologiques m'avait bien vivement attaché et j'étais résolu à tenter tout ce qui était en mon pouvoir pour éclaircir la poignante ignorance où Je me sentais plongé relativement à l’origine et à la succession de l'animalité sur le globe.
» Habitué à pousser toutes les réflexions scientifiques jusque dans leur extrême limite par un exercice constant, j'étais instinctivement porté à refuser toute proposition qui ne pût être rattachée logiquement à des lois générales d'ordre et d'harmonie. Je quittai le marteau et la boussole et je saisis le scalpel et le microscope. J’eus le bonheur de trouver un professeur bien distingué, c'était Fohmann.
» J'étudiai l'anatomie descriptive, et cette géographie du corps humain me parut si peu propre à développer l’intelli- gence que j'étais sur le point de douter qu’en procédant par une telle étude on pût arriver à des idées philosophiques larges. Mais bientôt j'étudiai l’organogénie. Oh! dés le début, je fus saisi d’un espoir inouï en entendant cette proposition : l’homme avant d'arriver à la forme qui le caractérise, passe par une série de formes transitoires, lesquelles sont toutes les
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formes définitives de divers animaux. Cette idée exprimée avec beaucoup de naïveté, par Fohmann, me frappa vivement; elle s’attacha à moi d’une manière si obstinée, que dès ce moment une nouvelle faculté s'était éveillée en moi. Je prendrais volon- tiers, pour rendre ma pensée, ce que Cuvier disait en parlant de l'instinct des animaux, que cette idée me poursuivait tou- jours comme un rêve ou une vision et me fit agir longtemps comme une sorte de somnambule ; je puis dire que cette idée et ses conséquences nécessaires ont influencé toutes mes pen- sées et toutes mes recherches depuis lors. »
Dans ce morceau éloquent et enthousiaste, ce n’est plus seu- lement l’homme de science qui nous raconte comment il passa de l'étude de la nature inorganique à celle des êtres organisés, c’est bien le philosophe prenant possession de lui-même qui parle, et nous expose comment il chercha successivement dans l'étude des fossiles, dans l'anatomie comparée, et enfin dans l’'embryogénie, à la fois les lois d’apparition et d'évolution des êtres organisés sur le globe et les méthodes naturelles de les classer. Car à ce point du développement de la science, la gé- néalogie des êtres se confond avec leur classification naturelle. Aussi dans un Z'ableau généalogique des animaux, essai dont l’idée appartenait d’ailleurs à l’école de Geoffroy de St-Hilaire qui l’avait déjà mise en œuvre, essaya-t-il bientôt après d’indi- quer l’ordre de succession et de déviation des animaux. Ce tableau se retrouve dans ses manuscrits. Il serait fort intéres- sant de rechercher à quel point il est original; les matériaux m'ont manqué pour faire cet examen comparatif.
Mais c’est sous la forme du principe de fixité des connexions que l'unité de composition inspira les travaux imprimés d'Henri Lambotte, et ceux qui doivent le plus intéresser la Société ma- lacologique. Pour ramener en effet les mollusques au même type organique que les vertébrés, veut-il faire autre chose qu’essayer d'établir la fixité des rapports des organes et de leurs parties dans ces deux embranchements, systématisant ainsi l’ensemble des analogies que l’on a constatées avant et
XX SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
depuis Meyraud et Geoffroy de St-Hilaire. Quant aux diffé- rences plus ou moins profondes, il se proposait bien évidem- ment de les expliquer soit par la loi du balancement des or- ganes, soit par celle de la survivance des organes rudimen- taires.
Ce que je viens de dire s'applique au travail de Henri Lam- botte sur les articulés. De même on a déjà compris que ses recherches sur la glande thyroïde lui sont inspirées par les mé- thodes de Geoffroy de St-Hilaire, et que cette épave sans fonc- tion des organes branchiaux, ne subsiste chez les vertébrés supérieurs, qu’à raison de la permanence d’un plan général, et pour s’y conformer.
Ce n’est pas tout : la Vouvelle théorie de chimie organique dans laquelle Henri Lambotte révèle une véritable originalité, n’est elle-même à mes yeux qu'un rayonnement du principe de l'unité de composition. Au-dessus même de l’unité de composi- tion organique des êtres, il cherche à établir l'unité de compo- sition chimique des éléments, des principes immédiats de ces êtres, et des corps inorganiques; et cette théorie constituant un type chimique unique, doit, dans sa pensée, servir d’'intro- duction à ses travaux sur les êtres organisés ; c’est un pont qu'il jette entre la nature inorganique et la nature organisée. Est-il possible de méconnaître ici la hauteur de pensée de ce philosophe de vingt-quatre ans qui a conçu déjà le plan d’un édifice aussi grandiose ? Certes, en se rattachant à la théorie dualistique de Berzelius, il s’est trompé ; cette théorie léloignait de la nature elle-même, et l’on se prend à regretter qu'il n’ait pas mieux saisi la théorie récente alors des substitutions, qui devait nous apporter des lumières nouvelles et des vues peut- être aussi générales et plus rapprochées de la nature sur la composition intime des corps. Mais ce qu'il suffit de consi- dérer ici c’est la portée philosophique même de l’œuvre d'Henri Lambotte. |
S'élevant à des idées de plus en plus générales, ou plutôt généralisant de plus en plus l’idée mère qui le guidait, et
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s’enivrant même de cette idée, il avait conçu le projet d’une philosophie scientifique sous le titre : ZZistoire générale de la nature réunie en corps de doctrine. L'unité de composition sous des formes plus abstraites y eût joué sans doute le principal rôle. |
Il y travailla en 1842, quelques chapitres seulement en sont rédigés. Ils traitent de la matière et de la force. Il y reconnaït que la force et la matière sont inséparables, que la force émane de la matière et agit sur elle. Il admet l'unité de la matière avec l'identité des atomes qui la constituent; il admet l'unité de la force surtout à un point de vue abstrait et par cette con- sidération que tous les phénomènes de mouvement se réduisant à un rapprochement ou à un éloignement des atomes, toutes les forces peuvent être ramenées à l'unité. Il essaie enfin de tracer la série des combinaisons de la matière et des forces particulières correspondant à chaque groupement; il admet que de chaque groupement se dégage une force de surcroft qui agit sur les composés environnants, soit pour se les associer, soit pour les détruire ou les modifier.
Là s'arrête ce travail ébauché, inachevé, comme presque tous les autres. Ainsi tout indique bien dans l'existence intel- lectuelle d'Henri Lambotte un brusque et fatal arrêt de déve- loppement pour me servir ici du terme de Geoffroy de St- Hilaire lui-même qui prend sous ma plume une expression bien pénible.
Chargé de vous exposer son œuvre, je n’al pu que vous promener pour ainsi dire au milieu de matériaux épars, les interrogeant les uns après les autres pour découvrir le plan, pour pénétrer l’idée de ce pauvre architecte endormi mainte- nant dans la poussière des morts. Cette idée s’est enfin ré- veillée à notre appel, et vous lui aurez certainement reconnu de la grandeur et de la force, cette idée éclose du génie de Geoffroy de St-Hilaire, Henri Lambotte l'avait avidement re- cueillie ; sans des misères imméritées, nul doute que cette na- ture vive, originale et infatigable ne l’eût fécondée; nos so-
XXij SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
ciétés modernes ne sauront jamais ce qu’elles étouffent ou détournent d’âmes délicates, élevées, puissantes, pleines de promesses pour l'humanité.
ŒUVRES DE HENRI LAMBOTTE,
TRAVAUX PUBLIÉS.
Note sur une roche feldspatique découverte à Grand Manil, près de
Gembloux. — Bruxelles, 1836, in-8°. (Bulletin de l’Académie royale des Sciences de Belgique. Tome III.)
Note sur le Théridion Malmignatte.—Bruxelles, 1837, in-8°, planch. (Bulletin de l’Académie royale des Sciences de Belgique. Tome IV.)
Observations anatomiques et physiologiques sur les appareils san- guins et respiratoires des Batraciens Anoures. — Bruxelles, 1837, in-4°, planches.
(Mémoires couronnés de l’Académie royale des Sciences de Belgique. Tome XIII.)
Note sur le rapprochement qui existe entre la disposition du système cérébral des animaux vertébrés et celle du ganglion susæso- phagien des animaux articulés. — Bruxelles, 1839, in-8°.
(Bulletin de l’Académie royale des Sciences de Belgique. Tome V1.)
Sur les globules du sang. — Bruxelles, 1839, in-8°. (Bulletin de l’Académie royale des Sciences de Belgique. Tome VI.)
Nouvelle théorie de chimie organique basée sur les lois de la com- position binaire. — Bruxelles, 1840, in-8.
Recherches sur l’organisation des membranes séreuses.— Bruxelles, 1840, in-8°, planches.
(Bulletin de l’Académie royale des Sciences de Belgique. Tome VII.) Sur un système de canalicules dans les plantes. — Paris, 1841, in-4°. (Comptes rendus de l’Académie des Sciences de Paris, Journal l’Institut.)
Traité de minéralogie pratique. — Namur, 1842, in-12. Sur des roches d’origine ignée intercalées dans le calcaire de tran- sition de la Belgique. — Bruxelles, 4843, in-8°, planche. ï (Bulletin de l’Académie royale des Sciences de Belgique. Tome X..) Établissements de produits chimiques. — Bruxelles, 1855, in-19. Considérations sur le corps thyroïde dans la série des animaux vertébrés. — Bruxelles, 1870, in-8°. (Annales de la Société royale des Sciences médicales et naturelles de Bruxelles.)
NOTICE BIOGRAPHIQUE. xxiij
TRAVAUX INÉDITS. Chimie, Minéralogie, Métallurgie, etc.
Leçons de chimie.
Chimie générale.
Chimie analytique.
Chimie organique.
Notes de chimie organique.
Cours de minéralogie.
Tableaux des minéraux et des systèmes cristallographiques auxquels ils appartiennent. -
Tableau synoptique de formes cristallines.
Caractères des types cristallins et passage de ces types aux diverses formes dérivées.
Méthode dichotomique appliquée à la détermination des minéraux.
Distribution technique des principales pierres précieuses avec leurs caractères distinctifs.
Usages immédiats des minéraux et des roches.
Cours de minérallurgie.
Métallurgie du fer.
Géologie et Paléontologie.
Conférences géologiques.
Observations géologiques sur les terrains primordiaux de la Bel- gique.
Etudes sur les terrains primordiaux de la Belgique ; observations faites de 1832 à 1842.
Direction des couches dans divers points des terrains primordiaux de la Belgique.
Des rapports qui existent entre la nature géologique du sol et des végétaux qui y croissent.
Botanique.
Cours de botanique. De l’action de la chaux sur la végétation. La Bryone envisagée sous le rapport agricole et industriel.
XXIV SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
Zoologie, Anatomie et Physiologie comparées, ete,
Méthode dichotomique appliquée au règne animal.
Anatomie générale.
Anatomie comparée.
Recherches anatomiques et physiologiques sur les animaux.
Le système nerveux des Mollusques comparé à celui des Articulés et à celui des Vertébrés.
Sur quelques conditions matérielles des sensations.
Observations sur le sang,
Recherches anatomiques et physiologiques sur la structure du tissu musculaire, la cause de la contractilité organique, etc.
Des phénomènes essentiels de la nutrition dans les tissus musculaires.
Histoire anatomique et physiologique des membranes séreuses.
De l’organisation des membranes séreuses.
Matériaux généraux sur la partie physiologique des membranes séreuses.
Philosophie naturelle.
Histoire générale de la nature réunie en corps de doctrine.
Essai de philosophie de l'Histoire naturelle.
Cours de sciences naturelles ou d’observation.
Principes généraux des sciences naturelles.
Des causes dans la nature ou philosophie de l'Histoire naturelle.
Études d'histoire naturelle.
De la genèse du règne animal; origine, généalogie et progression des diverses familles d'animaux.
Tableau généalogique des animaux.
Sciences sociales.
Dieu, la nature et le monde.
Principes sur l’éducation.
Discours sur l'inégalité parmi les hommes. Henri Lambotte à ses frères.
MÉMOIRES
DE LA
DUIRTE MALACOLOIOUE
DE
BELGIQUE
TOME VIII
Annee 1878.
BRUXELLES IMPRIMERIE ET LITHOGRAPHIE DE Ve NYS
57, RUE POTAGÈRE, 57
FALL
MATERIAUX
POUR SERVIR A
LA FAUNE LAEKENIENNE
DES
ENVIRONS DE BRUXELLES PAR
GG. VINCEN "EI. — SÉANCE DU 5 JANVIER 18753. —
Notre système laekenien est constitué, comme on le sait, de deux étages, et chacun de ceux-ci possède une faune notable- ment distincte de celle de l’autre. Presque toutes les listes de fos- siles de ce système, publiées jusqu’aujourd’hui, ne nous ont fait connaître que sa faune générale ; de sorte qu’il n’a pas encore été possible d'établir les différences de faune existant entre les deux étages ni entre les zones de chacun d’eux. Ces listes ne permettent pas davantage de faire connaître les fossiles pro- pres aux différentes zones, ni de déterminer l’époque précise de l’apparition et de la disparition des espèces.
Sous ce rapport, nous croyons qu'il reste quelque chose à faire et que la science, pour progresser, doit avoir non-seule- ment la liste des fossiles des deux étages, mais encore celle des fossiles de chacune de leurs subdivisions, de leurs zones. Or, l’existence de l’assise laekenienne a été constatée dans dif- férentes localités de notre pays, mais on a négligé de détermi-
8 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
ner les zones de cette assise qui s’observent dans chacune de ces localités. Quant à nous, qui trouvons de la plus haute impor- tance de faire cette distinction pour établir le parallélisme des couches, tant de notre pays que des pays voisins, et qui nous appliquons à distinguer les zones au moyen de leurs faunes, nous ne pouvons trop, dans l'intérêt de la science, engager les naturalistes à toujours déterminer avec la plus grande exacti- tude le gisement, la zone des différents fossiles qu'ils recueille- ront. Nous nous inspirons depuis longtemps de cette idée en faisant nos recherches, et les résultats que nous avons obtenus de ce côté, seraient sans doute plus importants si nos moments de loisir'étaient moins rares. ,
On a pu remarquer que cette méthode a été adoptée pour la formation des listes qui se trouvent dans la notice publiée par M. Th. Lefèvre et moi sur le plateau de Laeken, Jette et Wem- mel, ainsi que dans ma publication sur les faunes bruxellienne et laekenienne de Dieghem. (1)
Dans les environs de Bruxelles, l'étage inférieur du système laekenien se rencontre dans un état de développement assez puissant. Nous poursuivons depuis longtemps, dans ses diffé- rentes zones, de patientes recherches et notamment dans celle caractérisée par les Vummulites variwolaria, Ditrupa stranqu- lata et Orbitolites complanata. Cette zone a été fortement dénu- dée et les parties échappées aux ravages diluviens que l’on voit souvent à découvert dans les tranchées pratiquées dans nos environs, sont toutes fortement excavées. Disons aussi que la mer qui forma notre couche, a dû être fort agitée : c’est du moins ce que nous démontrent beaucoup d’entre ses fossiles tels que les dents de Squales, les Terebratula Kickxi et bien d’autres encore qui sont tous généralement fort usés. Elle est surmontée d’un dépôt de sable jaune verdâtre, dans lequel on n’a pu constater jusqu'aujourd'hui un seul fossile qui lui soit propre. Parfois c’est la zone inférieure de l'étage laekenien
(1) Annales de la Soc. Malac. de Belg. Tome VII, 1872.
MÉMOIRES. 9
supérieur qui la couvre et parfois c’est le limon hesbayen. Elle repose sur un lit de gravier contenant à profusion des Nummu- lites lævigata et scabra, etc., roulées.
Notre zone est formée d’un sable généralement calcareux et présente presque toujours deux à trois lits de grès, qui sont tantôt durs et se séparent en feuillets lorsqu'on les frappe à coups de marteau, et tantôt ne sont que des concrétions sableu- ses qui se désagrégent facilement exposées aux intempéries de l'air.
La faune que l'on trouve dans les sables diffère beaucoup de celle que l’on observe dans les grès. Outre ses fossiles caracté- ristiques mentionnés précédemment, on y rencontre très-com- munément les Pecten plebeius et multistriatus, la Terebratula Æickær, V'Idmonea coronopus, la Seutellina rotunda, la Lenita patelloïdea, les Nummnulites levigata et scabra, etc.
Dans les grès et principalement dans le banc qui se présente vers la base de la zone, le faune a une plus grande analogie avec les zones de l'étage laekenien supérieur de Wemmel, Jette et Laeken. Les fossiles les plus communs que nous avons observés dans ceux-ci sont le Solecurtus Deshayesi, la Tellina plagia, le Cardium asperulum, le Cardium Edmwardsi, la Car- dita elegans, l'Orbitolites complanata, ete. Nous y avons égale- ment trouvé de grands amas de 7'urritella brevis presque ana- logues à ceux qui s’observent à Wemmel, ainsi que des frag- ments de plantes. De plus, sauf les fossiles caractéristiques mentionnés précédemment, les Terebratula Kickxi et les Crenaster poritoïdes qui sont communs partout, la faune de cette zone varie beaucoup de localité à localité. Ainsi, à Dieghem, ce sont les Échinides tels que la S'eutella rotunda et la Zenita patelloïdea que lon rencontre en grande quantité ; à Steenockerzeel, le Pecten duplicatus, qui est très-rare dans toute autre localité; à Woluwe-St-Lambert, la Z'urritella bre- vis; à l'Avenue Louise, le Z'ubulipora Grignonensis ; à Saint- . Gilles, les Échinides tels que l’Æchinolampas Galeottianus et le S'patanqus acuminalus, etc.
10 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
Dans plusieurs localités, telles que Forest et Dieghem, notre zone offre aussi parfois vers sa superficie et en petits lits, des agglomérations de coquilles réunies ensemble par un ciment calcaire. Les fossiles qui constituent principalement ces forma- tions singulières, sont des Vummulites variolaria, des Ditrupa stranqgulata, des Turritella brevis, des Nucula lunulata, des Lunulites wrceolata.
Pour terminer notre note, nous faisons connaître quelques unes de nos observations relatives à divers Foraminifères qui nous sont d’un secours fort grand pour la distinction de plu- sieurs de nos zones : ainsi, nous pouvons dire que les Vummu- lites scabra et levigata, qui se montrent dans notre pays à partir de la zone bruxellienne d’Aeltre, s’observent pour la der- nière fois, dans nos environs, dans la zone qui nous occupe ; que la Vummaulites Heberti et l'Operculina Orbignyi y appa- raissent et que l’Orbitolites complanata lui est propre.
Le nombre des fossiles recueillis par nous, jusqu’à ce jour, dans cette zone, étant devenu assez considérable, nous avons pensé que leur liste pourrait offrir quelque intérêt à la science. Cette liste est cependant loin d’être définitive; nous nous pro- posons de la compléter plus tard.
Nous n’avons pas cru inutile d'indiquer dans notre tableau et dans des colonnes séparées, les différentes zones de l'étage : bruxellien et les zones des étages laekeniens inférieur et supé- rieur dans lesquelles les mêmes fossiles ont été observés.
LISTE
DES FOSSILES TROUVÉS AUX ENVIRONS DE BRUXELLES DANS LA ZONE LAEKENIENNE
A NUMMULITES VARIOLARIA, DITRUPA STRANGULATA ET ORBITOLITES COMPLANATA, AVEC L’INDICATION DES DIVERSES ZONES DES SYSTÈMES BRUXELLIEN
ET LAEKENIEN DANS LESQUELLES CES MÊMES FOSSILES ONT ÉTÉ OBSERVÉS (1),
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(4) Le degré d’abondance ou de rareté des fossiles est indiqué par les lettres €, cc, r, 17 qui signifient respectivement : commun, très-commun, rare, très-rare.
12 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE,
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Zone des sables a grès Zone des sables cal- roulées. Zoneinférieureà Nummulites Heberti. Zone supérieure à Nummulites Heberti et Cyprina Roffiaeni.
Tellina plagia, Edw. . . . .. Rev DURE | cevl'ceE Cytherea suberycinoïdes, Desh. . | r | ee |cclrrlrr |rr Cytherea Iævigata, Lamk. AN LE C SN. AE - : Cardium porulosum, Brand. SNS CAE CC PL MATE NMTOEr Cardinm 'Edwardsi; Desh: 9%... r ; cerNec Cardium Honi, Nyst SR TN EU Sen UTTE : : r T Cardium asperulum, Lamk. . . . .. | € ; 5 r r Ducina itS SON. LL SN AINrE rr : : 19 : POI Re ! DEN Corbis lamellosa, Lamk. LIN RAAUUTE } LR DA LE Cardita elegans, Lamk. a re C C cer Mec Crassatella” Nystana, FO LR rr rr CC: lce Pectunculus pulvinatus, Lamk. . .. T'AACe r £ CCC
Nucularfragilis ? Desh: mire r Nueulainnulata NYSE OEM RER Se Leda Galeottiana, Nyst. . . . .. Hanie Pholadomya virgulosa, Sow. . . . . . | rr Lithophagus D PAseter Deshsenss L Lima obliqua, Lamk. ah ei RCE r Pecten corneus, EN AL NS COR Pécten nitiduins VINCs LE us UC NIETr Pecten solea, Desh. . . . .. SR - Pecten duplicatus, Sow. .-. . . . . . | ce
Luna mutabilis Lamine ER à Ë ê Lucina pulchella, RER ANA EST TRES FA | CE ce ce ; À
Pecten. plebeus "Eamky 0 7 2e À CHINOIS : Pecten multistriatus, Desh. . . . . . | cc | rr . c . : PeclentHonieNyst 5. "1". san C rt |:ce Pecten sublævigatus, NYSE. SE SNeen ? î Ra lUET : Spondylus radula, Lamk. . . . . .. ( ; C |. € 2 . Spondylus rarispinus, Déshi LU C : Fu /c é : DsirealcamosaDesh.;...1.", Li : SÉNEC ! at CC :
Ostreaevmhula,ULamki: 52%, 2,0 CCE tel CC | Ostreatapelula Lamk. 3 10 L CAinec
OstreasryphimasDesh;.: 1: ,....12ec À ; Ostrea uncinata, Lamk. . : . . . HICUTÉ è ;
14 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
ASSISE ASSISE
bruxellienne.|| lJaekenienne.
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ESPECES. ÉRMEFR IE 2ù |£RS Sésslesslie |£s |Ss
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* SE AS|SSSISSe = Se Vulsella deperdita, Lamk. . ..... ce : L "ON RE 3 Anomia sublævigata, d'Orb. . .... CC r ë CAE |
BRACHIOPODES. Terebratula Kickxi, Nyst. . . .. . .. cc ë . Ice : 2 Terebratula bisinuata, Lamk. . . .. rr : k AU Terebratulina Putoni, Desh. . . . .. rr : s ; : ; Craniatyariapiis; (Gal 0 re C : , C à : BRYOZOAIRES. | Lunulites radiata, Lamk. . . . . ... C à À ; à À Lunulites urceolata, Lamk:# 5.2.7, CC d k À rl CC Cellepora petiolus, Dix. . . . . . .. ir 3 : ANICCAMEC Chrysisina coronopus, Def. . . . .. cc L te ; . Hornera hypolythus, Def. . . .... cc 3 Ù C : L Eschara damæcornis ? Mich. . . . .. C à Ë C k Escharatexcayata Miche c : : c : $ Pyripora contexta, Gold, . . . .... C r cale rennes Tubulipora Grignonensis, Lamk. . . | cc ; ; ! 5 Tubulipora stelliformis, Mich. . . . . C L t TARN ; ANNELIDES. Ditrupa strangulata, Desh. . . . . .. cc : AC
Serpula tricarinata, Gal. . . . . . .. cc : MAN COCA AEMINRE Serpula Mellevillei, Nyst et Leh. . . . | ç : AS AMANECNPIGC
ÉCHINODERMES. Crenaster poritoïdes, Desm. . . . .. ce k RAGE M . Spatangus Omaliusi, Gal. . . .. .. C C - G'l'ce race
Echinolampas Galeottianus, Forb. . . | ce ; nec
MÉMOIRES. 45
ASSISE ASSISE bruxellienne.|| Jlaekenienne.
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Echinolampas Dekini, Gal. . .... r
Nucleolites approximatus, Gal. . .. | rr
Echinocyamus propinquus, Gal. . . . C : ; k
Scutellinatrotundas Galettes Tec ; : c
Lenita -patelloïdes, Gal. . « . . .: cc : ë C
Hemiaster acuminatus, Goïd. . . . . cc
Cyphosoma tertiarum ? Leh. . . . .. rr ; S ï
Cidaris Species ? (aiguillons). . . . . | CC 1 prlltec
ANTHOZOAIRES.
Turbinolia Nystana, Edw. et Haim. . | CC C S CC Tec
Turbinolia elliptica, Brug. . . . . .. Tr À
Sphenotrochus crispus, Lamk. . . . . Il Ce
FORAMINIFERES.
Nummulites variolaria, Lamk. . . .. ce ; £ CA D ;
Nummulites Heberti, d'Arch. . . . .: C { t .leclcc
Nummulites lævigata, Lamk. . . . . . | ce . : TES
Nummulites scabra, Lamk. . . . . .. cc | rr suee
Orbitolites complanata, Lamk, . . . . | ec
Operculina Orbignyi, Gal. . . .. ô r cc | cc
Fatuola Species? +. 4% à. à se cc
VEGETAUX.
Caulinites Parisiensis, A. Brong.(1). . | ce
(4) Nous devons à l’obligeance de M. Crépin, conservateur au Musée royal d’histoire naturelle, la détermination de cette plante.
FAUNE PANISELIENNE.
DESCRIPTION
DE
DEUX GOQUILLES FOSSILES DU TERRAIN EOCÈNE DE BELGIQUE (LEDA CORNETI ET ARCA BRIARTI),
par El. NYST.
(Plauche 1, fig. 1-2)
— SÉANCE DU 4 MAI 1873. —
Lena Corneri Nyst. (Planche I, fig. 1 a, b, c.)
Leda Corneti Nyst, 1873, apud Mourlon, Géologie de la Bel- gique, p. 161. (Extrait de la Patria Belgica).
Assise Paniselienne.
Localités : Morlanwelz (M. Cornet), Trazegnies et Bascoup (M. Briart).
Description : Coquille ovale, transverse, solide, à peu près équilatérale et offrant le port de la Z. Deshaycsiana, équivalve, bombée, légèrement corbuliforme, à côtés presque également obtus, le postérieur étant à peine rostré. Crochets proéminents et inclinés, partageant la coquille en deux parties égales. Surface extérieure couverte de stries transverses assez profon- dément empreintes et assez régulières. Bord cardinal étroit, formant un angle très ouvert. Charnière présentant de chaque côté 11 à 12 dents. Fossette ligamentaire très petite. Bords internes de la coquille entiers. Longueur 15 millimètres, lar- geur 10 millimètres.
Nous avons dédié cette charmante espèce à notre ami M. Cornet, ingénieur des mines, à Cuesmes, près de Mons,
MÉMOIRES. 17
qui appela le premier l'attention des géologues sur les couches qui la renferment, et qui a eu l'extrême obligeance de nous la communiquer en nous permettant de la décrire.
Nous tenons aussi des exemplaires provenant de Trazegnies et de Bascoup, qui nous ont été communiqués par notre ami M. Briart, ingénieur des mines à Mariemont.
ArCA BrrarTi Nyst.
(Planche I, fig. 2 a. b.)
Arca Briarti Nyst, 1873, apud Mourlon, Géol. de la Belq., p. 161 (Extrait de la Patria Belgica.)
Assise Paniselienne. Localité : Bascoup, province du Hainaut (M. Briart.)
Description : Cette espèce, qui appartient à la section des Cucullaires, est oblongue, subquadrangulaire, très-convexe, cordiforme, inéquilatérale, obtuse antérieurement et légère- ment tronquée postérieurement. Le bord dorsal est parallèle au bord ventral. Les crochets sont proéminents, contournés et obliques; du côté postérieur il s’en détache un angle obtus qui descend obliquement jusqu’à l’angle inférieur. Toute la sur- face extérieure de la coquille est couverte de stries longitudi- nales extrêmement fines qui sont rendues granuleuses par le passage de stries transverses. Sa charnière, dont nous ne pou- vons malheureusement apercevoir qu’une très-faible partie, pré- sente à sa partie postérieure deux dents étroites, allongées et horizontales. Cette espèce a 14 millimètres de long sur 14 de large.
Nous l’avons dédiée à notre ami et confrère M. Briart, ingé- nieur des mines à Mariemont, qui en fit le premier la décou- verte et qui a bien voulu nous la communiquer pour la décrire.
Observation : Les dépôts qui ont fourni ces deux intéres- 3
18 SOCIÈTE MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
santes espèces nouvelles, sont rangés par Dumont dans son Système Paniselien et M. Mourlon les considère comme repré- sentant ce que l’on pourrait appeler le « Pamiselien oriental », c’est-à-dire une zone paniselienne distincte de celle du Mont Panisel et quelque peu plus ancienne que celle-ci.
FAUNE LAEKENIENNE.
DESCRIPTION
D'UNE COQUILLE FOSSILE DU TERRAIN ÉOCÈNE DE BELGIQUE . (CYPRINA ROFFIAENI),
par H. NYST. (Planche I, fig. 3.)
— SÉANCE DU 4 MAI 1873. —
CYPRINA RoFFIAENI Lefèvre.
(Planche I, fig. 3 a. b. c.)
Cyprina ÆRoffiaen: Lefèvre. Annales de la Soc. Malac. de Belg. Tome VII, 1872, p. 66.
Assise Laekenienne.
Localité : Wemmel, près de Laeken (collections de MM. Lefèvre et Vincent).
Description : Coquille suborbiculaire, épaisse, subéquilaté- rale, couverte de stries transverses d’accroissement, inégales et irrégulières, qui tendent à disparaître vers le côté posté- rieur à la naissance de l'angle que l’on y aperçoit. Le côté antérieur est un peu prolongé, tandis que le côté postérieur est arrondi. Du sommet des crochets, sur le côté postérieur de la coquille, l’on aperçoit un angle peu prononcé qui vient aboutir au bord inférieur. La charnière est médiocre et munie d’une petite fossette striée dessous les crochets et d’une dent cardinale bifide ainsi que d’une dent latérale assez large. Ses bords sont
20 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
lisses comme dans toutes les espèces de ce genre, et les im- pressions musculaires et paléales sont fort peu prononcées. Cette coquille mesure 68 millimètres de long sur 76 de large.
La Cyprine que nous décrivons ici est très-distincte des C!. scutellaria et C. lunulata des terrains tertiaires du Bassin de Paris ; elle se rapproche de la ©. planata J.Sow. (Min. Conch. pl. 619), dont elle diffère cependant par sa forme moins con- vexe et par l’angle postérieur de la coquille qui est beaucoup moins prononcé dans l'espèce belge.
EXPLICATION DE LA PLANCHE I.
Figure 1. a. Leda Corneti Nyst. — Valve droite, grossie, vue à l'intérieur. b. Idem. — La même, grandeur naturelle. c. Idem. — La même, vue par dessus.
» 2. a. Arca Briarti Nyst.— Valve droite, de grandeur naturelle. b. Idem. — Profil des deux valves.
» 5. a. Cyprina Roffiaeni Letèvre.— Valve droite, adulte, vue en dessus. b. Idem. — Valve gauche, jeune âge, vue en dedans. c. Idem. — Valve droite, vue en dedans (le pointillé indique les
parties manquant à l'échantillon ayant servi de modèle),
COMPTE-RENDU DE L’EXCURSION
FAITE AUX ENVIRONS DE CIPLY
LA SOCIÈTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE
LE 20 AVRIL 1873,
par MM. F. L. CORNET et A. BRIART (|).
— SÉANCE DU 3 AOÛT 1873. —
Le but principal de l’excursion était l'étude des assises supé- rieures du terrain crétacé ; cependant les excursionistes ont eu l’occasion d’étudier quelques couches tertiaires et d'explorer un gisement de coquilles dans le limon inférieur du terrain qua- ternaire.
Partis de Bruxelles à 8 heures du matin, les membres de la Société descendaient à 9 heures et demie dans la station de Mons et se rendaient pédestrement à Ciply en suivant la route de Maubeuge qui, presqu’au sortir de la ville, s'élève par une pente douce sur la colline connue sous le nom d’Zribus.
Cette colline est constituée par les systèmes Yyresien et Lan- denien du terrain tertiaire. Des sables verdätres à grains fins en occupent la partie supérieure. Ils correspondent à ceux sur lesquels la ville de Mons est bâtie et qui renferment un banc remarquable formé par l’aggelutination de nombreuses Vummu-
(1) Ont pris part à cette excursion : MM. Colbeau, Roffiaen, Pur- ves, Vanden Broeck, Thielens, De Borre, Fromont, Cousin, Weyers, Mourlon, Davreux, De Bullemont, Briart, Cornet, membres de la Société Malacologique. M. Bonaert, membre de la Société Entomo- logique de Belgique et MM. G. Arnould, E. De Jaer, Mativa et Hubert, ingénieurs au corps des mines à Mons, s'étaient joints aux membres de la Société, ainsi que MM. E. Colbeau et H. Rofhaen, étudiants, à Bruxelles.
99 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
lites planulata. En dessous de ces sables une argile bleuâtre, représentant l'argile d’Ypres, se montre à la partie inférieure de l’Eribus où elle repose sur du sable gris-verdâtre apparte- nant au système Zandenien. La superposition fut observée par les excursionistes dans une vaste excavation pratiquée pour l'exploitation du sable et de l'argile, le long de la route de Maubeuge, à peu de distance au N. O. dela station d'Hyon-Ciply. Jusqu’à ce jour on n’a rencontré aucune coquille fossile ni dans l'argile ypresienne, ni*dans le sable landenien qu’elle recouvre.
De l’Eribus on aperçoit, à 2? kilomètres au N. E., les deux collines connues sous les noms de Mont du bois de Mons et de Mont Panisel. Elles sont constituées dans leurs parties moyenne et inférieure, par les sables et l'argile du système ypresien, au-dessus desquels se trouve une assise assez puissante de sables glauconifères avec grès lustrés que Dumont a prise pour type de son système Paniselien. Elle renferme, avec quelques fruits de Vipadites, une faune malacologique qui présente beaucoup de rapports avec celle de la partie inférieure du Calcaire grossier de Paris. Quelques espèces paniseliennes se rencontrent aussi dans les Sables du Soissonnais.
Au sud de la station d’'Hyon-Ciply, la Société a suivi la route de Mons vers Bavay, et, à 700 mètres du chemin de fer elle a visité une ancienne carrière aujourd’hui abandonnée, dans laquelle on observe, sous un dépôt caïllouteux quaternaire, une épaisseur de 2,50 à 3",00 de sable argileux très-glauco- nifère, qui forme la partie inférieure du système landenien. Elle correspond au 7'ufeau de Lincent que la Société Malacolo- gique a étudié aux environs d’Orp-le-Grand et de Landen, lors de son excursion du 3 septembre 1871. (Voir tome VI, pages 39 et suivantes.)
Les fossiles sont très-rares dans la partie inférieure du sys- tème landenien aux environs de Ciply. On n’y a guère rencon- tré que quelques exemplaires de Pholadomya Koninchi, Nyst; mais ce fossile abonde dans le prolongement de l’assise vers
MÉMOIRES. 93
l’ouest, à Jemappes, Quaregnon et principalement à Angres, où il est associé à un grand nombre d’autres espèces.
Tandis qu’au N. E. de la ville de Mons, le sable glauconi- fère landenien est séparé du terrain crétacé par un système ter- tiaire de grande puissance auquel on a donné le nom de Cal- caire grossier de Mons, il repose à Ciply sur les couches créta- cées les plus récentes de notre pays, sur celles connues sous le nom de 7'ufeau de Ciply. La grande lacune géologique exis- tant entre les terrains crétacé et tertiaire et qui est partieile- ment comblée. au N. E. de Mons, existe donc tout entière à Ciply, comme d’ailleurs dans la plupart des localités de notre pays où le terrain tertiaire repose sur les couches supérieures crétacées.
Le tufeau de Ciply est une craie grossière, ordinairement friable, blanchâtre, stratifiée en bancs réguliers assez épais, et renfermant de rares rognons de silex gris. Cette assise fut exploitée dans plusieurs carrières aux environs de Ciply, lors de la construction des fortifications de Mons. On y a rencontré d’assez nombreux fossiles qui l’ont fait identifier, par tous les géologues, avec le 7'ufeau de Maestricht. Aujourd'hui les exploitations sont abandonnées; aussi est-il très-difficile de se procurer quelques fossiles du tufeau de Ciply, excepté les Fora- winifères et les Bryozoaires qui abondent dans certains bancs mis à découvert sur les parois verticales des carrières. Ces bancs ne paraissent pas continus et ne forment pas des hori- zons parfaitement distincts comme à Maestricht.
Le tufeau de Ciply montre, à sa partie inférieure, un con- glomérat remarquable auquel on a donné le nom de Poudinque de la Malogne. I est constitué principalement par des nodules plus ou moins volumineux, arrondis ou irréguliers, d’une sub- stance brune, trés-dure, renfermant une proportion de phos- phate de chaux qui dépasse 60 p. c. dans certains échantil- lons. Ces nodules sont réunis par une pâte de calcaire jaunâ- tre, blanchâtre ou grisâtre, plus ou moins cohérente, souvent tendre et friable.
24 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
Le Poudinque de la Maloque n’est pas visible dans la car- rière dont nous avons parlé plus haut, mais il se montre sur divers points aux environs de Ciply, notamment à l’endroit dit laMaloqne, au sud du village, où il se présente avec une épais- seur de plusieurs mètres et où les nodules phosphatés qu'il renferme donnént lieu en ce moment à une importante exploi- tation. Les travaux qui s’opèrent par tranchées à ciel ouvert, ont été visités par nos excursionistes qui y ont récolté de nombreux fossiles dont la plupart sont d’une conservation parfaite. Cepen- dant tous les gastéropodes, les lamellibranches orthoconques, quelques brachiopodes et quelques oursins sont représentés par des moulages internes en phosphate de chaux.
Le poudingue repose dans les exploitations de Ia Malogne, sur une Craie grise, grossière, très-friable, formée par l’agglo- mération de petits grains bruns de phosphate de chaux et de grains blancs de calcaire. Le point où l’on peutle mieux étudier cette assise connue sous le nom de Craie grise de Ciply, se trouve à l’est du village dans la partie encaissée de l’ancienne chaussée romaine. Cet endroit fut exploré par les membres de la Société, qui ont pu s'assurer de la présence, dans la craie grise, d’un grand nombre d’espèces identiques à celles que l'on rencontre dans le poudingue de la Malogne.
Au nord du chemin creux, la craie grise disparaît sous le tufeau dans lequel on voit de vastes excavations qui ne sont que d'anciennes carrières abandonnées. Les excursionistes se sont avancés dans cette direction et après avoir traversé la route de Mons à Maubeuge, ils ont suivi vers l’est un chemin qui conduit de la ferme de Belian au village de Nouvelles.
À 250 mètres de Belian le chemin de Nouvelles est encaissé entre deux berges escarpées dans lesquelles on observe la coupe suivante prise à partir de la surface du sol :
Limon supérieur (Terre à briques)
» inférieur (Ergeron)
Sable argileux très-glauconifère (Partie inférieure du
système landenien.)
Terrain quaternaire.
MÉMOIRES. 25
Un puits creusé récemment au même point, a démontré l'existence de la craie grise de Ciply immédiatement en des- sous du sable landenien.
Le limon inférieur quaternaire de la coupe dont nous venons de parler, a des caractères minéralogiques identiques à ceux que possède l’ergeron dans la plupart des localités aux envi- rons de Mons ; maïs il renferme de nombreuses coquilles fos- siles appartenant à des espèces qui vivent encore dans les environs. Les membres de la Société se sont procuré plusieurs specimens des trois espèces suivantes :
Succinea oblonga. Helix concinna. Pupa muscorum (1).
La Succinea oblonga est principalement abondante.
A 400 mètres au N.-E. du point où la coupe précédente fut observée, on trouve la tranchée de Mesvin et, à un kilomètre plus loin, la profonde et remarquable tranchée de Spiennes qui traverse les anciens ateliers de fabrication d’ustensiles en silex à l’âge de la pierre polie. Les membres de la Société désiraient visiter ces lieux devenus célèbres par les découvertes que l’on y à faites et où ils auraient eu l’occasion d'étudier les assises de craie blanche auxquelles on a donné les noms d'Assise de Spiennes et d'Assise de Nouvelles, mais le mauvais temps étant survenu on fut forcé d'abandonner ce projet et l’on se dirigea à pied sur la ville de Mons.
è
FAUNE CRÉTACÉE DE CIPLY.
La faune des couches crétacées des environs de Ciply abonde en espèces et en individus. Différentes listes en ont été publiées, mais nous sommes actuellement d’avis qu’elles auraient besoin d’être soigneusement révisées, beaucoup d’espèces qui y sont
(1) Dans les notices lues au Congrès d’anthropologie et d’archéo- logie préhistorique de Bruxelles, les auteurs du présent mémoire ont
par erreur cité le Pupa avena au lieu du Pupa muscorum. 4
Le
26 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
indiquées étant pour nous douteuses. D’autres, citées par les auteurs, sont tellement rares que nous ne les avons pas encore rencontrées malgré nos recherches suivies et les fouilles que nous avons fait opérer. C’est pour ces diverses raisons que nous nous bornerons dans cette note à ne citer que les espèces que nous possédons et dont les déterminations sont certaines.
On rencontre dans les couches de Ciply des restes d'animaux appartenant aux cinq embranchements : Vertébrés, Articulés, Mollusques, Rayonnés et Protozoarres.
I. — VERTÉBRÉS.
Les restes des Vertébrés consistent en dents et en vertèbres de reptiles et de poissons.
RepriLes. — Les débris de reptiles ne se rencontrent guère que dans le poudingue de la Malogne. Ils consistent en ver- tèbres et en dents de Sauriens que nous rapportons au genre Mosasaurus.
Poissons. — Les vertèbres de poissons sont assez rares, mais les dents sont abondantes et appartiennent à plusieurs espèces de Squales. On les rencontre principalement dans le poudingue de la Malogne.
II. — ARTICULÉS.
CRUSTACÉS DÉCAPODES. — Nous avons rencontré des restes assez bien conservés d’un Crabe (Brachyurites rugosus ? Sch].) dans la craie grise durcie au contact du poudingue.
; CRUSTACÉS STOMAPODES. — On rencontre dans le poudingue et dans la craie grise des valves assez rares d’Anatifes ou d'animaux voisins appartenant à plusieurs espèces.
ANNÉLIDES. — On trouve abondamment dans la craie grise et plus rarement dans le poudingue, une coquille que l’on a identifiée avec le Dentalium Mose, Bronn. du tufeau de Maes-
MÉMOIRES. 27
tricht. M. le baron de Ryckholt la fait passer de l’embran- chement des Mollusques dans celui des Articulés et la rapporte, avec le Dentalium Mose, au Ditrupa clava, Lamk. (1).
Nous croyons, comme M. de Ryckholt, que cette coquille que l’on peut considérer comme la plus caractéristique de la craie grise de Ciply, appartient en effet au genre Drfrupa, mais elle nous paraît différer beaucoup du Dentalium Mose de Maestricht.
Avec la coquille précédente on trouve dans la craie grise une espèce beaucoup plus rare à laquelle M. de Ryckholt a donné le nom de Ditrupa Ciplyana (2).
Les Serpula sont nombreuses à Ciply, principalement dans le poudingue où elles sont souvent attachées aux galets ou sur d’autres coquilles. On en distingue plusieurs espèces dont une est rapportée à la S'. gordialis, Schlt.
IT. — MoLLusquEs.
A. — CLASSE DES CÉPHALOPODES.
BELEMNITIDÆ. — La Belemnitella mucronata, d'Orb. est le seul fossile de cette famille que l’on rencontre à Ciply où il abonde dans la craie grise et dans le poudingue. Nous ne
l'avons jamais rencontré dans le tufeau.
NauTILDÆ. — On rencontre, mais assez rarement, des moules intérieurs de grands Vautilus dans la craie grise et dans le poudingue. Ils paraissent appartenir à deux espèces : le W. Zehardyi, V. Bink. et le V. Heberti, V. Bink. (3).
Nous possédons divers mandibules du même genre provenant de la craie grise.
(1) Mélanges paléontologiques, 1° partie, page 122.
(2) Id; id. id: 124.
(3) Van Binckhorst. — Monographie des Gastéropodes et des Céphalopodes de la craie supérieure du Limbourg.
28 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
AMMoNITIDÆ. =— On trouve dans le poudingue de la Malogne des moules internes en phosphate de chaux de cloisons isolées d’'Ammonites.
Le Baculites F'aujasii, Lamk. est assez abondant dans le poudingue et la craie grise. Une espèce que l’on a rapportée au B. anceps, Lamk. paraît beaucoup plus rare. |
Le Æamites cylindraceus, Defr. aurait été trouvé, mais nous n'avons pu, jusqu’à ce jour, en constater la présence dans aucune des couches crétacées de Ciply.
B. — CLASSE DES GASTÉROPODES.
Les Gastéropodes étaient nombreux dans la mer qui a dé- posé les diverses assises crétacées de Ciply, mais les seules preuves de leur existence qu'ils nous ont laissées, ne sont guëre que des moulages internes souvent en phosphate de chaux et des empreintes sur des roches durcies ou sur des coquilles, principalement des huîtres, auxquelles ils servaient de points d'attache. |
La détermination de ces moules et de ces empreintes n’est guère possible que génériquement. Parmi les nombreux spéci- mens que nous possédons nous distinguons :
a. — Du Tufeau.
Fusus (1 espèce) Cerithium (plusieurs espèces dont Turritella . (1 » ) l'une à la taille du C. giganteum Natica CNED du calcaire grossier de Paris).
b. — Du Poudingue de la Malogne.
Turritella (3 espèces) | Pyrula (1 espèce) Turbo @ 2:54 Cerithium (1270) Trochus (6 Mean Buccinum DE) Phorus CE Dr Acteon LT TELE Natica Ge) Cinulia Hocdet) Solarium (2 » ) Pleurotomaria (4 » ) Rissoa (1 » …) Bulla (A) LOL) Fusus [6 La Maires
Les deux seules espèces que nous possédons avec leur test sont: Scalaria Duchasteli, Nyst et un Péerocera nov. sp.
MÉMOIRES. 29
c. — De la Craie grise.
Natica (1 espèce) Acteon (1 espèce) TUr00 QU TN.) } GET NON ( AE QE) P
M. de Ryckholt a décrit et figuré quatre gastéropodes du terrain crétacé supérieur de Ciply (1), mais ce savant paléon- tologue n'indique pas dans quelle assise il a rencontré ces espèces, qui sont :
Capulus Rhynchoides, de Ryck. Helciôn Cyplianus, de Ryck. Emarginula cretacea, » Infundibulum Ciplyanum, »
M. Van Binckhorst a décrit sous le nom de Cerithium maximum (2)
une espèce de Ciply dont le moule et la contre empreinte lui ont été communiqués par M. Toilliez qui les avait rencontrés, pensons-nous, dans la craie grise, durcie et jaunie au contact du poudingue.
C. — CLASssE DES LAMELLIBRANCHES.
Les Lamellibranches ont laissé de nombreux restes dans les assises supérieures crétacées de Ciply, mais les espèces de l'ordre des Pleuroconques seules ont conservé leur test. A très- peu d’exceptions près, les Orthoconques n'ont laissé que des moulages internes ou des empreintes de leurs coquilles.
ORTHOCONQUES. a. — Du Tufeau.
Les Lamellibranches Orthoconques du tufeau, comme les gastéropodes de la même assise, ne se rencontrent que dans les
(1) Mélanges paléont., 1° partie, p. 40 et 41 et 2% partie, p. 195. (2) Loc. cit., page 26, pl. III et VI.
30 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
bancs durcis, assez rares, qui se montrent dans la masse sur certains points. Le banc le plus remarquable, sous ce rapport, se trouve à la partie supérieure de l’ancienne carrière à l’est de la férme de Belian, le long du chemin de Nouvelles. Trois des fossiles que l’on y rencontre à l’état d'empreintes ont été rap- portés par M. Van Binckhorst (1) à des espèces du tufeau de Maestricht. Ce sont :
Corbis sublamellosa, d'Orb. Crassatella Bosquetiana, id. Trigonia limbata, id.
Avec ces espèces qui sont pour nous très-douteuses, on ren- contre dans les bancs durcis du tufeau des empreintes ou des moules de
Lucina Cardium Arca Cyprina Pectunculus Venus? Cardita
b. — Du Poudingue de la Malogne.
Dans le poudingue de la Malogne les restes de lamellibran- ches orthoconques sont généralement des moules en phosphate de chaux. Nous y avons recueilli les genres suivants :
Cardium Leda
Lucina (plusieurs espèces) Nucula
Venus Arca
Tellina Trigonia
Cyprina Mytilus c. — De la Craie grise.’
La craie grise de Ciply renferme de rares coquilles d’ortho- conques moulées en phosphate de chaux, mais les fossiles de
(1) Esquisse géologique et paléontologique des couches crétacées du Limbourg, page 89.
MÉMOIRES. 31
cet ordre se rencontrent avec assez d’abondance à l’état d’em- preintes, dans les bancs de craie durcie qui se trouvent à la partie supérieure de l’assise au contact avec le poudingue. Ceux que nous possédons appartiennent aux genres suivants :
Lucina (plusieurs espèces) Crassatella Corbis Panopæa Trigonia Venus Pectunculus Isocardia Arca (plusieurs espèces) Gastrochæna Leda Mytilus Cyprina Modiola Cardium Lithodomus
C’est probablement aussi de la partie supérieure de la craie grise que proviennent les espèces décrites et figurées par M. de Ryckholt (1) sous les noms de :
Pholas supracretacea, de Ryck. Lithodomus similis, de Ryck. Trapexium Ciplyanum, id. Mytilus Ciplyanus, id. Lithodomus Ciplyanus, id.
PLEUROCONQUES.
Des coquilles bien conservées de Lamellibranches Pleurocon- ques abondent dans les assises crétacées de Ciply, principale- ment dans la craie grise et dans le poudingue. Elles sont beau- coup plus rares dans le tufeau qui ne nous a guère fourni que les espèces suivantes :
Pecten Faujasii, Defr. Ostrea larva, Lamk. Janira quadricostata, d'Orb. » lunata, Nils. Ostrea vesicularis, Lamk. Spondylus subplicatus? Münster sp.
» Jateralis, Nils. Tous les lamellibranches pleuroconques du poudingue se
, (1j Mélanges paléont., 1" partie, pages 415 à 152 et 2" partie, page 138.
32 SOCIÈTE MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
rencontrent dans la craie grise et réciproquement. Ces deux assises nous ont fourni :
Pecten pulchellus, Nils. (très-abond.) Ostrea flabelliformis? Nils. (abond.)
» cretosus, Defr. (assez rare). » lateralis, id. (id.) » cicatrisus, Goldf. (id.) » larva, Lamk. (id.) » (4 espèces). » lunata, id. (id.) Janira substriatocostata, d’Orb. (ab.) » vesicularis, id. (très-abond.) » (4 espèce). » acutirostris, Nils. (id.) Lima semisulcata, Goldf. (ab.) » curvirostris, id. (rare). » (1 espèce). » auricularis? Goldf. (id.) Avicula cærulescens, Nils. (très-ab.) » podopsidea, Nyst. (id.) (1). » (4 espèces). \ » (4 espèces). Spondylus subplicatus? Münster sp. Inoceramus Cuvieri, Brong. sp. (ab.) » (4 espèces). » (4 espèce). D. — CLASSE DES BRACHIOPODES.
L’abondance des Brachiopodes en genres, en espèces et en individus, imprime aux assises crétacées des environs de Ciply un caractère très-remarquable. Nous y trouvons en effet réu- nies dans la même assise des espèces appartenant aux genres Rlyynchonella, Terebratula, Terebratulina, T'erebratella, Tere- brirostra , Trigonosemus (Fissurvrostra), Argiope, Magas, T'hecidea, Crania et Requienra.
Nous n'avons, jusqu’à ce jour, rencontré de coquilles de brachiopodes dans le tufeau qu’à la partie inférieure de l’assise, à peu de distance du poudingue. Elles y sont généralement peu abondantes et appartiennent aux espèces suivantes :
Terebratulina striata, d'Orb. Thecidea digitata, Bosquet. Fissurirostra pectiniformis, d'Orb. Crania Egnabergensis, Retzius. Thecidea papillata, Bronn.
C’est dans le poudingue de la Malogne et principalement dans la craie grise, que nous avons recueilli la grande quantité
(4) Annales de la Société malacologique de Belgique, Tome VI 1871, page 74.
MÉMOIRES. 33
de brachiopodes que nous possédons. Tous les genres indiqués plus haut s’y rencontrent, mais les coquilles des genres Xyn- chonella et T'erebratula y sont d’une extrême abondance et pré- sentent tant de formes diverses qu'il est très-difficile, sinon impossible, de les séparer en espèces bien distinctes. Les espè- ces des autres genres sont moins nombreuses et sont facile- ment limitées.
Nous avons recueilli les espèces suivantes, qui toutes se ren- contrent avec la même abondance dans la craie grise et dans le poudingue, à l'exception de la Z'hecidea papillata et de la Crania Æqnabergensis qui sont rares dans la craie grise et très-com- . munes dans le poudingue sur certains points.
Rhynchonella octoplicata, d'Orb.(Ab.) Terebratulina striata, d'Orb. (Cette
» subplicata, id. (Très-ab.) espèce, qui est assez abondante,
» (Un grand nombre de for- nous a fourni des coquilles de
mes qui sont des espèces toutes les tailles, nos plus grands
nouvelles ou des variét.) spécimens ayant 6 à 7 centimètres Terebratula carnea, Sow. (Très-ab.) de longueur).
» semiglobosa, id.(Assez-rar.)
» Hebertiana,d'Orb.(Tr.-r.)
) (Une espèce à large ouver- ture évasée qui atteint presque la taille de la T. grandis du crag d'Anvers. — Rare.)
» (Une espèce très-trigoneet à test très-mince. — As- sez rare.)
» (Un grand nombre de for- mes qui ne sont peut- être que des variétés.)
Terebrirostra Davidsoniana,de Ryck. (1). (Rare). Rhynchora (Terebrirostra) plicata, Bosquet (2). (Très-rare.) Terebratella.… (Grande et belle co- quille non décrite. Assez abond.) Argiope Davidsoni,Bosquet(3).(Rare.) » (Une espèce.-Rare). Trigonosemus (Fissurirostra) elegans, Kœnig. (Assez abond.) » Palissi, Woodward.(Assez abond.) » pectiniformis, d'Orb. (Très rare).
(1) de Ryckholt. Notice sur les genres Nautilus, Vestinautilus, etc. — Bruxelles, 1852, Hayez, imprimeur.
(2) Bosquet. Notice sur quelques nouveaux Brachiopodes du sys- tème maestrichtien. (Mémoires de la commission pour la description géologique de la Néerlande, Tome II, 1854).
(3) Idem.
34 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
Thecidea papillata, Bronn. (Abond. Crania parisiensis, Defr. (Assez
dans lepoudingueet rare commune). dans la craie grise). » antiqua, id. (id.)
» recurvirostra, Defr. (Assez » Egnabergensis, Retzius. (As- commune dans le pou- sez rare dans le pou- dingue. Nous ne l'avons dingue et très-rare dans pas rencontrée dans la la craie grise.) craie grise). Requienia Ciplyana,de Ryck.(1).(rare).
Thecidea hippocrepis, Goldf. (Rare).
E. — CLASSE DES BRYOZOAIRES.
Les Bryozoaires sont rares dans la craie grise de Ciply, mais ils abondent dans le poudingue et dans le tufeau où ils sont réunis dans de minces lits friables non continus. Les espèces paraissent nombreuses, mais n'ayant pas étudié les fossiles de cette classe, nous ne pouvons donner ici aucune détermination certaine (2).
IV. — RayonNNés.
Les fossiles de cet embranchement ,consistent principale- ment en Echinodermes, qui sont assez nombreux, et en quel- ques Polypiers assez rares.
D’après les auteurs, on aurait rencontré à Ciply un grand nombre d'espèces d'Echinodermes, mais nous considérons les seules déterminations suivantes comme certaines :
a. — Du Tufeau. Hemipneustes radiatus, Agassiz. Cassidulus Marmini, Agassiz. (Rare). (Très-rare). » elongatus, d’Orb.(Tr.-r.)
b. — Du Poudingue.
Catopygus fenestratus,Agass. (Abon.) Ananchites ovata, Lamk. (Abond., Cidaris subvesiculosa, d'Orb. (Rare.) mais toujours roulé). Holaster granulosus, Agass. (Rare.) Asterias quinqueloba,Goldf. (Assez r.)
(4) Mélanges paléont., 2" partie, page 179. (2) Voir à la suite de ce rapport la Liste de M. A. Houzeau de Lehaie.
MÉMOIRES. 39 c. — De la Craie grise.
Catopygus fenestratus, Agass. (Ab.} Ananchites ovata, Lamk. (Tr.-rare). Holaster granulosus, id. (Assez rare) Bourgueticrinus ellipticus? Miller, Sp. (Très-rare).
Nous avons recueilli dans les assises crétacées de Ciply, un assez grand nombre d'espèces de Polypiers, principalement dans le poudingue de la Malogne, mais no1s ne sommes pas parvenus, jusqu'à ce jour, à les déterminer d’une manière certaine.
V. — PROTOZOAIRES.
Des Spongiaires transformés en phosphate de chaux se ren- contrent en grand nombre dans le poudingue de la Malogne. Ces espèces nous paraissent nombreuses, mais elles sont, pen- sons-nous, difficilement détermirables.
Les Foraminifères sont très-rares dans le poudingue et la craie grise, mais ils abondent dans certains bancs du tufeau. Nous croyons avoir reconnu entre autres les espèces suivantes:
Cristellaria rotulata, d'Orb. Globulina globosa, Reuss. Nodosaria Zippei, Reuss. Guttulina elliptica, id. Polymorphina lacryma, d'Orb.
IIS TE
DES
BRYOZOAÏIRES DU POUDINGUE DE CIPLY 0) par A. HOUZEAU DE LEHAIE.
— SÉANCE DU 3 AOÛT 14873. —
Cellaria inequalis, d'Orb. Eschara Ægle, d'Orb. » 1 esp. indéterminée (2). » Callirhæ?, d'Orb. Cellarina 1 esp. ind. | » _Dela, dOrb. mu » Delaruena?,d'Orb. Vincularia bella, Hag. » stigmatophora, Gold. n canalhifera, Hag. » Cypræa, d'Orb. » disparilis, d'Orb. » Otto, diOrb. » l'esp. ind. » Cydippe ?, d'Orb. Eschara pusilla, Hag. » Cressida, d'Orb. » bixa ?, d'Orb. » Arsine, d'Orb. ” Elea, d'Orb. » .:Crithea, d'Orb. . » subcyclostoma, d'Orb. » 4 esp. ind. n propinqua, Hag. Semieschara grandis, d'Orb. » sexanqularis, Hag. » dispariis, d'Orb. » Merei ?, d'Orb. » 3 esp. ind.
(1) N'ayant entrepris l'étude des Bryozoaires que depuis quelques semaines, je n’ai pu examiner qu’une petite partie des matériaux dont je dispose. Il m’a également été impossible de me rendre compte : de la valeur des caractères dans ce groupe. Cette liste est donc très- incomplète et devra subir de profonds remaniements. Mon but prin- cipal en la publiant, un peu prématurément je le crains, est d'attirer l'attention sur le nombre prodigieux d'espèces différentes enfouies ensemble. C’est au point qu’un décimètre cube de roche dans le pou- dingue renferme en certains endroits plus de cinquante espèces. Jusqu'à présent, je ne me suis pas occupé des Bryozoaires des autres assises crétacées.
(2) Parmi les espèces indiquées comme indéterminées, il y en a un certain nombre pour la détermination desquelles le temps m’a manqué et quelques autres qui paraissent nouvelles.
MÉMOIRES. | #7
S'aichopora clypeata, Hag.
Lunulites Gold fussi, Hag. » Iagenorr, Bosq. » plana ?, d'Orb.
» 1 esp. ind. Cellepora Clio, d'Orb.
» irreqularis, Hag.
» camerata, Hag.
» Konnchiana, Hag.
» Zangis, d'Orb.
» hippocrepis, Gold.
» subpiriformis, H.
» 2 esp. ind. Reptocelleporariacretacea,d'0. Reptescharinella ringens, d'O.
n pusilla, d'Orb.
» subgranulata, d'O.
» transvcersa, d'Orb. Porina filograna, dOrb. Reptescharellina marqginata,
d'Orb. Escharifora foveolata, Beiïss. » coronata, Bosq.
» Peyssonelli, Bosq. » striata, Bosq. non
d'Orb. » Rondeleti, Bosq. » 1 esp. ind.
Flabellopora À esp. ind.
Reptescharella 2 esp. ind. ÆEscharipora 1 esp. ind. Semiescharipora ornata,d'Orb. Æeptescharipora elegantula, | d'Orb.
Steginopora 1 esp. ind. Biflustra ligeriensis, d'Orb.
» Lesueuri, d'Orb.
» 4 esp. ind.
Genre nouveau ? (1) 3 esp.
Flustrina obeliscus, d'Orb. Membranipora vaginata, Hag. » concatenata, d'Orb. » Cypris, d'Orb. » gracilis, d'Orb. » rustica ?, d'Orb. » L'aujasi, d'Orb. » subsimplez, d'Orb. » Duchateli, Hag.
———
Nodelea angulosa, d'Orb. Moelicerites tubiporacea, d’Orb.
» 1 esp. ind. Clausimultelea tuberculata, d'Orb.
Fasciculipora incrassata, d'O. Meandropora ciplyana,Houz.(2).
(1) Ce genre différerait des Biflustra, principalement en ce que les cellules sont groupées autour d’un axe solide, plein, cylindrique ou
aplati.
(2) Les espèces fossiles de ce genre n'avaient été rencontrées jus- qu'ici que dans les terrains tertiaires. Le A. ciplyana forme de grandes colonies (8 à 10 centimètres) à lames verticales plissées, comme froncées, s’anastomosant en larges mailles.
88 SOCIÈTE MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
Cyrtopora elegans, Hag. Osculipora repens, d'Orb.
» truncata, Orb. lilifascigera dichotoma, d'O. Theonia radians, Haime. Peripora Ligeriensis, d'Orb. Spiropora antiqua, Lamour.
1” ”n
lata, Gold.
» » Var.BReussi, Hag.
Clavitubigera convexa, d'Orb. Idmonea ramosa, d'Orb. » dorsata, Hag.
» pseudo-disticha, Hag,
» Cypris, d'Orb.
» sulcata, Hag.
» 3 esp. ind. Discotubigera À esp. ind. Reptotubigera dichotoma, dO. Actinopora diademoides, d'O.
» Gaudryana, d'Orb. Entalophora 3 esp. ind. Bidiastopora 2 esp. ind. Mesinteripora compressa, d'O. L'ilisparsa tubulifera, d'Orb. S'tomatopora reticulata, d'Orb. Proboscina 1 esp. ind. Berenicea oceanica, d'Orb. Crisina lichenoides, d'Orb.
» troanqularis, dO.
» 3 esp. ind.
Var, « verticil-
Iornera 1 esp. ind. Cavea flexzuosa, d'Orb.
» 1 esp. ind. S'parsicavea uwndulata, dOrb.
» dichotoma, d'Orb. Lichenopora cariosa, d'Orb.
» 1 esp. ind. Radiocavea elliptica, d'Orb.
» diadema, d'Orb.
Multicavea magnifica, d'Orb. Domopora cochloides, d'Orb. Eilicea reqularis, d'Orb. Ceriocavca ramulosa, d'Orb. Cara 2 esp. ind. Sulcocava sulcata, d'Orb. NN Resp Pande Retecaca clathrata, d'Orb. » l'esp. ind. Semicava cariabilis, d'Orb. Reptomulhicava theloidea, d0.
» macropora, Orb.
» cavernosa, dOrb.
» 1 esp. ind. Plethopora truncata, Hg.
» verrucosa Hag.
Semcyhs rugosa, d'Orb.
» 2 esp. ind. T'runcatula aculeata, d'Orb. ITeteropora crassa, Hag.
» dichotoma, Hag.
» 2 esp. ind.
COMPTE-RENDU DE GÉOLOGIE STRATIGRAPHIQUE
DE L'EXCURSION DE LA
SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE
DANS LE LIMBOURG BELGE,
LES 18 ET 19 MAI 1875,
par J. ORTLIEB et G. DOLLFUS.
(Planche 11.) — SÉANCE DU 5 AOÛT 1873. —
Chargés par la Société du compte-rendu stratigraphique de l’excursion de deux jours, dans le Tertiaire du Limbourg, faite sous la conduite amicale et éclairée de M. le comte Georges de Looz, notre principal devoir est de donner des coupes dé- taillées de tous les gîtes visités, d'indiquer les vrais niveaux géologiques des trouvailles conchyliologiques et d'enregistrer tous les faits constatés de nature à éclairer sur l’évolution des formations, afin de mettre en garde les observateurs qui nous suivront, contre les difficultés qu'ils pourront rencontrer.
Nous chercherons ensuite s’il n’est pas nécessaire d’adopter pour les couches du Limbourg une classification plus naturelle et mieux en rapport avec les exigences scientifiques actuelles, que celle de Dumont, qui est encore généralement adoptée en Belgique.
Laissant à d’autres, plus habiles (1), la description du pays et le soin de tracer notre itinéraire, nous dirons seulement que les coupes N° 1 à 3 ont été relevées le premier jour et sont
(1) Notre excellent collègue, M. Rutot, ingénieur à Liége, a bien voulu se charger de cette partie du rapport, publiée à la suite du présent travail.
40 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
résumées dans la coupe générale À, et que les coupes N° 4 à 7 prises le second jour, nous ont permis d'établir le profil 2 (Voir les figures de la Planche Il).
Nous avons consulté les écrits suivants, qui pouvaient nous éclairer dans notre travail'et nous y avons puisé, surtout pour les considérations finales, d’utiles renseignements.
Dumont. Carte géologique de la Belgique et publications di- verses. ,
Nyst. Coquilles tertiaires de la Belgique.
d'Omalius d’'Halloy. Géologie élémentaire de la Belgique.
Bosquet. Notes diverses sur les fossiles du Limbourg.
Hébert. Bulletin de la Soc. géol. de France, 2° série, tome VI, 1847, page 459.
Lyell. Quarterly Journal of the geological Society, tome VIII, 1852, p. 304. Mémoire sur le terrain tertiaire de la Bel- gique et du nord de la France.
Travail très-important dont nous nous sommes inspirés mais qui, combattu par Dumont, n’eût en Belgique qu’un médiocre succès à son apparition. — Traduction fran- çaise par MM. Lehardy de Beaulieu et Alb. Toilliez, en 1896.
Demalque. Compte-rendu de la Société géologique de France. Réunion extraordinaire à Liége, 1863. — Prodrome d’une description géologique de la Belgique, 1868.
Mourlon. Patria Belgica, 1873.
COUPE I
PRISE DANS LE CHEMIN. CREUX QUI VA DE GRIMMERTINGEN A VLIERMAEL.
\ limoner DUviUM. CNET Épaisseur 2",00 2. Sable blanc, grisâtre, sans fossiles. . . » 12/00 3. Sable argileux jaune, fin, glauconieux
et Jossuifere, visible Ur ANNE. 3,00
MÉMOIRES. 41
1. Le limon et le diluvium du Limbourg sont ordinairement très-épais et gênent considérablement les observations du sous- sol ; ils sont souvent très-compliqués et nous en donnons plus loin (coupe n° 4) une analyse détaillée.
2. Le sable, que nous rencontrons ici, forme une assise étendue dans le Limbourg : ses caractères sont assez constants, il est grisätre, un peu glauconieux et micacé. Il ne renferme aucun débris organique. C’est d’après tous ces caractères, un dépôt tamisé par le vent, c’est-à-dire une dune. Sa place strati- graphique étant bien nette dans la présente coupe, nous l’ap- pellerons, du nom du village voisin : Sable de Neerrepen, et nous rapporterons à ce type le même sable partout où nous le rencontrerons.
3. Le sable fossilifère est le type des Sables à Ostrea ven- tilabrum, c'est le Sable de Vliermael de M. d'Omalius, ce type nous parait heureusement choisi ; c'était pour Dumont le Ton- grien inférieur.
À la séparation avec la couche n° 2, on ne peut observer ni ravinement, n1 discordance; le sable jaunit, devient plus argi- leux, et la couche n° 3 débute par une bande concrétionnée renfermant en place, un lit d'Ostrea ventilabrum avec laquelle nous avons trouvé :
Tubes d’Annélides. Polypiers.
Sous cette zone, qui n’a que 20 centimètres, le sable moins compacte sur un mètre environ d'épaisseur, renferme spéciale- ment des gastéropodes :
Voluta Ratlneri, Héb. Ringicula gracilis, Sand. Cylichna teretiuscula, Bosq. Acteon simulatus, Brander.
La partie inférieure est plus argileuse que la précédente, roussâtre, et renferme en particulier :
42 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
Arca appendhculata, Sow.
Pectunculus lunulatus, Nyst.
Ostrea Queteleti, Nyst.
Pecten bellicostatus, S, Wood. » _Hoeninghausi, Def.
Cette couche, dite des Sables de Vliermael, est certainement la plus intéressante du Limbourg; elle renferme une faune ma- rine qu'on ne peut comparer à aucune autre. Elle mériterait une nouvelle étude spéciale, et nous ne saurions trop insister sur son individualité : nombre d’espèces trouvées, sous nos
yeux, nous ont semblé nouvelles.
COUPE 2.
RELEVÉE DU BOIS DE SCHABOSCH AU CHATEAU DE NEERREPEN.
LP mOn EN DEEE LR RTE ee 3700 A Sable blanc PECIoncies NE TR NTENEE ?
8. Partie boisée invisible . . . . . . . .. environ 8"00 Æ Sale gemaniesT0sSUIenC EM U elle ele 400 D..Sabielde Neerrepen. 4. 202 20 partie visible 3"00
1. Limon renfermant à la base un lit important de cailloux roulés et couvrant toute la colline.
2. Sables blancs et fins, ils n’ont été reconnus que par des monticules rejettés à l'entrée de terriers de renards, au sommet de la colline.
Les fossiles ramassés sont :
Pectunculus obovatus, Lam. — cc. Janira Hoeninghausi, Def. — c. Dentalium acutum, Héb. — r. Venericardia Omaliusi, Nyst. — r. Xenophorus Lyellianus, Bosq. — r.
C’est évidemment l'horizon de Bergh dont nous parlerons plus loin (Voir coupe n° 6, zone 3.)
MÉMOIRES. 43
8. La lacune, que nous devons signaler ici, est infiniment regrettable. Nous la supposons occupée par les sables sans fos- siles de Bergh et ceux fossilifères de Vieux-Jonc.
4, Cette couche, visible dans le chemin creux situé derrière la ferme du château de Neerrepen, ést évidemment hors de sa place. Elle est formée de sables remaniés, provenant d’une pe- tite distance peut-être, mais nettement hors de leur gisement normal. Ils masquent probablement la place de l'argile de Henis.
Nous tenons à insister sur ce dépôt formé de sables impurs, irréguliers, blancs, jaunes ou gris, en lits peu continus, alter- nant avec des cailloux roulés et des fossiles remaniés.
C’est un dépôt que l’on ne peut guère séparer du diluvium : ses analogues sont fréquents dans le Limbourg, et nous enga- geons les paléontologues de se défier des cas de ce genre.
Nous y avons rencontré, à la fois, des espèces des sables de Vieux-Jonc et des sables de Bergh.
ESPÈCES DES SABLES DE VIEUX-JONC. ESPÈCES DES SABLES DE BERGH.
NVatica glaucinoides, c. Pectunculus obovatus, ce.
Cytherea vncrassata, ac. Cardita Omaliana, Ge
Cyrena semistriata, cc. Limopsis Goldfussu, C
Cerithium elegans, ce. Nucula, en fragments, c. » Galeotti, C: Pleurotoma, idem, Fr 5 plicatum, ac. S'uccinea sp.?
Corbula subpisum, CC:
Bithinia Duchasteh, cc.
Melania Nysti, e.
5. Sables blanchâtres à rapporter au type de Neerrepen. On les voit en place et en position analogue à ceux de la zone 2, coupe 1, derrière la ferme attenante au château, et dans la sablière du parc, où ils reposent sur les sables fossilifères de Vliermael ; ces derniers forment le fond du bassin du lac,
Les sables sans fossiles de la sablière se présentent avec une
44 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
épaisseur visible de 6 mètres; leur partie supérieure est très
ravinée par le diluvium.
Si du château de Neerrepen. on se dirige vers Henis par le bois de Haselbosch, on peut rencontrer à mi-côte de la colline, dans des trous de lapins, et peut-être en affleurement, des sables blanchâtres, demi-fins, renfermant la faune des sables de
Vieux-Jonc. La Société y a recueilli les fossiles suivants :
Ceritlium plicatum, Lamk. — c.
» » var. (raleotti, Sand, — cc.
» elegans, Desh. — cc.
y voisin du #utabile, Desh. — c. Natica glaucinoides (Nystii d'Orb.) — c. Cyrena semistriata, Desh. — cc.
Cytherea incrassata, Sow. var. obtusanqularia, Sand.—ac.
Lucina Omaliusi, Desh.— r. Rissoa Michaudi, Nyst. — r. Bithinia Duchasteli, Nyst. — c. Melana Nystü, Duch. — c. Corbula ÆHenckeliusi, Nyst. — c. Etc., etc.
Ce niveau nous a semblé en place.
COUPE 8. BRIQUETERIE D’HENIS.
Nous rn’avons pu voir que les dépôts suivants ;
AS D AA TND LAS GE A LR ANT ES A EBNt 2. Sable impurargileux fossilifère. 1". 2. 5,0 D ARATeIDER LE LCOMNALEES LS HENSMENNEREREtENEE Qu, 22 A NSable anche ne TR RE MNNRALENE visible
2"00 0"20 G"00 200
MÉMOIRES. 45
2. Le sable désigné sous ce numéro est fort mince à Henis. C’est une zone de contact qui remanie et ravine la couche argi- leuse suivante à laquelle elle passe insensiblement.
Les fossiles, généralement en mauvais état, sont ceux du Haselbosch. Remarquons cependant la variété globulaire de la Cytherea incrassata, très-abondante en ce point : c’est, par con- séquent l’assise de Vieux-Jonc.
3. Argile compacte, argile de Henis, type pour M. d'Oma- lius ; ce type nous semble très-bien choisi, sa stratification est très-nette. Elle est limitée à la base aux sables de Neerrepen, pour se terminer au sommet par les sables de Vieux-Jonc. C’est une masse sans fissures, plastique, fine et compacte, verte ou bleuâtre, brunâtre par altération au contact de l'air, si serrée qu'à première vue toute trace organique y semble im- probable. Nous n’y avons absolument rien trouvé.
Ce dépôt, d’étendue restreinte, est évidemment d’origine fluvio-marine ou lacustre ; 1l réclame des études subséquentes.
M. Lyell a vu, dans sa masse, des lits de sables fossilifères de même nature que ceux supérieurs à ce dépôt. Nous n’avons pas eu l’occasion de les voir, et leur présence si elle était dé- montrée à nouveau, ce qui nous semble nécessaire, aiderait à prouver que cette couche n’est qu’un accident du dépôt de la- gunes cotières, si bien caractérisé dans le Limbourg.
4. Sable de Neerrepen, en contact peu ondulé avec la couche précédente. Il offre, en ce point encore, les caractères déjà signalés plus haut.
COUPE 4.
RELEVÉE DANS LE CHEMIN CREUX QUI MÈNE DE HOESSELT AU : CHATEAU DE VIEUX-JONC.
Ce chemin nous présente un exemple du terrain quaternaire dans le Limbourg.
46 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
1. Terrevégétale. . . . .. 0220
2. Limonterre àbriques,com- pacte vers le haut, un peu sableux à la base. . . . 350
. Dilucium; sable irréqulier
et hits de cailloux roulés et de coquilles remaniées. 040
4. Sable argileux avec co- quilles remaniées. . . . Om20
5. Sable à Ostrea ventila- brum, en place. . visible 1"00
QD
2. La couche n° 2 est traversée de tubulures jusqu’à la moitié de sa profondeur, aucune stratification n’y est vi- sible.
3. Mélange de galets très roulés de silex noirs ou blonds de la craie, et de fossiles : Pectunculus, Ostrea, Cerithium, etc. dans un sable grossier gris ou rougeâtre.
4. Présente un lit de sable argileux avec coquilles : les petits fossiles y sont plus abondants; certains niveaux en sont entière- ment composés.
5. Sable raviné de Vliermael, avec ses fossiles caracté- ristiques. Cette assise semble devenir trés argileuse, car elle retient, au bas de la colline, l’eau en un marais.
MÉMOIRES. 47
\
COUPE 5. PRISE DANS LE HAUT DU PARC DU CHATEAU DE VIEUX-JONC.
É O ttente nE MTEVER ... Environ 2"00 De DUDIe Grisûtre JOsSUTfÈre. NT, Et NN 3"00 3. Arqle verte
La zone 2 renferme les fossiles dont l’ensemble constitue le type de Vieux-Jonc; ils sont d’une extrême abondance, leur nature indique une origine saumâtre, d’estuaire très-probable- ment.
Son contact avec l’assise n° 3 n’est pas visible. Celle-ci est l'argile de Henis : elle ne présente aucun caractère nouveau.
Les principaux fossiles dont la Société a constaté la présence sont :
Ceritlium plicatum, Lamk. — c. » var. Galleotti, Sand. — c. : » elegans, Desh. — cc. Cyrena semistriata, Desh. — cc. Corbula subpisum, d’Orb. — ec.
» ITencheliusr, Nyst. — c. Corbulomya triangula, Nyst. — c. Natica Nysti, d'Orb. — c.
Bithima Duchasteli, Nyst. — cc. Melania Nystii, Duch. — cc. Rissoa Michaudi, Nyst. — c. Lucina Omaliusi, Desh. — c. Cytherea incrassata, Sow. — ce. Mytilus subfragihis, d'Orb. — r. Neritina pseudoconcara, d'Orb. — r. Plus 3 ou 4 autres espèces indéterminées.
Ces deux dernières espèces semblent spéciales et caracté-
ristüques : elles ne paraissent pas passer dans les sables de Bergh: |
48 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BÉLGIQUE.
COUPE 6.
CONSTATÉE A BERGH, DU BAS DE LA COLLINE AU CHEMIN DE LETHEN.
ES LimON Sable. ENNEMIS Re TU pen arguente Ni EN ANNENENNENATACSrR er 9. Sable grisâtre à Pectoncles . : : . . : visible 2"50 4. Sable blanc sans fossiles... .: . 41. à à visible 1°00
Dacune su is do En A EU ae RON 9. Sable ct argile mélés; avec Cyrènes et Cérithes
POULES ELOTASCS ANT ON ETS ANATOLE GA compactes) NL anse I EriSible tr 180
2. Tuffeau très-glauconieux et calcarifère, formant le som- met de la colline, nous n’y avons pas vu de fossiles.
C'est une masse brunâtre et verdâtre; pour les autres caractères, elle ressemble en tous points à la couche de Klein- Spauwen qui en renferme (voir coupe 7, zone À).
3. Type du sable supérieur de Bergh, dit à Pectoncles :
C'est une assise sans stratification visible; le sable est à grains assez gros, très-blancs ou jaunâtres ; il renferme une faune bizarre dont ci-bas la liste. Cette faune paraît surtout remarquable par une addition d'espèces ordinairement roulées de Vieux-Jonc, aux espèces marines spéciales à Bergh; c’est un facies qui, à priori, doit être géographiquement variable dans sa composition.
4. Sable blanc, fin et pur que nous avons vu dans un trou au milieu d’un champ en montant.
o. Couche de contact en tout semblable à la zone 2 de la coupe 3. Les fossiles sont littéralement broyés.
6. Argile de Henis, visible dans une excavation derrière une petite maison en montant directement à Bergh en venant de Vieux-Jonc. Elle est à une dizaine de mètres au-Gessus de la vallée et ne présente, du reste, aucun caractère nouveau.
La coupe serait complète si nous signalions à une petite dis-
MÉMOIRES. 49
tance de là, à Lethen, un très-beau gisement bien connu des sables de Vliermael, assez argileux, formant le sol du fond de la vallée et qui, par la diminution graduelle de l'épaisseur des assises sableuses, tend à se réunir au tuffeau supérieur qui, en grandissant, semble peu à peu se fusionner lui-même à l'argile de Boom.
LISTE DES FOSSILES DE BERGH.
*Pectunculus obovatus, Lamk. — c, c. Cyrena semistriata (petites), Desh.— c. c. *Astarte Hencheliusi, Nyst. — r. *Limopsis Gold fussi, Nyst. — r. Corbula subpisum, d'Orb. — c. *Cardita Omaliana, Nyst. — r. *Janira Hoeninghausi, Def. — r. Corbulomya trianqula, Nyst. — c. c. *Cyprina Nystu, Desh. — c. Melania Nystii, Duch. — c. ce. Cerithium elegans (roulés), Desh. — c. c. Lucina Thierensiü, Desh. — r. Rissoa Duchasteli, Nyst. — c. Cytherea incrassata, Sow. — c. *Cardium cingulatum, Gold. — r. Melania inflata, Duch. — c. * Limneus acutilabris, Sandb. — r. r. Pleurotoma Duchasteli, Nyst. — r.
Les espèces marquées d’un astérisque sont dés et ca- ractéristiques des sables de Bergh.
COUPE dl
PRISE A LA COLLINE DE KLEIN-SPAUWEN SOUS L'ÉGLISE.
10 Zimonépars arqueuri. 4. NE NT RU Tuffeau à Nucules . . 4 an, visible 5"00 8. Sables deiBenphsiis14 1, MEN. NS environ 100
50 SOCIÉTE MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
4. Sable blanc sans fossiles. . . . . . . . confus 1*50 5. Sable de Vieux-Jonc. . ..:. ..:... bien net °0"75 6. Marne de Henis . . . . affleurement supérieur
2. Le tuffeau argileux a une stratification indécise, très- fragmentaire au sommet, renfermant en abondance des débris nacrés de Vucula Lyelliana Bosq. Nous n’y avons pas trouvé d’autres fossiles quoique M. Lyell en donne une liste assez éten- due d'espèces communes à l'argile de Boom qui lui est contigue.
3. Sable grossier avec Pectunculus obovatus et les autres fossiles de Bergh bien caractérisés.
4. Partie éboulée confuse. Nous y avons remarqué spécia- lement un sable blanc sans fossiles séparant les deux niveaux fossilifères.
9. Sable rougeätre impur, avec Cérithes abondantes, non roulées, type de Vieux-Jonc bien caractérisé.
6. Argile visibie dans le fond d’une petite source à l'entrée du chemin creux sous l’église.
Cette succession , qui donne la série presque complète des assises tertiaires du Limbourg, offre plus d’un intérêt; mais son caractère le plus frappant est la diminution sensible dela masse des sables, Les couches de Bergh et de Vieux-Jonc doi- vent finir peu au nord, où ces dépôts spéciaux vont laisser la place aux grands fonds.
Il convient de rappeler, avant de terminer cette partie des- criptive, la coupe des sables de Bergh, prise à Bergb, près Klein-Spauwen, coupe donnée par M. Lyell.
IA Fgue à Nubules ENNEMIS DIE AUD 2 NS UDIE DIaNL|S ANS OS SUES NAN NES ARC SAN DO PCCLUNCUULS. À CRÉES NE RO REES CO D ASUS JOSEUIOS ONE AS LE STE) DA al a0ec Vert hiUm NNANRNEMENER EE EE CNE 6.1 1: sans Jossiles : 2 4 pa nt OA 7. n» - avec Cerithium . se NS EU ne 0850 8. n avec peu de fossiles (Cyprina Nystii). . .
MÉMOIRES. 5l
Cette coupe qui ne montre point le niveau de Klein-Spau- wen et de Vieux-Jonc, présente cependant dans sa partie infé- rieure des couches dont la faune indique une période de tran- sition bien évidente, que l’auteur s’est plu à mettre en relief : ces Cérithes apparaissent, tandis que les Syphonostomés d’ha- bitat profond disparaissent.
Nous y voyons ensuite la marque évidente que le dépôt, d’abord saumâtre, redevient après de plus en plus marin par suite d’un affaissement lert, mais continu, du sol, et que stra- tigraphiquement on ne peut séparer Vieux-Jonc et Klein- Spauwen de Bergh.
Nous voici arrivés au terme de la partie purement descrip- tive de notre course, et pour bien faire comprendre les coupes générales À et B, qui ne sont que le résumé des coupes parti- culières, il convient de revoir rapidement dans leur ordre stra- tigraphique les diverses couches rencontrées un certain nombre de fois.
I. — Le sol tertiaire important du Limbourg, le soubasse- ment des collines que nous avons visitées, est formé par le sable de Vliermael, sable devenant de plus en plus argileux vers le nord, c’est-à-dire vers sa partie profonde : c’est le fon- dement naturel de soutien du reste; nous y joignons le sable de Neerrepen, qui en forme, en quelques localités, la partie supérieure et qui n'en est qu'un cas particulier d’étendue res- treinte, à l’état de dune tamisée par le vent.
Disons en’passant que nous n'avons vu nulle part, dans le Limbourg, le terrain Laekenien sur lequel repose ordinaire- ment le Tongrien inférieur de Dumont, et que le contact de ces deux terrains est encore peu connu : le sommet de cette assise étant resté mal éclairé jusqu’à ce jour, et les points où il est visible n'étant pas fossilifères.
IT. — Quant au relief des collines, il est dû à un ensemble de trois couches :
!
2 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
Sables de Bergh, au sommet. » de Vieux-Jonc. Marne de Henis, à la base.
Ces couches, d'épaisseur variable et de nature irrégulière, forment néanmoins un tout bien net à tous les points de vue, paléontologique et stratigraphique. La marne de Henis, tout en paraissant manquer de débris organiques, du moins la So- ciété n’y en a pas trouvés, se lie néanmoins par son origine à la nature fluvio-marine de l’ensemble; elle reste isolée sufi- samment des sables de Neerrepen par une étendue géographi- que et une composition minéralogique différentes.
Nous ferons toutefois remarquer, au sujet de ce groupe que nous admettrions sans difficulté, qu’il pouvait être, au moins partiellement, contemporain latéral du groupe suivant. À nos yeux, une formation fluvio-marine est accidentelle et par suite, tout à fait locale, forcément reliée par une transition rarement visible, il est vrai, à d’autres dépôts de caractères plus constants et d'extension géographique plus vaste.
Suivant M. Forbes, la faune des sables de Klein-Spauwen indique une formation effectuée sous une faible profondeur d’eau, 10 mêtres environ ; il semble en être de même des couches inférieures de Bergh, tandis que la couche supérieure, dite des sables à Pétoncles, renferme des coquilles ayant vécu sous 30 mètres d’eau.
Durant la période correspondante à ce groupe II, le fond de Ja mer s’est peu à peu soulevé (Klein-Spauwen, Vieux-Jonc, Bergh (base), pour s’enfoncer ensuite (Bergh supérieur).
IT. — Au sommet des collines Nord explorées, on voit ap- paraître une couche nouvelle, qui prend de plus en plus d’im- portance et qui possède une faune franchement marine, toute ou presque toute nouvelle. Cette couche, comme l’a trés-bien exprimé M. Lyell, se fond au nord avec l'argile de Boom dont elle n’est qu'un facies, moins profond et de nature sableuse. La paléontologie confirme ce rapprochement.
MÉMOIRES. D3
En nous résumant, nous pouvons donc dire, avec sir Ch. Lyell, que le terrain tertiaire du Limbourg peut être envisagé comme formant trois groupes bien distincts, caractérisés de la façon la plus satisfaisante.
Groupe III, marin supérieur. Argile de Boom. » IT, fluvio-marin. Sables du Limbourg. » I, marin inférieur. Argile de Vliermael.
Les systèmes généraux que Dumont avait adoptés, et qui ont été conservés après lui, par les géologues actuels, ne nous sem- blent pas répondre avec assez de vérité, ni assez de clarté à la succession que nous venons d'étudier, et sans entrer ici dans la discussion des raisons particulières bien connues, venant d’une méthode générale de travail, qui l’avaient amené à introduire les systèmes que l’on va voir, nous dirons que plusieurs assises sont réunies qui sembleraient devoir être séparées et d’autres sont disjointes qui présentent les plus grands rapports de for mation et d'âge.
Cela vient, à la fois, du peu de cas que Dumont faisait des fossiles et du manque d'interprétation avec les causes actuelles qu'il donnait à ces dépôts.
Voici la comparaison de la classification de Dumont avec celle que nous adoptons :
| 1
UD de Argile de Boom. Rupelien supérieur. supérieur.
Tuffeau à Nucules. » inf” (pars). Sables de Bergh. Groupe| moyen. \ » » Vieux-Jonc. laroite de Henis. Tongrien sup". Sables de Neerrepen. ï » » Vliermael. Tongrien inférieur.
Rupelien inf* (pars).
inférieur.
Nous donnerons encore le tableau comparé de notre classi- fication avec celle de Lyell; on verra combien une observation indépendante nous amène à adopter une classification voisine de celle qu’il posait dès 1851 et qui semble oubliée. Nous nous
54 SOCIÈTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
estimons heureux, en cette circonstance, de nous rencontrer de bien près avec un maitre aussi habile et aussi illustre.
TR A A I EE EC EN CLASSIFICATION DE LYELL. NOTRE CLASSIFICATION.
Argile à Nucules. | Tuffeau à Nucules.
Groupe supr
Sables de Bergh. | Sables de Bergh. | Oligo- Eocène céne sup. et moyen. supér. Marnes vertes. Marne de Henis.
Argile sableuseet | Sables de dE Oligoc.
Gr. infér. inférieur.
Gr. Yo jaunûtres. » deVieux-Jonc. | glauconieuse. » arg. deVliermael.
L'ensemble de toutes ces couches correspond à l’oligocène de M. Beyrich, et le Limbourg serait, à notre avis, le meilleur type de ce terrain et le lieu où il serait le plus généralement développé.
On pourrait encore disposer comme suit, le tableau précé-
dent.
DUNE. LITTORAL. MER PROFONDE.
supér.| Sables du Rupel? | Argile à Nucules. | Argilede Boom. Sables de Bergh. \
en. »y de V.-Jonc. Idem ?
AD m Oligocène.
| Sables divers | sans fossiles.
Marne de Henis. OSCILLATION.
infér. [sable de Neerrepen, Sable et argile de Vliermael. |
Ainsi donc, et en résumé, l’Oligocène forme, dans la série générale des terrains tertiaires de la Belgique, un étage bien
MÉMOIRES. 2 83
distinct du reste, digne d’être accepté par les géologues, et parfaitement délimité à la base et au sommet :
A la base, par une discordance géographique énorme avec le Laekenien et par une faune toute nouvelle qui n’a aucun rapport avec celle de l’Eocène de notre contrée (1.)
Au sommet, par les sables d'Edeghem qui viennent immé- diatement au-dessus, présentant une discordance géographique non moins importante, et un renouvellement complet de la faune. Les sables d'Edeghem présentant, pour nous, le type Miocène bien caractérisé.
Nous ne dirons que quelques mots des relations des couches du Limbourg avec celles de l’Oligocène étranger. Ces rapports sont fournis par quelques mollusques très-abondants, aussi spé- cilaux que caractéristiques, de toutes les régions de cette époque. Ce sont :
Cerithium plicatum Pectunculus obovatus Cerithium elegans Nahca crassatina Bithinia Duchasteli Natica Nystir Cyrena semistriata etc.
Cytherea incrassata. ,
(1) M. Lyell, dans son Mémoire sur les terrains tertiaires de la Bel- gique et du nord de la France, se demande si les terrains du Lim- bourg doivent être rangés dans la période éocène supérieure ou dans la période miocène inférieure ?
L'auteur conclut de la manière suivante : « Sur 201 espèces de Mollusques du Limbourg, il y en a 80 d’identiques avec des fossiles que les géologues anglais considèrent comme éocènes, et par suite, il range les terrains dont nous nous occupons dans la période éocène supérieure.
Or, cette manière de voir a subi depuis quelques modifications, et l’on est aujourd’hui généralement d’accord pour ranger les forma- tions auxquelles M. Lyell fait allusion, à savoir, la formation supé- rieure marine et d’eau douce de l’île de Wight (Bassin du Hamps- hire) comme miocène. Ce motif, que de notre côté nous adoptons également, nous autorise à nous exprimer dans les termes ci-dessus.
56 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
1° Dans la vallée du Rhin, qui n’est qu'un autre point géographique des dépôts de la même mer, nous pouvons appli- quer la même classification.
| supér. | Argile de Boom. |{Lignites.
Sables de Bergh. |? Calc.impuràLittorinelles.
moyen. » de V.-Jonc.| Sables à Cérithes.
Groupe ! Argile de Henis. | Marnes à Cyrènes. OSCILLATION.
infér. | Sable deVliermael.] Système marin profond.
Les dépôts fluvio-marins allemands correspondent, d’une fa- çon générale, à notre groupe moyen, sans qu’il soit bien pos- sible d'identifier les assises particulières.
2° L’étage oligocène n’est pas représenté dans le bassin de Londres.
3° Dans le bassin de Paris, nous ne croyons pas possible de donner une correspondance exacte couche à couche.
En gros, nous pensons pouvoir dire que :
Aroïle de Boom correspond aux calcaires d’'Etampes.
Sables de Bergh Sables de Fontainebleau. | Calcaire de Brie. » de Vieux-Jonc Marnes marines: supérieures au gypse. » de Vliermael Point profond du gypse.
4 Dans le bassin de Hampshire la correspondance est plus aisée : les formations sont saumâtres comme dans le Lim- bourg.
Argiïle de Boom | Hampstead marine Serie. Sable de Bergh n fluvio-marine d°. » de Vieux-Jonc Bembridge EU » de Vliermael » gypse limestone d?.
En somme, la période oligocène nous semble fort bien déli-
MÉMOIRES. 57
mitée et caractérisée partout, sans qu’il soit cependant possible d'y faire exactement, nulle part, correspondre des sous as- sises.
C’est une époque des plus intéressantes comme transition entre le tertiaire éocène, faune propre et caractéristique, et les étages miocène et pliocène qui joignent insensiblement les temps géologiques à la période actuelle.
Qu'il nous soit permis en terminant de regretter de n’avoir pu prolonger nos recherches dans le Limbourg, afin de suivre chaque couche dans ses modifications géographiques, car nous ne doutons pas que cette étude nous eût fourni des points de vue intéressants, comme les rapports de la faune avec son origine et son milieu, rapports qui nous eussent permis de retracer la série d’évolutions par laquelle cette contrée a passé avant d’ar- river à l'époque actuelle.
Peu de bassins présentent, en effet, autant de diversité, par suite de la présence de points profonds intimements liés à des points littoraux. Le Limbourg oligocène est en résumé une plage sableuse avec lagunes sur le bord d’une mer assez pro- fonde à sédiments argileux, inconnus ailleurs à la même époque. |
Nous souhaitons que d’autres, plus habiles et plus autorisés, arrivent à préciser les circonstances des changements étudiés, et nous remercions sincérement la Société et son aimable con- ducteur, de l’occasion qu’ils nous ont offerte, de nous éclairér sur un sujet si plein d'intérêt.
RAPPORT
AU 2POINTUDE VUE PALÉONTOLOCIQUE
DE L'EXCURSION
entreprise les 18 et: 191août. 1873;
AUX ENVIRONS DE TONGRES
PAR
LES MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
par A. RUTOT.
— SÉANCE DU 3 AOÛT 1873. —
Ainsi que le portait la circulaire que notre honorable secré- taire avait adressée aux membres de la Société Malacologique, l’excursion des 18et 19 mai a eu pour but la recherche des fos- siles contenus dans les Étages Tongrien et Rupelien si bien développés aux environs de Tongres. Je crois pouvoir com- mencer par dire que ce but a été atteint, car nombre de char- mantes espèces ont été recueillies par les chercheurs.
PREMIÈRE JOURNÉE. — Aimanche 18 mari.
Les membres de la Société qui ont pris part à l’excursion entreprise ce jour sont : MM. le comte Georges de Looz, notre aimable guide, Colbeau, Purves, Vanden Broeck, Ortleb, Dollfus, Weyers, Fromont et Rutot. Nous avons beaucoup re- gretté l'absence de notre honorable président si versé dans la paléontologie des assises tertiaires.
Les membres s'étant rassemblés à 8 heures du matin à l'hôtel du Paon à Tongres, prirent la direction de Neerrepen,
MÉMOIRES. 99
village situé à environ 7 kilomètres de Tongres. La route n’a présenté géologiquement rien de remarquable, si ce n’est l’af- fleurement du Tongrien supérieur au fond d’un chemin creux. La présence du terrain se faisait principalement remarquer par les nombreux débris blanchâtres de coquilles. La plupart des fragments était indéterminables, on a pu cependant recon- naître la Cyrena semistriata, les Cerithium elegans et Ga- leothi, la Cytherea incrassata, etc. Sans s'arrêter à des traces aussi peu importantes, on arriva au château de Neer- repen d’où on se dirigea vers un chemin creux situé à 2 kilomètres du château et sur le territoire du village de Grim- mertingen.
Ce chemin, dont les talus ont de 3 à 4 mètres de hauteur, présente la coupe suivante en partant de la base :
1° Environ 150 à 2" de sables Tongriens inférieurs ;
2° Environ 1" de sable blanc non fossilifère ;
3° 150 à 2" de limon Hesbayen avec cailloux roulés.
L’Étage Tongrien inférieur se présente sous forme d’un sa- ble assez fin de couleur brunâtre à la surface passant au ver- dätre dans les coupes fraîches, recouvert d’un banc de sable blanchâtre plus grossier appartenant à l’étage supérieur.
Sans y reconnaître des lignes de démarcation bien tran- chées, le banc inférieur m’a paru composé de 3 couches : l’in- férieure, épaisse de 0"75 environ, caractérisée par la présence de l’Ostrea Queteleti ; la moyenne d'épaisseur égale à la précé- dente, contient de grandes quantités d’Ostrea ventilabrum et d'Ostrea flabellata, souvent bivalves et de grande taille ; enfin la troisième couche, épaisse de quelques centimètres, est com- posée d'éléments plus grossiers et n’est autre chose qu'une couche roulée séparant l’assise inférieure verdâtre de l’assise supérieure blanchâtre non fossilifère. Ce lit remanié, de cou- leur brun-rougeñtre, à offert des dents de poissons, de grosses Ostrea à valves isolées, des Dentales, etc.
Les sables inférieurs verdâtres de la coupe du chemin creux à Grimmertingen sont très-fossilifères, et les espèces, franche-
©
60 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
ment marines, appartiennent aux espèces les plus diverses et
les plus élégantes. Voici une liste, aussi exacte que LoSSble, des fossiles, mal-
heureusement fort fragiles, que nous avons pu recueillir :
GASTÉROPODES.
T'urritella crenulata Nyst.
» planisprra id. Natica Hantoniensis Soland. Solarium Dumonti Nyst. Voluta suturalis id.
» Cinqulata id.
AncillariasubcanaliferadOrb. Pleurotoma Waterkeyni Nyst.
n Bosqueti id.
Pleurotoma turhida Soland.
Fusus ?
Cassidaria Nysti? Kickx. Murex ? Rostellaria ?
Cancellaria elongata Nyst. Tornatella Hont id. Dentalium acutum Héb.
LAMELLIBRANCHES.
Solecurtus ? Panopea eberti. Cytherca ?
Tsocardia multicostata Nyst. Venericardia Omaliusi id. Crassatella intermedia 14. Pectunculus lunulatus id. Arca sulcicostata id.
Modiola Nysti Kickx. Pecten subreconditus d'Orb. » COTNCUS SOW. Ostrea cariosa Desh. Ostrea ventilabrum Goldf. Jlabellata Lam. » Quetelelr Nyst.
BRACHIOPODES.
Terchratulina Nystr (Bosq.)
POLYPIERS.
Cyclolites trochoides Nyst.
Quelques dents de Lamna, Otodus, Galeocerdo, Pienodus,
Myliobatis.
Un polypier.
MÉMOIRES. 61
En somme, Grimmertingen est un gite magnifique, digne d’être exploité avec grands soins et qui l’est d’ailleurs par notre collègue de Looz qui y a recueilli plus de 200 espèces.
Ce n’est guère que vers 1 h. de relevée, que nous avons quitté à regrets ce gité si attachant, et nous avons repris la direction du château de Neerrepen en suivant cette fois les hauteurs.
En traversant un petit bois, le Scabosch, au sommet d’une éminence, notre guide nous à fait remarquer un trou de re- nard très-intéressant. Il s'ouvre dans le limon quaternaire, mais l’animal en approfondissant son terrier, rejette à la sur- face une quantité de fossiles bien conservés remplis de sable blanc. La présence de nombreux Pecéunculus obovatus quel- quefois bivalves et d’une conservation parfaite, du Pecten He- ninghausi, de l'Astarte Henkeliusi, de la Vencricardia Oma- liusi, font immédiatement reconnaître les sables blancs formant la partie supérieure du Rupelien inférieur, c’est-à-dire les sables de Berg.
Ajoutons qu'un splendide 7rochus (Kichri, Nyst?) a été également trouvé dans ce gîte.
Entre temps, l'appétit des, excursionnistes ayant atteint son maximum, M. de Looz nous invita à entrer au château de Neerrepen où habite son parent, M. le baron de Rosen. Celui-ci, avec une grâce exquise nous invita à diner, puis nous fit les honneurs de sa splendide habitation : le parc, la faisanderie, le chenil, les serres furent admirées tour à tour.
Après cette visite, les membres de la Société, accompagnés des hôtes du château, se dirigèrent vers un chemin creux abou- tissant à la ferme. Les talus assez élevés du chemin offrent les sables du Tongrien supérieur recouverts de limon quater- naire.
Les sables Tongriens sont blanc-jaunâtres, criblés de fos- siles bien conservés et très-durs. Le fossile qui caractérise ce niveau à été immédiatement découvert par les chercheurs : c’est la Cytherca incrassata; ajoutons-y la présence de milliers de Cyrena semistriata, de Cerithium elegans et Galeotti, de
62 SOCIÈTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
Corbulomya triangula, de Melania Nysti, de Paludina Du- chasteli et de Corbula subpisum.
Si mes souvenirs sont exacts, la base du terrain quaternaire a dû fournir à quelques membres de la Société des Zelix et Succinea subfossiles.
L'heure s’écoulant, l'instant de la séparation sonna et après avoir vivement remercié nos hôtes de leur réception aussi cor- diale qu’inattendue, nous nous sommes dirigés vers une sablon- nière située dans le parc du château. Là s’est présentée une épaisse couche de sable blanchâtre dépourvu de fossiles, que nous n’avons pas tardé d'identifier à celle qui recouvrait le sable vertinférieur fossilifère du gîte de Grimmertingen. Notre collègue de Looz a du reste confirmé cette manière de voir en nous affirmant que sous le gazon de la pelouse existe le sable vert inférieur pétri de fossiles. Vers le bas de la sablonnière, nous avons encore pu observer des débris de fossiles provenant d’une poche de sable inférieur précédemment exploitée et qui a fourni à notre collègue nombre d’espèces généralement plus dures que celles de la couche proprement dite, parmi lesquelles une grande Xostellaire brille au premier rang. |
Ces observations terminées, les excursionnistes s’engagèrent dans les bois qui couvrent les hauteurs et alteignirent après un certain temps de marche à travers de charmants buissons un lieu nommé Z/asel Bosch.
Là, le sol est littéralement composé de coquilles et l’absence de la Cylherea incrassata indique clairement que l’on foule un affleurement du sable Rupelien inférieur identique à celui du gite du château de Vieux-Jonc que nous étions appelés à visiter le lendemain.
Le gîte de Hasel Bosch est réellement très-beau, aussi les sacs ne tardèrent pas à s’emplir de nombreux Cerithrum ele- gans et Galeotti, d'innombrables Cyrena semistriata aux for- mes extraordinairement variables et encore ornées de leurs couleurs, de Corbulomya triangula, de Corbula pisum, de Lucina Thicrensi, de Melania Nysti, de Rissoa plicata, d'Zy-
MÉMOIRES. 63
drobia (Paludina) Draparnaudi ‘et Duchasteli, de Natica Nysti, etc.
Chacun a pu remarquer combien la forme de ces coquilles est variable, combien les granulations des Cérithes se changent insensiblement en côtes unies jusqu’à former des variétés sim- plement striées. Chacun a pu ramasser des quantités de Gas- téropodes (Melania, Rissoa, Paludina, Odostomia, Turbo- nilla..…) presque microscopiques, encore peu connus et où des découvertes intéressantes pourraient être faites ; aussi j'engage fort les membres de la Société d'examiner attentivement ces petites espèces, car un grand nombre de formes remarquables y sont à observer.
Après avoir fait d’amples provisions de ces fossiles si agréa- bles à recueillir à cause de leur belle conservation et de leur solidité, la petite troupe se dirigea vers le dernier gîte qui était à l’ordre du jour. Ce gîte est situé non loin de Tongres, à droite de la grand'route de Tongres à Bilsen, au village de Henis.
Le terrain qui s’y présente est l'argile verte qui fait partie de l’étage Tongrien supérieur. Quoique la superposition n’aie été aperçue nulle part, il est hors de doute que c’est cette as- sise qui repose sur les sables blanchâtres non fossilifères qui avaient été remarqués à Grimmertingen et à la sablonnière du château de Neerrepen.
L’argile verte de Henis est plastique mais sableuse, aussi est-elle exploitée activement et employée à la confection des tuiles et des tuyaux de drainage.
C’est dans deux excavations placées en contrebas l’une de l’autre que nous avons pu observer une coupe de l'argile verte. La puissance constatée était de 4 à 5 mètres et la masse n'of- frait aucune trace de fossiles sauf au sommet où une couche blanche formée de débris de coquilles a été reconnue. La plu- part de ces débris sont indéterminables tant ils sont menus, un peu de patience fait cependant découvrir des fragments de Cytherea incrassata et de Cérithes.
Le jour baissant et le gite étant improductif au point de vue
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paléontologique, il fut abandonné après que les constatations stratigraphiques y eurent été faites, puis, les membres de la Société, le sac gonflé des trouvailles de la journée, rentrèrent en ville par la grand’route de Bilsen, heureux et entièrement satisfaits.
SECONDE JOURNÉE. — Lundi 19 mai.
Le matin, les membres de l’excursion, dont le nombre s'était augmenté par la présence de M. Bricourt, prirent de bonne heure, à Tongres, le train qui les conduisit à la station de Hoesselt. Une fausse indication fit malheureusement perdre un, peu de temps, mais bientôt, remis en bonne voie, notre guide nous conduisit par un chemin creux reliant Hoesselt au village de Klein-Spauwen et dont les talus présentent un gîte très-intéressant.
A la base, nous avons retrouvé environ 1 mètre d'épaisseur de sable vert de l'étage Tongrien inférieur, fossilifère, iden- tique à celui du gîte de Grimmertingen, puis une couche épaisse de 80 centimètres environ, présentant de singuliers caractères : En effet, lors de la période quaternaire et peut- être même antérieurement, un grand mouvement des eaux à profondément raviné les étages miocènes qui s'étaient déposés à cette place, de sorte que, sur une partie intacte du Tongrien inférieur s’est déposée une couche rouge fortement ferrugi- neuse et composée de sable grossier dans lequel sont dissé- minés, avec un grand nombre de caïlloux roulés d’assez fortes dimensions, les fossiles des étages Tongrien inférieur, supé- rieur et Rupelien inférieur.
Dans cette couche, dont la valeur des fossiles au point de vue stratigraphique est nulle, d'innombrables Ostrea, des Vo- lutes, des Fuseaux, des Dentales, des assises inférieures, sont intimement méêlés aux Cérithes, aux Cyrènes, aux Pétoncles, aux Limopsis des assises supérieures. |
Comme dans toutes les couches remaniées, les fossiles y
MÉMOIRES. 65
sont durcis, ce qui permet de recueiliir facilement des espèces du Tongrien inférieur.
Voici, autant qu'on peut le faire, une liste, par étages, des espèces recueillies dans la couche remaniée :
TONGRIEN INFÉRIEUR. RUPELIEN INFÉRIEUR. Cancellaria elongata Nyst. Noritina concava ? Nyst. Lusus Cerithium elegans Desh. Triton arqutum (Brander). » plhcatum var. Galeotti Sand. Voluta cinqulata Nyst. Cyrena semistriata Desh. Ostrea ventilabrum Goldf. Cardium cingulatum Goldf.
» _ flabellata Lam. Limopsis Gold fussi Nyst. Fragments de Xostellaria. Pectunculus obovatus Lam.
» Plilippi Desh. Plus deux dents de poisson fort usées.
La couche remaniée est recouverte d’une forte épaisseur de limon quaternaire.
Du gîte intéressant du chemin creux de Hoesselt, les mem- bres de l’excursion se sont dirigés vers le château de Vieux- Jonc dépendant du village de Klein-Spauwen. Nous étant in- troduits dans le pare, nous nous sommes immédiatement portés au fameux gîte si connu. À gauche d’un chemin en pente, à travers le feuillage, on distingue un petit monticule blanchâtre, c’est un tas de sable fossilifère retiré d’un trou qu’on appro- fondit chaque année. Ce sable, type de l’assise inférieure du Rupelien inférieur est littéralement composé de fossiles ou de leurs débris : des quantités de Cérithes et de Cyrènes se pré- sentent d’abord à l'œil, cependant la recherche des espèces moins communes n’y étant pas aisée et le tamisage n'étant pas possible à cause de lhumidité constante du sable, le gîte fut abandonné pour le sol d’un kiosque situé à quelques mètres de là, recouvert de sable sec étendu en couche mince. Dans de telles conditions, la récolte fut aisée et abondante, c'était une
véritable collection du gîte, bien étalée, où chacun pouvait 9
66 SOCIËTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
puiser à son gré. Une ample provision des petites espèces dont j'ai déjà eu l’occasion de parler à propos de l’affleurement du même étage à Hasel-Bosch, a pu être recueillie par chacun de nous.
Voici la liste des espèces recueillies à Vieux-Jonc :
GASTÉROPODES. Melania Nysti(Duch). T'urbonilla turriculata Bosq. » (nflala id. Natica Nysti (d'Orb).
Littorinella Draparnaudi(Nyst) Cerithium elegans Desh. Bith.(Paludina) Duchastetiid. » plicatumvax. Galeotti (Sand). Rissoa plicata 14. etc.
LAMELLIBRANCHES.
Mya Tungrorum de Ryckholt. Zucina Tlerensi Desh. Corbula subpisum d'Orb. Pectunculus Plilippi Desh. Corbulomya trianqula Nyst. Mytilus subfragihs d'Orb. Cyrena semstriata Desh.
Comme remarque, j’ajouterai que Aytilus subfragilis est tellement délicate et fragile qu'il est très-difficile de l'obtenir entière; cette coquille est cependant très-commune car elle remplit le sable de ses débris nacrés, ressemblant à s'y mé- prendre à des paillettes de mica.
Après une heure ou deux de recherches fructueuses, la pe- - tite troupe, après avoir parcouru en touriste quelques magni- fiques allées du parc et admiré le cèdre du Liban qui domine la pelouse, quitta Vieux-Jonc pour se diriger vers le village de Berg où nous devions trouver sur la hauteur un sable su- périeur à celui que nous venions d’exploiter.
Au pied de la colline, quelques petites excavations nous ont montré le contact entre l’argiïle verte de Henis (Tongrien supé- rieur) et le sable de Vieux-Jonc. En ce point, la partie supé- rieure de l'argile est pétrie de débris de fossiles peu reconnais- sables. |
MÉMOIRES. 67
Cette constatation faite, les excursionnistes, après quelques tätonnements, arrivèrent au sommet de la colline, où un trou fraîchement creusé leur offrit immédiatement un sable du plus beau blanc, contenant une grande quantité de magnifiques fossiles. Ici la faune à changé et les eaux salées ont gagné du terrain, car, sauf quelques Cyrènes et une Zymnée, les formes des mollusques sont plus franchement marines.
C'est dans ce sable, que nous avions déjà rencontré, mais d’une manière peu visible, au trou à renard de Scabosch, que se trouve le vrai gisement du Pectunculus obovatus. Cette es- pèce s’y rencontre à tous les instants de son accroissement; de- puis quelques millimètres de diamètre jusque 10 et 12 centi- mètres. Tous les fossiles sont blancs, intacts et d’une grande solidité ; voici d’ailleurs la liste de ceux qui ont été trouvés :
GASTÉROPODES. Limneus acutilabris (Sandb). Pleurotoma Natica Nysti (d'Orb). L'usus Voluta Rathiceri Héb. Calyptrea striatella Nyst. LAMELLIBRANCHES.
Corbulomya triangula Nyst. Lucina Thierensi Nyst.
Cytherea Kick id. Leda gracilis Desh.
» incrassatavar. (Sand). Venericardia Omaliusi Nyst. Cyrena semistriata Desh. Astarte Iencheliusi id.
» neglecta Nyst. Limopsis Goldfussi id. Cyprina Nysti Desh. Pectunculus obovatus Lam.
Cardium multicostatum Phil. Pecten Hæninghaust Defr.
Le Zimopsis Gold /fussi y est très-commun.
Pendant que les chercheurs fouillaient avidement le beau sable blanc du gîte, une partie des excursionnistes, désireuse de voir l'argile à Nucules qui surmonte le sable de Berg, alla à sa recherche. Comme j'étais un de ceux qui étaient restés
68 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
au gîte de sable, attendant qu'un habitant du village vint nous apporter une Cyprina Nysti qu'il avait recueillie, je ne puis rendre un compte exact des découvertes faites par l’autre frac- tion. Toujours est-il qu'après quelques recherches, l'argile à Nucules, dernière assise du Rupelien inférieur, fut trouvée sous l’église de Klein-Spauwen. Nous étant ensuite retrouvés à Vieux-Jonc, nous avons pu examiner les échantillons re- cueillis. L'argiie à Nucules est gris-verdâtre ou rougeñtre, très-sableuse et par suite peu plastique, elle présente dans presque chaque échantillon quelques débris dela Vucula Lyel- liana reconnaissable à son éclat nacré; quelques autres formes parmi lesquelles était un ?/ewrotome pouvaient également se distinguer. De notre côté nous avons pu montrer trois valves de Pénorme Cyprina Nysh, une Voluta Ratheri, un Pleuro- tome, un Z'useau et une Cytherea Nysti qui nous avaient été apportés.
L'heure du départ ayant sonné, les membres de lexcursion quittèrent Vieux-Jonc et se remirent en marche vers Hoesselt. Cependant, en repassant par le chemin creux qui avait été notre premier gite du matin, l’on ne put s'empêcher de s’y ar- rêter un peu. La dernière fouille a donné entre autres choses une Serpule régulièrement turriculée de la couche remaniée et un lit de Pinna, malheureusement fort fragiles, situé en place dans le Tongrien inférieur intact.
Bientôt après, nous reprenions à Hoesselt le train qui nous emportait avec nos richesses.
Ainsi qu’on peut en juger d’après ce court rapport, l’excur- sion à été fructueuse, les gîtes nombreux et intéressants et les journées bien remplies ; elle laissera, j'en suis sûr, un excellent souvenir à tous ceux qui en faisaient partie.
,
INFERIEUR.
RUPELIEN
4
TONGRIEN SUPERIEUR.
TONGRIEN INFÉRIEUR.
MÉMOIRES.
69
COUPE DES TERRAINS EXPLORÉS.
Argile à Nucules. (Niveau fossilifère marin). S'able blanc.
(Niveau fossilifère marin et * saumâtre.)
(Couche à Pectoncles et àLimopsis).
S'able blanchâtre.
(Niveau fossilifère d’eau saumâtre et d’eau douce).
(Couche à Cérithes, à Cyrènes, à Corbulomyes). Arqile de Hems.
(Niveau fossilifère fluvio-marin).
S'able banc jaunûtre. (Niveau fossilifère fluvio-marin).
Sable banc grisûtre. (Non fossilifère).
Couche remaniée à Ostrea et dents de poissons.
Sables verts. (Niveau fossilifère marin).
Gite : sous l’église du village de Klein- Spauwen.
Gites: trou àrenard de Scabosch. Sables blancs de Berg.
Gites : Haselbosch. Parc de Vieux-Jonc.
Gîtes : tuilerie de Henis. Excavations à Berg.
Gite : chemin creux près du château de Neerepen.
Gites: Grimmertin- gen. Sablonnière du château de Neerepen
Gîte : Grimmertin- gen.
Gites :Grimmertin- sen. Chemin creux entre Hoesselt et Klein-Spauwen.
QUELQUES OBSERVATIONS
SUR LE
HYALÆA TRIDENTATA LAMARCK
par Alfred CRAVEN.
(Planche III.)
— SÉANCE DU 7 DÉCEMBRE 1875, —
J'ai été frappé de la figure donnée dans le « Hanual of the Mollusca » par le D'S. P. Woodward, de l’Æyalea tridentata Lk., avec l'animal.
Cette figure, et même celles données dans le Histoire natu- relle des Mollusques Ptéropodes » par MM. Rang et Souleyet, me paraît si peu ressembler à l'original, que je me suis proposé d'offrir à la Société quelques observations sur l’espèce, ainsi qu'une figure que j'ai faite lorsque l'animal vivait encore et pendant qu’il nageait dans un vase d’eau de mer. Plus tard, si toutefois cela offre quelque intérêt pour la Société, j'espère f- gurer plusieurs espèces différentes d’/Zyales et de Cléodores que J'ai prises dans les mêmes conditions que celle que je présente aujourd’hui.
Ce mollusque n’est pas aussi crépusculaire que beaucoup d’autres espèces d'Hyales, car je l'ai pris par une assez forte chaleur à presque toute heure de la journée, même vers midi.
Souvent, quand la mer était calme, je les regardais nager près du navire. Ils voyagent en petits groupes de deux ou trois à huit ou dix, mais on les voit souvent isolés. Ils se meu-
MÉMOIRES. 71
vent avec une rapidité incroyable, nageant quelquefois du côté inférieur, quelquefois du côté supérieur.
Ils méritent bien le nom que les premiers auteurs leur ont donné, celui de « ZZanneton marin ».. Le nom que les marins leur donnent est aussi très-caractéristique : ils les nomment « Papillons de mer. » |
La couleur de cette espèce est ordinairement d’un brun foncé, mais je l’ai souvent vue d’une nuance brunâtre presque nulle. Les dimensions varient aussi un peu; voici celles des individus que j'ai recueillis jusqu'ici :
Longueur de 15 à 17 millimêtres ; Largeur de 8 à 10 — Epaisseur de 7 à 8 —
Dimensions données par MM. Rang et Souleyet :
Longueur 18 millimètres ; Largeur 10 = Epaisseur 8 —
J’ai remarqué un appendice bien singulier attaché à la par- tie inférieure ou dorsale de l’ouverture de la coquille, que je ne crois pas avoir été observé par les célèbres naturalistes qui ont étudié les Ptéropodes. Cet appendice se compose d’une sub- stance transparente et gélatineuse, tellement tenace que j'ai souvent dû employer une forte chaleur pour le dessécher. À quoi servirait cet appareil ? peut-être est-ce un muscle aidant à la natation, peut-être sert-il à protéger l’animal du bord aigu de sa coquille, lorsqu'il nage.
La dentition linguale consiste en douze à quatorze lignes ; chaque ligne se compose de trois dents.
Habitat : Selon MM. Rang et Souleyet, ce Ptéropode se trouve dans l’Océan Atlantique, dans la Méditerranée, dans l'Océan Pacifique, l'Océan Indien et dans le golfe du Bengale. Quoique j'aie fait des recherches dans toutes ces mers à l’ex-
72 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
ception de l'Océan Pacifique, je ne l'ai rencontré jusqu’à pré- sent que dans l'Océan Austral, dans les localités suivantes :
LATITUDES. LONGITUDES
(Calculées d'après le méridien de Greenwich.) l'HPSSMATAU IS: Aa 9 2. 34 à 35° S. ISA E. 3. 3% S. 25 E. 4. 38 à 38//:° S. 56° à 51 E,
EXPLICATION DE LA PLANCHE III.
Ficure 1. Hyalæa tridentata Lamk. — Coquille vue de la face inférieure ou
ventrale, avec l'animal.
9, La même, sans l'animal.
3. Coquille vue de la face supérieure ou dorsale, avec l'animal.
4, La même, sans l'animal.
5. Coquille vue de côté, sans l’animal, montrant la fente latérale. La ligne pointillée montre la position de l’appendice gélatineux.
6. Une ligne transverse de dents linguales.
UNE ANOMALIE
OBSERVÉE CHEZ
LE PECTEN CORNEUS, SOW.
par Th. LEFÈVRE.
(Planche IV.)
— SÉANCE DU 7 DÉCEMBRE 1873. —
Depuis ma publication dans nos Annales du travail sur la faune laekenienne (1), fait en collaboration de mon ami et col- lècue, M. G. Vincent, nous avons continué de faire de nom- breuses excursions dans nos environs et spécialement à Wem- mel, localité décrite dans la note citée ci-dessus, où nous avons trouvé parmi un grand nombre de Pecten corneus Sow., plusieurs valves d'individus de cette espèce affectées d’une anomalie assez singulière.
Sie l'existence de difformités chez cette “ous n’a pas encore, à notre connaissance, été signalée jusqu’à ce jour, nous croyons que ces Acéphales anormaux peuvent offrir quelque intérêt, au moins pour plusieurs d’entre nos collègues. Je m’empresse d’en faire l’objet d’une note succincte que je pré- sente aujourd’hui pour nos Annales. |
Le Pecten corneus à été décrit et figuré par M. Sowerby dans le Mineral Conchology ; M. H. Nyst en a aussi donné la
(1) Note sur la faune laekenienne de Laeken, de Jette et de Wem- mel. Ann. Soc. Malac. de Belg. Tome VII, p. 49. 10
74 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
description dans son mémoire couronné sur les fossiles ter- tiaires de notre pays.
Cette espèce apparaît chez nous, dans les sables ypresiens supérieurs (1); elle n’est pas encore connue dans le système bruxellien mais elle reparaît dans tout le laekenien où elle ac- * quiert son plus grand développement avec les sables de Wem- mel; elle se montre enfin et pour la dernière fois dans le sys- tème tongrien inférieur de: Vliermael (2).
Le Pecten corneus est orbiculaire, les valves sont déprimées, équivalves et équilatérales. Sa surface extérieure paraît lisse, mais avec l’aide de la loupe l’on voit des stries concentriques très-serrées lesquelles sont traversées par d’autres stries lon- gitudinales, plus fines encore.
Les coquilles qui nous occupent en ce moment, se distinguent aisément du type dont nous venons de reproduire quelques- uns des caractères spécifiques. Chez celles-ci la surface exté- rieure des valves est sillonnée par un cercle ordinairement ré- gulier qui sépare la coquille en deux parties inégales, dont l’une normale se rapporte à la description des auteurs précités; l’autre, la partie inférieure, montrant de nombreuses petites squammes irrégulièrement rayonnantes en partant de la direc- tion du sommet pour aboutir au bord de la coquille.
Dans l’exemplaire jeune âge figuré PI. IV, figure 6, cette. li- mite est moins nettement tranchée, les côtes sont beaucoup plus larges et conséquemment moins nombreuses.
Ces squammes sont plus étagées et superposées sur les valves gauches, dont la surface extérieure est plus convexe que chez les valves droites.
Comme le montrent les individus représentés PI. IV, cette anomalie forme un croissant qui s’élargit et s’accuse fortement vers le bord inférieur; on croirait voir un Pecten corneus nor- mal agglutiné symétriquement sur une valve d’une autre es-
(1) M. Vincent, Bull. Soc. Mal. T. VII, p. LXXXV. (2) M. J. Bosquet in Dewalque. Prod. de Géol,. p. 415.
MÉMOIRES. 75
pèce à côtes, ne montant de celle-ci que la portion correspon- dant à la partie anormale de nos Pecten.
Il serait intéressant de connaître exactement quelles sont les causes qui ont pu produire cette anomalie qui n’est peut être que la conséquence d’une maladie du manteau, organe sécréteur de la coquille. C’est ce que nous n’approfondirons pas ici, préfé- rant laisser à d’autres, plus à même que nous, le soin de traiter cette question.
Cependant, nous nous permettrons une observation à ce sujet. Le genre Pecten, l’un des plus riches en espèces parmi les Mollusques, puisqu'il se compose, d’après le D' Woodward, de 176 espèces vivantes et de 450 espèces fossiles, se trouve représenté à toutes les époques géologiques. Son apparition dans nos terrains primaires commence avec le système dé- vonien qui renferme plusieurs espèces toutes striées longitu- dinalement. Partant de cette formation on peut suivre ce genre dans sa marche progressive et continue jusqu’à nos jours.
Dans nos différents systèmes on peut remarquer la prédo- minance constante des espèces costellées sur Les espèces lisses.
Afin de s’en convaincre on n’a qu’à consulter, par exemple, le grand ouvrage de Goldfuss, lequel renferme les descrip- tions de 122 espèces appartenant à ce genre ; sur ce nombre 19 espèces seulement sont mentionnées par l’auteur comme lisses ou ornées de stries concentriques. Ce sont surtout les ter- rains tertiaires et particulièrement le pliocène et le miocène qui contiennent le plus d'espèces. Pour l’éocène de nos environs, nous avons trouvé : le P. multistmatus, le P. pleberus, le P. solea, le P. duplicatus?, le P. nitidulus (1) et le P. corneus pour assise laekenienne inférieure et le ?. Æoni, le P. sub- laevigatus et le P. corneus pour la partie supérieure du même système.
(1) Espèce nouvelle décrite par notre collègue, M. Vincent, dans nos Ann. T. VII, p. 12. +
1
76 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
L'examen de ces espèces confirme également ce que nous venons d'exposer : sur ces 8 espèces, 3 seulement sont dépour- vues de côtes.
Pour terminer, reproduisonsune remarque faite par M. Des- hayes, dans son grand ouvrage sur les coquilles fossiles des environs de Paris (1), où ce savant professeur dit que le genre Pecten a cela de remarquable, que presque sans excep- tion, les espèces qui le composent sont toutes ornées de côtes plus ou moins nombreuses.
En conséquence, nous croyons que cette anomalie pourrait être considérée comme une tendance au retour vers un des caractères primordiaux et presque constants du genre.
Nous ne possédons pas encore un bien grand nombre de ces coquilles , car il est impossible d'observer l’anomalie , quoique elle soit très-apparente, quand les fossiles sont enveloppés de leur gangue ; c'est ce qui est cause que pendant longtemps nous avons très-fréquemment négligé de recueillir les valves nombreuses que nous avons rencontrées, et qu’il a fallu une dé- couverte fortuite pour nous amener à examiner minutieuse- ment toutes les coquilles de cette espèce.
(1) Coq. foss. env. de Paris. T. I, p. 302.
EXPLICATION DE LA PLANCHE IV.
Figure 1. PEcrex cornes Sow, Exemplaire anormal. Valve droite.
2 — \ — Valve incomplète. 2. — — Valve gauche.
% — — Valve gauche.
ù. — — Valve droite.
6. — — Jeune âge.
a Exemplaire normal. Valve droite.
RAPPORT SUR L'EXCURSION
DE LA
SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE
D
A COUVIN,
(PARTIE PALÉONTOLOGIQUE) par G. DEWALQUE.
— SÉANCE DU 7 DÉCEMBRE 1873. —
Le 5 septembre dernier, la Société malacologique se réunis- sait à l'Hôtel du Chemin de fer, à Couvin, pour son excursion annuelle. À cette saison, la richesse des environs nous pro- mettait d'abondantes récoltes tant en mollusques qu’en fossiles; aussi la réunion était nombreuse. Les noms des membres et des personnes étrangères à la Société qui y ont pris part, ont été donnés dans le procès-verbal de la séance du soir.
Après l’arrivée du train qui nous amenait de Bruxelles, de Liége et d’autres localités aussi éloignées, la première chose à faire était de déjeuner. Il était plus de midi quand on s’est mis en route. Guidés par M. Purves qui était arrivé la veille, les excursionnistes se rendirent en un point situé à 500 mètres à JO. N. O. de Couvin (clocher). Là, dans un chemin creux dé- bouche un ravin où affleurent les couches de la partie moyenne de l'étage à calcéoles. Ce sont des schistes plus ou moins gros- siers, gris, souvent calcarifères et renfermant quelques bancs minces de calcaire argileux; leur direction est E.-0. et leur inclinaison ne dépasse pas 20° N. La Société y à recueilli de
78 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
nombreux fossiles; voici la liste des espèces que nous avons
notées :
Bronteus alutaceus, Goldf. Gyroceras nodosum, Bronn.sp. Capulus priscus, Goldf. sp. Spvriler curvatus, Sch].
» Simpleæ, Phill.
» Specrosus, Schl.
var. tnler- medius, Schn. Cyrtia heteroclyta, Defr. sp. Athyris concentrica, de B. sp.
» ifhensis, Schn. Atrypa rehcularis, L. sp. Anoplotheca lepida, Goldf, sp. Rlyynchonella parallelipipeda,
» »
Bronn. (1). Pentamerus galeatus, Dalm. » globus, Bronn.
Orthis Lifhensis, d'A. et de V.
Orthis tetragona, F. Roem. Strophomena depressa, Sow.sp Leptœna interstrialis, Phil.
» trreqularis, F.Roem.
» lepis, d'A. et de V.
» ÎVaranjoana, de V. Productus subaculeatus, Murch- Calceola sandalina, Lam.
lenestrella antiqua, Goldf.
Cyathophyllum ceratites, G\df. » Steininger, E. et IT. Cystiphyllum lamellosuin, Goldf. sp. » vESICUloOSUM, Goldf. sp. Lavosites Gold fussi, E. et H. Stromatopora polymorpha , Goldf.
Il faut y ajouter Cupressocrinus abbreviatus, Goldf., dont un calice en bon état a été trouvé par M. Houzeau.
Après avoir suivi quelque temps ce petit ravin, la Société s’est dirigée à travers champs vers le nord. Au moment de re- joindre la route, elle a traversé une bande mince de calschiste et de calcaire argileux où l’on a recueilli, avec plusieurs des espèces précédentes, notamment les Polypiers, de beaux échantillons de Phacops latifrons, Bronn.
De là, en se dirigeant vers le N. E., on a bientôt rejoint la montée du chemin de Couvin à Boussu-en-Fagne. Ce sont d’abord des schistes analogues aux précédents, et l’on ÿ retrouve un grand nombre des espèces que nous venons de citer, notam-
(1) J'avais antérieurement confondu cette espèce avec Rh. primi- pilaris, Goldf. sp.
MÉMOIRES. 79
ment les Pentamerus, les Orthis et les Spirifer speciosus. Un peu plus haut les schistes sont plus quartzeux et passent au psammite. Nous y avons noté :
Gomphoceras Pterinea ventricosa ? Goldf. Spvrifer lævicosta, Val.
» Specrosus, Schl. Cyrtra heteroclyta, Defr. sp. Atrypa reticularis, L. sp.
Atrypa reticularis, var. aspe- ra, Schl. Orthis umbraculum, Schl. de grande taille. » Æifhensis, d'A. etdeV.
» striatula, Schl.
Leptæna vnterstrialis, Phill.
Arrivée sur le plateau, la Société a bientôt atteint la limite méridionale de la bande du calcaire de Givet. En ce point, situé à 1050 mètres au N. N. O. de Couvin, les déblais de quelques petites excavations pratiquées dans les champs à l’est du chemin, nous ont montré un calcaire noirâtre, compacte, assez fragile, à cassure largement conchoïde, en bancs minces, . séparés par des lits de calschiste noir devenant gris de fumée par les influences météoriques. La faune de cette petite assise forme le passage à celle des couches à stringocéphales propre- ment dites. Malheureusement les fossiles perdent leur têt très- aisément, et plusieurs d’entre eux sont encore indéterminés.
Nous y avons noté :
Bronteus Leptæna interstriahis, Phil. Phacops Chonetes minuta, Goldf. Gomphoceras Calceola sandalina, Lam. Loxonema Cyathophyllum ceratites, GAdf. Bellerophon Cystiphyllum vesiculosum , Sanquinolaria? Goldf. sp. Lucina Favosites Gold fussi, E. et H. Atrypa reticularis, var. aspe- Heliolites porosa, Goldf. sp. ra, Schl. Sfromatopora polymorpha, Pentamerus Goldf.
et des fragments de colonnes de crinoïdes indéterminées.
Deux cents mètres plus au nord, on est sur le véritable cal-
80 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
caire à stringocéphales, mais, faute d'exploitations, on n’a recueilli sur ce plateau que Cyathophyllum quadrigeminum, Goldf. et ÆZeliolites porosa, Goldf. sp.
Après avoir traversé ce plateau de calcaire de Givet, la Société a rencontré, sur les bords du ruisseau de l’'Haine, une selle de schistes à calcéoles qui pousse une pointe au N. E. dans le calcaire. On ne s’est guère arrêté à chercher en cet endroit ; et pourtant M. Houzeau à eu la chance de rencontrer le fossile le plus intéressant de l’excursion, un spongiaire que j'ai décrit récemment des environs de Prüm (Eïfel), dans le même étage, et auquel j'ai donné le nom d’Aséræosponqium meniscoides. Je lui renouvelle ici mes remerciements pour l’obligeance avec laquelle il a bien voulu enrichir ma collec- tion de ce spécimen qui m'intéresse tout particulièrement.
De ce vallon on remonte sur la colline que forme le calcaire de Givet, on la traverse rapidement. Beaucoup de champs arides sont bordés de blocs de calcaire où il n’est pas rare de trouver des polypiers et surtout de nombreux individus de Stringocephalus Burtini; mais malheureusement, il est impos- sible de les dégager.
Après avoir dépassé l’'Hermitage, on trouve les schistes plus fins de l'étage de Frasne, partie inférieure du système famen- nien ou devonien supérieur. La Société y a recueilli surtout Spirifer Verneuili, Murch., S. euryglossus, Schn. (S. pla- tyrhynchus, M., de V., de K.), Receptaculites Neptuni, Defr. et plusieurs autres espèces.
Avant d'arriver au village de Boussu-en-Fagne, on traverse la pointe d’un ilot calcaire appartenant à l’assise supérieure de cet étage. C’est là que M. Malaise a mis la main sur une pièce importante, un fragment d’une écaille osseuse d’un poisson, probablement Aséerolepis ornata, Eichw.
La pluie, dont un ciel couvert nous menaçait depuis le matin, nous à obligés à rentrer au logis avant la nuit. Le lendemain, après une nuit orageuse, elle n’a pas cessé. Quelques-uns d’en- tre nous ont fini par se décider à se mettre en route vers dix
MÉMOIRES. 84
heures, pour aller visiter les curieux gîtes de sable avec cail- loux roulés de quartz et de grès stratifié, ainsi que de limonite, qui sont exploités dans le calcaire à calcéoles à environ 1 1/4 kilomètre à l'E. $S. E. de Couvin. De là, revenant vers le S.0., on à traversé une bande assez étroite de schiste brun-grisâtre avec quelques psammites et accidentellement un peu de cal- caire. Vers le haut on y a trouvé Chonctes dilatata, F. Roem. et Ch. sarcinulata, Schl., avec Spirifer cultrijugatus, F. Roem., qui a donné son nom à cet étage. Continuant vers le Sud, on a jeté un rapide coup-d’œil sur les schistes et les psam- mites rouges, avecgrès vert sombre, qui constituent l'étage de Burnot, si bien caractérisé par sa couleur, à défaut de fossiles ; puis on est arrivé aux schistes noirs, avec grès noir verdâtre, à côté des anciennes forges de Pernelle. Dumont rappor- tait ces roches à son système ahrien : nous n’y avons trouvé aucun fossile. Enfin, les plus déterminés sont arrivés, à envi- ron 600 mètres au S. de Pernelle, aux schistes noirs hunds- ruckiens, dans lesquels on à fini par découvrir un ou deux bancs criblés d'empreintes de fossiles en mauvais état. J’y ai noté : Spirifer carinatus, Schn., Sp. micropterus, Goldf., Afky- ris concentrica, de B., Rhynchonella Dalerdensis, K. Roem., Rh. Orbignyana, d'A. et de V., Chonetes dilatata, F. Roem. et Ch. sarcinulata, Schl. Nous n'avons pas eu la chance de ren- contrer Leptœona Maurchisoni, d'A. et de V.
À une heure, les derniers d’entre nous rentraient à l’hôtel, maugréant contre la pluie et le vent.
Le lendemain, l'incertitude de la journée qui commençait, jointe aux souvenirs de la veille, avait considérablement réduit le nombre des excursionnistes. On convint de se rendre à Dourbes, pour explorer, sous la direction de M. Purves, d'anciennes minières riches en stringocéphales et autres fos- siles du calcaire de Givet proprement dit.
La route de Couvin à Petigny est établie sur les schistes à calcéoles. Aujourd’hui encore elle peut fournir de nombreux
fossiles. On ne s’y est guère arrêté; je puis citer seulement, 11
82 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
comme espèces que la Société n’avait pas encore rencontrées : Merista plebeia, Sow. sp., Spirifer subeuspidatus, Schn., etun individu incomplet que je crois pouvoir rapporter à Zeplæna caudata, Schn., espèce qui n’avait pas encore été signalée dans le pays. Un peu plus loin, à la descente vers Petigny, on arrive à une bande étroite de calcaire argileux et de calschiste, qui paraît correspondre à celle qu’on avait rencontrée au second point exploré le dimanche. On y a trouvé, entre autres, Pron- teus alutaceus, Goldf. et de nombreux 2Aacops latifrons, Bronn. Un peu plus loin on recueillit Spirifer elegans, Stein., dans des schistes remplis de Z'enestrella et d'articles de colonnes de crinoïdes. |
À Nismes, la Société rencontra, au four à chaux situé un peu au S. du village, la base du calcaire &e Givet, formée de calcaire noir compacte avec lits de calschiste de même couleur. C’est la même assise de transition que nous avions observée le premier jour au N. O. de Couvin. Ici les bancs calcaires pré- sentent un clivage indépendant très-net. On y a trouvé, entre autres, un Pentamerus à plis nombreux et bien marqués, qui me paraît constituer une espèce nouvelle, à laquelle je propose de donner le nom de P. costatus.
De là, la Société se rendit à l’endroit où l’Eau Noire sort calme et tranquille sous des rochers à pic, formés par la partie supérieure du calcaire de Givet. A côté sont les schistes fins de l'étage de Frasne, où l’on n’a guère recueilli que Spirifer Ver- neuili, Murch., Ortlis striatula, Sch]l., et un petit Cyatho- plyllum turbiné ; puis après avoir déjeuné, on se dirigea sur Dourbes par le plateau calcaire.
Les minières de Dourbes que nous avons visitées, paraissent abandonnées depuis longtemps. Elles sont situées un peu à l'est du tunnel. Ce sont de vastes poches en entonnoirs, ouvertes dans la dolomie du calcaire à stringocéphales. La friabilité de la roche permet quelquefois d’en extraire des fossiles en très- bon état; ce qu’on ne peut guère obtenir dans le calcaire. Nous citerons particulièrement ici Murchisonia bilineata, Goldf. sp.
| MÉMOIRES. 83
Megalodon cucullatum, Sow., Uncites gryphus, Defr., abondant surtout en individus jeunes, Séringocephalus Burtini, Defr. et Atrypa reticularis, var. aspera, Schl. Dans le calcaire on a re- cueilli de nombreux polypiers, Cyathophyllum quadrigeminum, Goldf. et autres, Zaphrentis, F'avosites polymorpha, Goldf., Stromatopora polymoïpha, Goldf. puis un bryozoaire, Aulopora repens, Goldf.
L'heure avançait, et le départ du train nous ob'igea à reve- nir en toute hâte à Couvin. Le soir nous étions tous au logis, fort contrariés du mauvais temps qui avait abrégé l’excursion.
MOLLENQUEN TERRENTRES ET BLUVIATILES VIVANTS
OBSERVÉS PENDANT L’EXCURSION DE
LA SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE
A COUVIN, LES 7, 8 ET 9° SEPTEMBRE 1875,
par Jules CGOLBEAU.
— SÉANCE DU 7 DÉCEMBRE 14875. —
Nous donnons simplement ci-après la liste des espèces ob- servées aux environs de Couvin pendant l’excursion de la So- clété.
Nous n'avons pas cru utile d'indiquer les divers systèmes géologiques sur lesquels ces espèces ont été rencontrées; les différences de faune provenant de cette cause, si elles peu- vent exister pour les terrains en question, ne paraissentpas bien établies dans les localités que j'ai visitées qui sont toutes com- prises dans les terrains devoniens, schistes et calcaires, dont les diverses assises se trouvent assez bien enchevêtrées.
Une seule exception aurait pu être faite à cet égard pour les Fonds de l’eau et Pernelles, situés sur la lisière du massif des terrains rhénans de Dumont; mais nos recherches y ont été trop rapides et limitées presque au point de contact des deux terrains, là où la couche superficielle a dû évidemment subir un mélange.
D'un autre côté la localité de Dourbes, située sur le calcaire de Givet, que je n’ai pas vue et sur laquelle les indications rap- portées ici sont de M. Vanden Broeck, paraît avoir une faune
MÉMOIRES. 85
malacologique plus riche que les autres environs de Couvin, ce qu'il attribue à la nature minéralogique de la roche dont l’état de décomposition est plus favorable au développement des mollusques.
Nos recherches ont donc été bornées au terrain devonien et, dans les localités explorées, je ne crois pas que l’on puisse, au point de vue de la faune malacologique contemporaine, faire de distinction entre ses différents étages. Les stations des di- verses espèces de mollusques y sont plutôt déterminées par des causes ou situations topographiques et autres conditions résidant dans la surface du sol.
Ainsi le caractère général de la contrée est une suite de côtes et de plateaux secs, rocailleux et découverts, qui ne peu- vent naturellement offrir les espèces vivant dans les endroits humides et ombragés ; ces derniers n’ont pour ainsi dire été rencontrés qu'aux Fonds de l’eau et à Pernelles. N'ayant pas non plus pêché les quelques étangs qui se trouvent enclavés dans des propriétés particulières, nous ne pouvons avoir qu’une idée très-incomplète de la faune fluviatile.
En résumé, le temps réellement trop mauvais, même pour des Malacologistes, nous a fort contrariés dans nos recherches et les résultats obtenus ne sont pas tout à fait ceux que nous pouvions espérer; cependant l’ensemble des découvertes peut laïsser conjecturer celles qui restent à faire ‘et donner à con- naître à laquelle de nos régions malacologiques Couvin peut être rapporté.
Arion rufus L. — Couvin, carrières près de la Sablonnière, campagnes près de la route de Chimay. Frasnes, commun dans les prairies sous
les haies. » » var. ater L. — Frasnes. » fuscus Müll. — Jardins à Couvin, carrières près de la
Sablonnière, campagnes le long des routes de Chimay et de Rocroy.
86 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
Limax marginatus Müll. — Dourbes.
» agrestis L. — Couvin, dans les jardins, campagnes près de la route de Chimay, carrières près de la Sablonnière, plateaux des collines vers Frasnes. Pernelles.
» maxvmus L. — Couvin, carrières prés de la Sablon- nière.
; n var. cellarius Moq. — Fonds de l’eau. Dour- bes.
Vitrina pellucida Müll. — Couvin, anciennes carrières près de la Sablonnière. Fonds de l’eau.
Succinea elegans Risso. — Couvin, bords des fossés le long de la route de Rocroy vers la Foulerie et carrières abandonnées près de la Sablon- nière.
Zonites cellarius Müll. — Jardins à Couvin, carrières près de la Sablonnière, campagnes vers la Foulerie. Dourbes.
» tidulus Drap. — Fonds de l’eau.
Helix rotundata Müll. — Couvin, le long de la route de Ro- croy, très-peu d'exemplaires. Pernelles. Dourbes.
» n var. alba Moq. — Carrières abandonnées près de la Sablonnière ; rare.
» obvoluta Müll, — Couvin, carrières abandonnées près de la Sablonnière. Plateau entre Couvin et l'Hermitage. Frasnes. Assez commune dans les carrières du plateau de Dourbes.
» coslata Müll. var. pulchella Müll. — Pernelles, dans les mousses à la lisière des bois.
» nemoralis L. — Couvin, jardins, carrières, haïes. Pla- teaux entre Couvin et Frasnes. Frasnes, dans les carrières et les haies. Pernelles. Dourbes. Partout commune et variée dans les cou- leurs et les bandes comme dans la taille.
="
53
»
MÉMOIRES. 87
hortensis Müll. — Pernelles, quelques individus.
(
Un exemplaire remarquable a été recueilli par M. Vanden Broeck; il appartient par ses bandes à la variété n° 10, la couleur du fond est d’un jaune orangé et les bandes sont rouges transparentes.
pomatia L.— Frasnes, dans une carrière. Dourbes. rupestris Drap. — Couvin, carrières près de la Sa-
blonnière et excavation pour l'extraction du minerai de fer vers le même endroit où elle est très-commune sur les rochers. Frasnes. dans une carrière.
incarnata Müll. — Dourbes. hispida L. — Couvin, sous diverses plantes basses dans
les jardins et le long des routes de Rocroy et de Chimay. Pernelles. Dourbes. Coquille d’un brun ou d’un corné plus ou moins pâle.
costulata Zg\. — Couvin, carrières et plateaux près de
la Sablonnière. Plateaux des collines vers Frasnes, aux endroits incultes, couverts de broussailles et de pierres, aussi dans les champs en friche. Commune.
Cette espèce, que Moquin-Tandon regarde comme une variété de l’Æelix conspurcata Drap. doit, me semble-t-il, en être séparée. On peut la regarder comme nouvelle pour notre pays, bien que Kickx l’ait mentionnée comme rencontrée aux environs de Bru- xelles; mais il y a lieu de croire que les exemplaires de cet auteur appartenaient à l’'ÆHelix fasciolata Poir.
unifasciata Poir. — Couvin, carrières et plateaux près
de la Sablonnière, talus près de la route de Chimay. Coteaux vers Frasnes dans les ga-
88 SOCIÉTÉ. MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
zons secs, etc. Vit généralement avec l’es- pèce précédente mais est pius abondante.
» var. énterrupta Moq. — Mêmes localités que le type.
» » var. alba Moq. — Idem.
» ericetorum Müll. — Commune aux mêmes endroits que les deux espèces précédentes.
On peut citer les variétés suivantes :
» » var. leucozona Moq.— Avec le type, mais plus rare.
» » var. lutescens Moq. — Avec le type.
n » var. minor Moq. — Idem.
» » var. albinos Vanden Broeck. — M. Vanden Broeck donne ce nom à quelques exem- plaires qu’il a recueillis à Frasnes, lesquels sont d’une couleur blanc-jaunâtre, sans bandes, et ont la coquille très-mince et un peu translucide.
Bulimus obseurus Müll. — Couvin, le long de la route de Chi- may et carrières abandonnées près de la Sablonnière, commun. Pernelles. Dourbes.
Certains individus de Pernelles ont la coloration très-pâle.
» subcylindricus L. — Couvin, anciennes carrières près de la Sablonnière et côtes vers Frasnes.
Les exemplaires recueillis sont de petite taille.
Clausilia laminata Turt. — Couvin, assez commune dans les carrières abandonnées près de la Sablon- nière ; route de Chimay. Dourbes.
n » var. albinos Moq. — Couvin, carrière vers la Sablonnière ; un exemplaire recueilli par M. F. Plateau.
» parvula Stud. — Couvin, carrières près de la Sablon-
MÉMOIRES. 89
nière, Fonds de l’eau. Collines vers Frasnes, assez commune. Dourbes.
» 5 var. minima Hartm. — Couvin, sur les pierres près de la route de Chimay et dans les carrières près de la Sablonnière. Col- lines vers Frasnes.
» nigricans Jeffr. — Commune à Couvin dans les car- rières abandonnées et à Pernelles.
Espèce variable quant à la taille, aux stries, aux plis de l'ouverture.
Pupa avenacea Brug. — Frasnes, abondante dans une car- rière. Collines entre Couvin et Frasnes. Dourbes.
» _ Secale Drap. — Dourbes.
» doliolum Brug. — Dourbes.
» muscorum L. — Couvin, anciennes carrières. Per- nelles, commune sous les pierres.
Vertigo pygmæa Drap. — Couvin, carrières abandonnées près de la Sablonnière. Pernelles.
Planorbis rotundatus Poir. — Couvin, marécages le long d’un chemin des campagnes vers la Foulerie; rare.
» albus Müll. — Couvin, fossés le long de la route de Rocroy ; rare.
Limnæa limosa L. — L'Eau noire près de la Foulerie. Fossés le long du chemin de fer à la tranchée de Hanouet, exemplaires de petite taille, se rapprochant de la Z. peregra et ayant par- fois le péristome légèrement dilaté et évasé.
» peregra Müll. — Couvin, fossés le long de la route de Rocroy, commune. Petits fossés et mares des campagnes le long d’un che- min vers la Foulerie. Exemplaires de forme plus ou moins allongée.
19
90 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
» truncatula Müll. — Couvin, petit fossé désséché au bord d’un chemin des campagnes vers la Foulerie. Ruisseau près de l’Hermitage. Ancylus fluviatilis Müll. — L'Eau noire à Couvin et aux Fonds de l'eau, très-commun. Ruisseau de Rome, à la Platinerie.
Les exemplaires vivants étaient d’assez petite taille; parmi les exemplaires recueil- lis morts dans les graviers s’en trouvaient de plus grands.
Cyclostoma elegans Müll. — Très-commun dans les carrières du plateau de Dourbes. » » var. fasciatum Moq. — Avec le type. » » var. pallidum Moq. — Idem. » » var. volaceum Moq. — Idem. Pisidium cazertanum Poli. — Couvin, fossés le long de la
route de Rocroy et mare dans les cam- pagnes le long d’un chemin vers la Fou- lerie.
OBSERVATIONS
SUR LE CLASSEMENT
DES COUCHES TERTIAIRES MOYENNES
DANS
LE LIMBOURG BELGE
A PROPOS DU MÉMOIRE DE MM. ORTLIER ET DOLLFUS INTITULÉ : COMPTE-RENDU DE GÉOLOGIE STRATIGRAPHIQUE DE L'EXCURSION DE LA SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE DANS LE LIMBOURG BELGE, LES 18 ET 19 MAI 1875.
par Michel MOURLON.
— SÉANCE DU 7 DÉCEMBRE 1875. —
Le mémoire géologique sur le Limbourg belge que MM. Ort- lieb et Dollfus ont présenté récemment à la Société a une im- portance réelle pour notre géologie tertiaire. En effet, à part les idées théoriques qu'il renferme, il remet en discussion le classement adopté par Dumont pour nos couches tertiaires moyennes.
C’est sur ce point que je désire, à mon tour, présenter à la Société quelques observations.
Voici l’état de la question : En 1839 Dumont, dans son Rapport sur les travaux de la carte géologique (Bull. Acad. Belg.,t. VI, 2° part., p. 464), comprenait nos couches ter- tiaires moyennes sous le nom de sysième tongrien, nom qui a été adopté depuis par Alcide d’Orbigny (1852) et par la plu- part des autres géologues pour désigner le Miocène inférieur ou l’Oligocène des Allemands.
Dix ans plus tard, en 1849, l'illustre auteur de la carte
92 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
géologique de Belgique en présentant à l’Académie son der- nier rapport sur ce grand travail (Bull.,t. XVI, 2° part, p. 351), subdivisa son système tongrien en trois systèmes par- ticuliers. Il conserva le nom de « tongrien » au premier d'entre eux et donna aux deux autres les dénominations de rupélien et de holdérien à cause des dépôts fossilifères que pré- sentent respectivement ces deux systèmes sur les bords du Rupel et à la petite colline appelée le Bolderberg près d'Has- selt.
Il établit aussi des divisions dans chacun de ses systèmes comme on peut le voir déjà dans la Vofe sur la position géolo- gique de l'argile rupélienne et sur le synchronisme des forma tions tertiaires de la Belgique, de l'Angleterre e£ du nord de la France (Bull. Acad. Belg., t. XVIII, 2° part., p. 179), note qui parut en 1851 et dans laquelle il distingue deux étages pour chacun de ses trois systèmes :
Miocène
syst.boldérien. Ma
Eocène sup. ou Miocène inf.
Argile schistoide de Boom. Sable jaunâtre.
Argile verte de Henis.
Sable glauconifère de Lethen.
Ho (ignite du Rhin.) syst. rupélien
Eocène supér. | syst. tongrien.
Quant au système boldérien dont l'étage inférieur existe seul en Belgique, il présente une faune si voisine de celle de notre système drestien où falunien, qu’on rapporte maintenant à ce dernier système, la couche (conglomérat) qui renferme cette faune du Bolderberg, sans, toutefois, pouvoir assigner la place qu’occupe dans la série miocène les sables fins, pail- letés, sans fossiles qui se montrent immédiatement sous le con- glomérat fossilifère.
En 1852, sir Charles Lyell publia dans le t. VIII des 7rans- actions de la Société géologique de Londres son Wémoire sur les terrains tertiaires de la Belgique et de la Flandre fran- çaise qui fut traduit de l'anglais en 1856 par MM. Ch. Le
MÉMOIRES. 93
Hardy de Beaulieu et Albert Toilliez (Ann. des travaux pu- blics de Belgique, t. XIV.)
Dans cet important mémoire le célèbre géologue anglais arrive à cette conclusion que la formation tertiaire du Lim- bourg, constituée par les systèmes tongrien et rupélien, « peut être convenablement divisée en trois étages dont linférieur et le supérieur sont des dépôts marins, tandis que celui du mi- lieu est fluvio-marin. » (Ibid. p. 34.)
C’est là, comme on le voit, un nouveau classement bien dif- férent de celui adopté par Dumont et c’est le classement au- quel se rallient MM. Ortlieb et Dollfus dans le travail précité.
Seulement l’une des considérations qui paraît avoir surtout guidé les deux géologues de Lille, serait la présence dans les affleurements du Limbourg de dépôts fossilifères (dépôts de lagunes) et celle de sables de dunes subordonnés à ces dé- pôts. Ainsi le premier étage (tongrien inférieur) serait com- posé des « sables de Vliermael ; proprement dits qui, d’après les auteurs, deviennent plus argileux vers le nord et des « sa- bles de Neerrepen » sans fossiles qui seraient des sables de dunes. Les couches fluvio-marines du second étage comprenant le tongrien supérieur et le rupélien intérieur, seraient aussi formées en partie de sables de dunes lesquels se trouveraient représentés par les sables non fossilifères qui séparent les cou- ches à fossiles, etc.
En résumé ces dépôts tongriens et rupéliens du Limbourg représenteraient « une plage sableuse avec lagunes sur le bord d’une mer assez profonde et à sédiments argileux. »
Je ne puis porter un Jugement sur la valeur de ce classement géogénique qui doit être l’objet d’une étude plus approfondie ; mais je m'empresse d'ajouter que les idées de nos confrères sont ingénieuses et ont tout au moins le mérite d'indiquer un nouveau mode d'interprétation pour une partie de nos terrains tertiaires.
Je me bornerai seulement à présenter quelques réflexions sur la réunion en un seul groupe, dans le nouveau classement,
94 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
du tongrien supérieur et du rupélien inférieur. Dumont avait séparé ces deux systèmes de couches par des considérations stratigraphiques (stratification transgressive, lacunes, dénuda- tions, couches de gravier et de cailloux roulés) et par des con- sidérations minéralogiques (modifications dans la structure et la composition.)
Il les avait si nettement séparés que son système tongrien qu'il rapportait, de même que ses systèmes rupélien et boldé- rien, au Miocène dans son dernier rapport académique, il en fait, au contraire, de l’Eocène supérieur dans ses publications ultérieures tout en laissant, avec doute cependant, le rupélien dans le Miocène inférieur.
Je ferai remarquer, à ce propos, que si Dumont mentionne dans la légende de sa carte géologique le caractère fluvio-ma- rin du tongrien supérieur, il n’en est pas de même pour le ru- pélien inférieur. Voici, en effet, ce que porte la légende de cette carte qui ne parut qu’en 1852, c’est-à-dire environ deux ans après son dernier rapport :
Sable argileux, argile schistoide. Gravier, sable à Pétoncles, argile à Nucules, sable jaunâtre.
; | Système
infér
miocène
| rupélien. 1
Fluvio-marin, sable blanchätre, glaise verte et marnes à Cyrènes
Système et à Cérites.
Marin. Argile glauconifère, argile sableuse, sable argileux glau- conifère à Ostrea ventilabrum,
| sable glauconifère.
EÉocène supérieur.
tongrien.
»
Dumont semble donc ne pas avoir connu la faune fluvio- marine du rupélien inférieur, mais l’eût-il connue que cela n’eût probablement rien changé à sa classification.
Le grand stratigraphe avait toujours eu peu égard aux don- nées fournies par les fossiles et le caractère paléontologique
MÉMOIRES. 95
devait nécessairement, à ses yeux, céder le pas aux autres ca- ractères dans la RÉ nitaion des terrains.
Cependant le débat mémorable qu'il souleva au sein de l'Académie, en 1847, sur la valeur du caractère paléontolo- gique en géologie (Bull. Acad. Belg., t. XIV. 1° part., p. 292 et 2° part., p. p. 62, 112, 249) avait déjà provoqué chez notre savant paléontologiste, M. De Koninck, une réponse con- cluante en faveur de la paléontologie. Et, en effet, les données de celle-ci ne sont-elles pas en parfait accord avec la strati- graphie en ce sens qu'à part quelques exceptions connues sous le nom de colomes les différentes faunes présentent toujours le même ordre de succession. En outre, l’observation que les faunes diffèrent entre elles proportionnellement à leur distance dans l'échelle stratigraphique a naturellement fait conclure que les terrains qui renferment les mêmes faunes ou un nombre notable d'espèces communes, sont absolument contemporains ou tout au moins d’'époques très-rapprochées. Ce dernier principe repose en définitive sur la doctrine de l’évolution générale des êtres dans le temps.
Mais depuis l'achèvement de la carte géologique, la science a naturellement progressé ; certains principes ont été définis avec une précision et une évidence plus grandes et on a ‘pu apprécier la valeur relative des caractères qu’on plaçait en concurrence les uns des autres.
La prépondérance a été donnée à la paléontologie par la raison capitale que l'accident stratigraphique ne s’étend qu’à des espaces plus limités que les modifications de la faune, et aussi parce que l’évolution de la série animale est évidem- ment une loi d'ordre bien supérieur dans sa généralité et dans son uniformité à celle d’oscillations du sol ou de régimes mo- difiés des mers.
Les listes de nos fossiles tertiaires que nos éminents con- frères, MM. Nyst et Bosquet ont insérées dans les dernières Pts du Précis de géologie de M. d'Omalius et dans le Pro- drome de {M. Dewalque, nous ont fait connaître les rapports
96 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
-existants entre les faunes de chacun des termes de notre série tertiaire. Ces derniers ont pu ainsi être rattachés, paléontolo- giquement, aux termes correspondants des séries tertiaires dans les pays voisins. (1)
M. Nyst nous a montré, en outre, dans une publication ré- cente (Patria Belyica) que nos faunes tertiaires loin de former une suite continue offrent, au contraire, une série fréquem- ment interrompue : des solutions de continuité nombreuses se présentent dans la succession des faunes, tantôt par suite de l'absence complète de dépôts intermédiaires, tantôt par l’inter- callation de dépôts fluvio-marins entre des dépôts exclusive- ment marins.
Cette méthode de classement conduit, dans l’état actuel de nos connaissances, à des solutions plus précises que celle qui repose sur le procédé purement stratigraphique. Et en effet, l'application de ce dernier procédé au raccordement de nos terrains tertiaires avec ceux des régions voisines repose sur un postulatum qui doit évidemment, dans les cas ordinaires, céder le pas à celui qui admet le synchronisme des couches contenant les mêmes fossiles.
Dans la question en litige il y a désaccord entre la strati- graphie et la paléontologie, en ce sens que la classification proposée par sir Charles Lyell et développée par MM. Ortlieb et Dollfus, réunit, à cause de leurs fossiles, des dépôts qui avaient été séparés par des considérations stratigra- phiques.
L’argile de Henis (tongrien supérieur) est séparée des sa- bles de Vieux-Jonc et de Bergh (rupélien inférieur) par une dénudation analogue à celle qui se manifeste chez nous, au
(1) Je rappellerai à ce sujet que lorsque parut le dernier rapport de Dumont sur son monumental travail (4849), M. Ed. Hébert, l’élo- quent professeur de la Sorbonne, avait déjà reconnu quelques mois auparavant que la plupart des coquilles provenant des couches ar- gilo-sableuses du Limbourg étaient identiques à celles de la couche miocène à Ostrea cyathula Lk. dans le Bassin de Paris.
MÉMOIRES. 97
commencement de la période éocène /aekémenne. En outre un dépôt de gravier et de cailloux roulés est signalé à la base des sables rupéliens, mais je ne sache pas cependant que cette dernière observation ait été faite lorsque les sables reposent sur l'argile.
Dumont fut particulièrement frappé de cette discordance par dénudation ainsi que de la présence de ce dépôt caillou- teux et, appliquant ici les principes dont il fit usage à plusieurs reprises pour séparer certains groupes dans notre série ter- tiaire, il établit une ligne de démarcation importante à l’en- droit où se produit cette dénudation.
Or, M. Nyst nous montre dans ses listes paléontologiques que la faune fluvio-marine du tongrien supérieur et celle du rupélien inférieur sont si voisines qu'on peut à peine les dis- tinguer par la paléontologie : sur les 49 espèces des marnes de Henis, 46 se retrouvent dans les sables rupéliens inférieurs. Il n’y a évidemment pas entre ces deux dépôts une lacune pa- léontologique comme celle qui sépare, par exemple, nos cou- ches diestiennes de nos couches pliocènes scaldisiennes. Dans ces conditions la dénudation et le dépôt caillouteux signalés par Dumont acquièrent une importance secondaire et doivent être considérés comme un accident dans le régime hydrogra- phique de notre plage tertiaire. Cette constatation stratigra- phique nous permettant seulement d'établir la séparation rigoureuse entre le dépôt inférieur argileux et le dépôt su- périeur sablonneux de notre formation fluvio-marine mio- cène.
Un cas semblable s’est du reste présenté il y a quelques années, lorsque M. Nyst montra (Bull. Acad. Belg., t. XII, p. 29, 1861), comme nous Pavons dit en commençant, que la faune du Bolderberg est assez voisine de la faune diestienne pour qu’il y ait lieu de réunir en un même groupe les couches qui les renferment.
Dumont, au contraire, se basant sur la stratification trans-
sressive du diestien et sur le dépôt caïllouteux de sa base, avait 15
98 SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
fixé entre ce système et le boldérien sa ligne de démarcation du pliocène et du miocène.
Je crois donc, par les considérations qui précèdent, pouvoir me rallier aux promoteurs de la nouvelle classification et re- garder avec ceux-ci les dépôts fluvio-marins (tongrien supé- rieur et rupélien inférieur) du Limbourg belge comme ne re- présentant qu’un seul et même étage dans lequel peuvent être distinguées avec netteté une assise inférieure argileuse et une assise supérieure sableuse.
BULLETINS
DE LA
NICIETE MALACULOUOU
DE
BELGIQUE
TOME VIII 24 ND
Annee 1873.
BRUXELLES
IMPRIMERIE ET LITHOGRAPHIE DE Ve NYS
37, RUE POTAGÈRE, 37
sh
y EX LE 5 UT TU tr.
BULLETIN DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ.
BULLETIN DES SÉANCES
DE LA
SOCIETÉ MALACOLOGIQUE
DE
BEL G'I'O:UFE"
Séance du 5 janvier 1873. PRÉSIDENCE DE M. Nysr.
La séance est ouverte à 2 1/2 heures.
Sont présents : MM. Nyst, président; De Koninck; Vanden Broeck ; Miller; Collin; Monteiro da Silva ; Lefèvre; Weyers; Vincent; Fologne; Mourlon; Purves; Desguin ; Piré; Colbeau, secrétaire.
MM. E. Colbeau et E. Vincent assistent à la séance.
MM. Thielens, Preudhomme de Borre, Fleming, Roffiaen font excuser leur absence.
Le procès-verbal de l’Assemblée du 1* décembre 1872 est adopté.
MM. Vanden Broeck et De Koninck demandent que les titres des ouvrages reçus directement de leurs auteurs soient men- tionnés au procès-verbal.
MM. Nyst et Colbeau font remarquer que ces titres se trou- vant mentionnés tout au long dans le Bulletin bibliographique des Annales, il suffirait de les donner en abrégé dans les procès- verbaux. — Adopté.
VI SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
Correspondance.
MM. C. Ubaghs et G. Moquin Tandon remercient la Société pour leur réception en qualité de membres effectifs.
Le Département de la guerre (bureau des signaux) des États- Unis, l’Académie royale des Sciences d'Amsterdam et les Sociétés Royale Physico-économique de Kôünigsberg, des Sciences naturelles de Neuchâtel, Silésienne pour la Culture des Sciences de Breslau, remercient pour la réception des Annales ou annoncent l’envoi de leurs publications.
Le Conseil général de la Ligue de l'Enseignement de Belgique annonce la fondation d’une École modèle laïque à Bruxelles et fait appel aux habitants pour aider à sa prompte exécution.
Dons et envois reçus.
MM. Ubaghs et Dautzenberg font parvenir leurs portraits photographiés.
Ouvrages offerts par leurs auteurs M. G. Moquin Tandon (Recherches anatomiques sur l'Ombrelle de la Méditerranée) et M. Ubaghs (Beobachtungen über die chemische und mechanische zersetzung der Kreide Limburg's. — Die Bryozoenschichten der Maastrichter Xreide-Bildung. — Essai sur les couches de Bryo- zoaires du T'uffeau de Maestricht).
Ouvrage offert par M. Vanden Broeck.
Publications reçues en échange des Annales de la part du Département de la guerre (bureau des signaux) des États-Unis, de l’Académie royale des Sciences d'Amsterdam, de l’Institut I. R. Géologique d'Autriche, du Comité royal Géologique d'Italie, de la Fédération des Sociétés d'Agriculture de Bel- gique, de la Ligue de l'Enseignement de Belgique, et des Sociétés d’Acclimatation de Palerme, Médico-chirurgicale de Liége, Royale des Sciences médicales et naturelles de Bruxelles, Entomologique de Belgique, Royale Physico-économique de Künigsberg, Silésienne pour la Culture des Sciences de Breslau, des Sciences naturelles de Neuchatel, pour la propagation de l'étude des Sciences naturelles de Vienne, Linnéenne du Nord
BULLETIN DES SÉANCES. — ANNÉE 1873. VIL
de la France, du Duché de Nassau pour l’étude de la Nature, Malacozoologique allemande.
Des remerciements sont votés aux donateurs.
Le Secrétaire dépose pour la bibliothèque trois exemplaires du Procès-verbal de la séance du 1° décembre 1872.
Communications et propositions du Conseil.
M. le Président annonce que le Conseil a reçu les démissions de MM. Adan, Devos, Lagrange et Ruhlmann.
Il annonce ensuite que le Conseil a reçu membres effectifs de la Société, dans sa séance du 24 décembre 1872, M. $S. R. Fle- ming, étudiant en médecine, à Bruxelles, présenté par MM. Collin et Colbeau, et dans sa séance de ce jour, M. J. Franco, étudiant en médecine, à Bruxelles, présenté par MM. Fleming et Collin, M. le D' Fromont, à Anvers, présenté par MM. Colbeau et Fologne, et M. L. Jordaô dos Reis Gama, étudiant en sciences, à Bruxelles, présenté par MM. Monteiro
-.da Silva et Collin.
Il annonce encore que le Conseil a rappelé au Gouvernement la demande de subside faite l’année dernière pour l'entretien de la bibliothèque et des collections, et qu'il à appris qu’une circu- laire conforme à la proposition faite à la dernière séance par M.Weyers, concernant l’expédition des échantillons, allait être adressée aux bureaux de poste du pays.
M. le Président propose de porter à 300 le tirage des procès- verbaux des séances de 1873, en prévision de l’augmentation du nombre de membres et de sociétés correspondantes.
M. De Koninck pense que ce nombre est insuffisant même pour une société naissante, il cite l’exemple de plusieurs sociétés dont les publications des premières années ont été épuisées faute d’un tirage suffisant.
M. Weyers fait remarquer que les procès-verbaux ne sont destinés, pour ainsi dire,qu’à une existence limitée et à une uti- lité passagère ; étant reproduits corrigés dans les Bulletins
VII SOCIÈTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
tirés à 400 exemplaires, il ne croit pas qu’il y ait lieu de crain- dre un épuisement trop rapide.
M. De Koninck croit cependant qu'un tirage à 350 exem- plaires ne serait pas trop élevé et que les frais de cette augmen- tation seraient du reste minimes en comparaison des avantages que la Société pourra en retirer. Pour faciliter l'établissement de relations avec les Sociétés étrangères, il propose l'impression d'une lettre-circulaire qui leur serait adressée; il se chargera volontiers de la remise d’un certain nombre de ces lettres, espèrant personnellement pouvoir mettre la Société en rela- tions avec plusieurs d’entre elles.
La proposition de M. De Koninck est adoptée et des remer- ciements lui sont adressés.
M. le Président fait part d’une résolution du Conseil propo- sant le vote secret pour les questions de personne, ainsi que pour les autres questions, lorsqu'un membre en fera la de- mande.
Sur les observations de M. De Koninck et de plusieurs autres membres, il est décidé qu'un vote sera secret lorsque trois membres en feront la âemande.
M. le Président annonce que M. Thielens a fait parvenir à la Société une caisse de Polypiers, etc., qu'il offre en échange.
La Société ne se trouvant pas en mesure pour le moment de réaliser cet échange, MM. les membres pourraient personnel- lement s’en occuper.
Rapports.
MM. Vanden Broeck et Colbeau font le rapport suivant sur le travail de M. Collin, intitulé : Sur la Lymnea stagnalis L. et sur ses variétés observées en Belgique.
» Chargé de vous rendre compte du travail présenté à la séance du 1* décembre dernier par M. Gustave Collin sur les
BULLETIN DES SÉANCES. — ANNÉE 1873. IX
variétés de la Zemnæa stagnalis rencontrées en Belgique, je m’empresse de remplir ici cette mission. Celle-ci se réduit à fort peu de chose du reste, car l'examen du mémoire présenté ne mayant fait rencontrer aucune espèce d’objection ou d’ob- servation à signaler, je ne puis que conclure avec empresse- ment à l’impression dans nos Annales du travail de M. Collin. A l’occasion de ce travail, je me plais aussi à constater l’entrée dans l’arène scientifique de notre Société d’un travailleur spé- cialiste de plus; et j'espère que, continuant à s'inspirer des vues et des idées qui l’animent dans son entreprise actuelle, notre collègue continuera le plus longtemps possible à nous favoriser de travaux du même genre et du même intérêt que celui dont j'ai l'honneur de vous demander l'insertion dans nos
Annales. » — Ern. Vanden Broeck. » Je me rallie aux conclusions de mon honorable co-rap- porteur. » — Jules Colbeau.
Ces conclusions sont adoptées par l’Assemblée.
Présentation de travaux pour les Annales.
M. Vincent lit un travail intitulé : Matériaux pour servir à la faune Laekenienne des environs de Bruxelles.
L’impression dans les Mémoires de la Société en est décidée.
M. Mourlon aurait voté plutôt pour l’impression dans le procès-verbal, craignant le retard résultant de la publication dans les Annales.
M. Lefèvre dépose deux coupes géologiques de terrains pour être jointes au travail qu'il a présenté avec M. Vincent, inti- tulé : Voée sur la faune Lackemenne supérieure des environs de Bruxelles. 1 donne lecture d’une note sur le parallélisme des Couches Laekeniennes, comparées à celles de Cassel, à joindre au même travail. — Adopté.
M. Mourlon ne peut pas prendre la responsabilité du travail de MM. Vincent et Lefèvre, parce qu’il ne se trouvait pas pré- sent aux séances où ce travail a été lu, et dans lesquelles il
pu, aurait à ce sujet, présenter quelques observations. b
X SOCIÈTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
MM. De Koninck et Nyst font remarquer que, dans tous les cas, chaque auteur est toujours responsable de ses opinions.
Plusieurs membres ajoutent que les Annales de la Société restent ouvertes à la discussion et qu'il serait désirable, dans l'intérêt de la Science, que les opinions contraires, lorsqu'elles existent, s’y fissent connaître.
Lectures. M. Vincent communique la note ci-après :
« Deux Gastéropodes nouveaux pour la faune bruxellienne. ,
» Par suite de grands travaux qui s’exécutent en ce moment à Uccle, le banc coquillier à ÆXostellaria ampla et à Venus suberycinoides, rencontré déjà en différents endroits $S. E. de Bruxelles, y a été mis à découvert. Ce banc, très-puissant en cette commune, vient de nous {ournir deux Gastéropodes restés inconnus pour notre faune.
» Le Pleurotoma clavicularis, variété B, décrit et figuré dans l'ouvrage de M. Deshayes sur les fossiles des environs de Paris, planche 69, fig. 15 et 16 et la Vo/ufa athleta, pl. 93, fig. 12 et 13 du même ouvrage. »
M. Vanden Broeck donne lecture de la note suivante : « Observations au sujet d'un Entozoaire des Limaces. »
» En parcourant dernièrement une revue scientifique d’An- gleterre « 7e Annals and Magazine of Natural History » mon attention a été attirée par un article de quelques lignes résumant un travail présenté par M. A. Barthelemy sur un ver nématoïde vivant en parasite dans l'œuf du Zimax griseus Müll. (Zimax maximus L.)
» Cet article est publié dans le volume III de la 8° série de la publication que je viens de citer, il se trouve à la page 515 du n° 18, c’est-à-dire du numéro de juin 1859,
BULLETIN DES SÉANCES — ANNÉE 1873. XI
» Les observations de M. Barthelemy consistent en ce qu’il a trouvé de nombreux specimens d’un petit ver nématoïde dans les œufs du Limax griseus, quelquefois un, quelquefois trois ou quatre dans un œuf. Leur développement dans l’œuf paraît correspondre avec celui de l’embryon de la limace. Ces ento- zoaires se tiennent à une certaine distance de lembryon et paraissent très-animés dans leurs divers mouvements. Un exemplaire a été observé attaché à la vésicule vitellaire dont la tête du futur mollusque est surmontée dans l’œuf. D’après l'auteur, le ver arrivé à son maximum de développement détruit l'embryon du mollusque.
» Quant à ce qui est de la détermination de ce curieux para- site, celui-ci diffère tellement des types connus que l’auteur le regarde comme pouvant servir de type à un nouveau genre Ascaroïdes et il en fait lAscaroïdes limacrs.
» Le ver est présent dans l’œuf au moment de la ponte et l'examen des limaces dont les œufs étaient infestés, montre les vers dans les intestins et l’ovaire, et constamment accompagnés d’un petit infusoire monadiforme. Les petits vers sont donc introduits dans les œufs pendant que ceux-ci sont en cours de formation.
» Telle est à peu près la teneur de cet article, et pour de plus amples informations, les éditeurs du journal renvoient le lecteur à la page 230 des « Comptes-Rendus » du 24 jan- vier 1859.
» Ayant publié dans le tome V de nos Annales (1) une ob- servation analogue à celle-ci, j'ai cru utile de citer l’article que l’on vient de lire, comme confirmation du fait que j'avais annoncé et que je crois de certaine importance pour l'étude de lembryogénie.
» M. Barthelemy fait remarquer que le développement de l’entozoaire est en rapport direct avec celui de embryon du mollusque. Cette observation est fort importante, car on peut
(1) Ann. de la Société Malacologique de Belgique, tome V, 1870, p. 15 etpl. IL fig. 8.
XII SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE
en déduire avec une grande certitude que la cohabitation de l'embryon et de son parasite dans l’œuf n’est pas due à une simple perforation des parois de l’œuf à l’intérieur du corps de la limace mère par un des parasites développés de celle-ci, mais provient bien de l'évolution simultanée dans un même œuf d’un embryon de mollusque et d’un ver nématoïde.
» L'observation que j'ai faite est encore plus concluante à ce point de vue, puisque j’ai observé l’entozoaire non-seulement à l'intérieur de l'œuf, mais encore à l’intérieur de l'embryon lui- même, et l’un comme l’autre paraissant en parfait état et bien portant.
» M. Barthelemy a-t-il observé que toujours la présence du ver détermine au bout d’un certain temps la mort de l'embryon? Je l’ignore, mais mes observations me portent plutôt à croire que les entozoaires peuvent, dans certains cas, rester dans les intestins de l'embryon arrivé au maximum de développement et continuer à y résider après la naissance de celui-ci, c’est-à- dire après sa sortie de l’œuf. Il est du reste à remarquer que la vésicule vitellaire, qui est l’organe où j'ai observé l’entozoaire, est absorbée peu à peu dans l’intérieur du corps de l'embryon et finit par former le foie ainsi que l’estomac et les intestins, c’est-à-dire précisément les organes où l’on rencontre les ento- zoaires des mollusques adultes.
» L’entozoaire qui se trouve primitivement dans la vésicule vitellaire extérieure peut donc se trouver insensiblement ramené à l'intérieur du corps et cela précisément dans les organes qui constituent son habitat ordinaire. Se sentant alors dans les conditions les plus favorables à son existence, l’ento- zoaire ne trouverait aucun avantage à détruire l'embryon ou le jeune mollusque qui, de son côté, ne peut guère être incom- modé par la présence d’un entozoaire dans ses viscères, témoin le grand nombre de ces parasites qui ont été observés si fré- quemment dans l'intestin des limaces.
» D'un autre côté j'admets parfaitement la justesse des ob- servations de M. Barthelemy pour ce qui concerne la mort des
BULLETIN DES SÉANCES — ANNÉE 1873. XHI
embryons infestés, mais je pense que cette question dépend entièrement de la position respective de l'embryon et du ver nématoïde. S'ils sont simplement voisins dans l'œuf comme M. Barthelemy l’a observé, au lieu d’être intérieurs lun à l’autre comme dans le cas que j'ai signalé, il me semble fort possible que l’entozoaire puisse chercher à percer l'embryon pour se procurer la nourriture qui lui est nécessaire (et qu'il ne trouve plus dans l’œuf lorsque l'embryon est entièrement formé), et il est fort probable que de cet acte puisse aussi dépendre la mort de embryon.
» Quoiqu'il en soit, de nouvelles observations doivent être faites à ce sujet et je compte bien ne pas perdre de vue l'étude de ce problème si intéressant.
» J'y reviendrai plus tard lorsque les circonstances me favo- riseront et surtout lorsque je me serai procuré le travail origi- nal de M. A. Barthelemy, ce qui me permettra peut-être aussi d'affirmer en même temps la détermination d’Ascaroïdes limacis à laquelle je crois pouvoir rapporter l’entozoaire que Jj’ai observé et figuré il y a trois ans, sans pouvoir le désigner sous aucun nom. »
M. Collin lit la notice suivante :
« Notice sur les coquilles recueillies dans les alluvions de la Senne. »
» Le 25 décembre dernier, nous sommes allés, mon collègue M. Vanden Broeck et moi, à Saint-Gilles, pour ramasser les coquilles dans les alluvions que les derniers débordements de la Senne y ont rejetées. Nous avions espéré recueiller quelques bons exemplaires et notre espoir n’a pas été trompé, c’est pour- quoi nous croyons bien faire de donner la liste de ces coquilles.
» La variation de plusieurs d’entre elles nous a particulière ment frappés, entre autres la Lymnea truncatula et la Valvata piscinalis.
XIV SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE
Liste des coquilles trouvées dans les alluvions de la Senne.
Limax parvulus Norm. Planorbis nitidus Müll. Succinea putris L. u complanatus L. “ elegans Risso. u carinatus Müll. ”_ oblonga Drap. u vortex L. ”. arenaria Bouch. u rotundatus Poiret. Zonites nitidus Müll. u albus Müll. “ cellarius Müll. u contortus L. “”. mtidulus Drap. u corneus L. “ crystallinus Müll. Physa fontinalis L. Helix rotundata Müll. Lymnea limosa L.
n. pygmæa Drap. ” palustris Müll.
“ Costata Müll. u. truncatula Müll.
nid. var. pulchella nid. var.
Müll. Bythinia tentaculata. L.
“”. nemoralis L. Paludina contecta Millet.
”. hortensis Müll. u vivipara Linné.
”. hispida L. Valvata piscinalis Müll. Bulimus obscurus Müll. “nid. var. fluviatilis Colb.
n Subcylindricus L. » id. var. bouche plus
nid. var. grandis Mke. grande.
“ acicula Müll. un cristata Müll. Clausilia nigricans Jeffr. Neritina fluviatilis L.
“ biplicata Leach. Unio tumidus Phihpps.
u Rolphii Gray. Pisidium Henslowanum Shepp. Pupa muscorum L. nid. var. inappendicula- Vertigo edentula Drap. tum Moq.
»” pygmæa Drap. “. amnicum Müll.
" antivertigo Drap. Cyclas rivicola Leach. Carychium minimum Müll. n. cornea L.
Planorbis fontanus Lichtf. » Caliculata Drap.
BULLETIN DES SÉANCES — ANNÉE 1873. XV
Communications et propositions diverses des Membres.
M. Colbeau fait part d’une lettre de M. Thielens citant dix espèces à ajouter à la faune connue de Folx-les-Caves et pro- venant de la couche tout à fait supérieure du dépôt Maes- trichtien, ce sont :
eteropora crassa Hag., AH. dichotoma Goldf., Manon peziza Goldf., 27. capitatum Goldf., Zdmonea clathrata Goldf., Znver- saria tubiporacea Hag., Siphonia tubulifera Goldf., Ceropora theloidea Hag., Trochosmilia Faujasi Edw. et Haim., Z'heci- dium vermiculare Davids.
Dans cette même lettre, M. Thielens annonce que M. Mat- thew lui donne avis de l'envoi d’une caisse de fossiles post- pliocènes du Canada, pour la Société.
M. Purves communique un revue anglaise « Mature » don- nant des résumés des travaux des sociétés savantes. Il se char- gera volontiers, si la Société le désire, d'adresser à ce journal un compte-rendu en anglais de nos séances, etc. — L’Assem- blée remercie M. Purves et accepte son offre avec empresse- ment.
M. Weyers croit que l’on pourrait aussi envoyer nos procès- verbaux à ce journal. — Adhésion.
M. De Koninck espère pouvoir donner un travail pour les Annales à une prochaine séance.
La séance est levée à 4 1/2 heures.
Séance du 2 fevrier 1873. PRÉSIDENCE DE M. Nysr.
La séance est ouverte à 2 1/2 heures. Sont présents : MM. Nyst, président; Purves; Fromont; Collin; Vanden Broeck; Hallez; Weyers; Lefèvre; Rofïiaen ;
XVI SOCIÉTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
Bricourt; Miller; Desguin ; Preudhomme de Borre; Colbeau, secrétaire.
M. E. Colbeau assiste à la séance.
MM. Thielens et De Koninck, font excuser leur absence.
Le procès-verbal de l’Assemblée du 5 janvier 1873, est adopté.
Correspondance.
MM. Fromont, Bricourt, Dollfus remercient pour leur récep- tion en qualité de membres effectifs de la Société.
M. Westerlund remercie pour sa réception comme membre correspondant et annonce son intention d'adresser à la Société la suite de ses ouvrages sur les mollusques de la Suède, de la Norwége et du Danemark, ainsi que les espèces nouvelles qu’il y décrit, appartenant aux genres Sphærium, Pisidium, Clau- silia, Pupa, Planorbis, etc.
M. le Ministre de l'Intérieur informe la Société qu’un arrêté royal récent vient d'accorder à la Société le subside de 1,000 francs qu’elle avait sollicité pour lentretien de sa biblio- thèque et de ses collections malacologiques.
Dons et envois reçus.
MM. Fromont et Westerlund font don de leur portrait pho- tographié.
Coquilles vivantes et fossiles de la Volhynie, avec carte de la localité où elles ont été recueillies, offertes par M. Des- guin.
Publications reçues en échange des Annales, de la part de l’Académie royale des Sciences de Belgique et des Sociétés des Sciences naturelles de Brême, Médico-chirurgicale de Liége, Isis de Dresde, Impériale des Naturalistes de Moscou, Ento- mologique de Belgique, Royale Linnéenne de Bruxelles, des Amis des Sciences naturelles de Rouen, Royale des Sciences médicales et naturelles de Bruxelles.
Des remerciements sont votés aux donateurs.
BULLETIN DES SÉANCES. — ANNÉE 1873. XVII
Le secrétaire dépose pour la Bibliothèque trois exemplaires du procès-verbal de la séance de la Société du 5 janvier 1873.
Cominunication du Conseil.
M. le Président annonce que, dans sa séance de ce jour, le Conseil a reçu membres effectifs de la Société M. J. V. Que- zada, étudiant en médecine, à Bruxelles, présenté par MM. Franco et Collin, et M. le D' A. M. Ross, à Toronto (Canada), présenté par MM. Preudhomme de Borre et Col- beau.
Lecture.
M. Nyst fait la communication suivante au sujet des coquilles fossiles et vivantes de Volhynie, offertes par M. Desguin :
« Les coquilles fossiles ont été recueillies par M. Desguin dans le terrain Miocène, près de Antopol (Volhynie) sur la route de Brest à Jitomir, avant d'arriver au fleuve Gorinn : elles y paraissaient abondantes mais le temps lui a manqué pour pouvoir en recueillir un grand nombre ; ilse propose du reste de retourner en cet endroit et d'y faire des recherches plus suivies. Une partie de ses récoltes a été donnée au Musée royal d'histoire naturelle de Bruxelles, une autre à la Société malacologique de Belgique. Voici la liste des espèces que ces dons comprennent :
Espèces fossiles recueillies près de Antopol (Vollynie) par M. Desquin.
1. Massa (Buccinum) baccata. Bast. Hôrnes die foss. Moll. des tert. Beck. von Wien, pl. 13, f. 6 a b. C’est aussi le Vussa (Buccinum) duplicata Sow. Tabl. of foss. of Lower Styria (Trans. géol. Soc of London. Vol. IT, p. 420, t. 39, f. 14) et le Buccinum dissitum Eichw., qui ne me paraissent être que des variétés du premier.
2. Bithinia acuta? Hôrnes (non Paludina acuta Drap).
3. Trochus (Turbo) pictus 1830. Eichw. naturh Skizze von
€
XVHI SOCIÈTÉ MALACOLOGIQUE DE BELGIQUE.
Lithuen. Volhynien, p. 220. C’est aussi le 7rochus Bouei Partsch. En 1853, M. KEichwald, Lethæa Rossica, a déerit cette espèce sous le nom de Trochus pictus, p. 237, pl. IX, f. 26, et M. Hôrnes, dans son bel ouvrage sur les fossiles ter- tiaires du bassin de Vienne, t. I, p.456, n° 10, pl. 45, f. 10-12, où elle se trouve en abondance dans la couche à Cérithes.
4.